Fin mars, les experts du GIEC rendaient le volume 2 de leur rapport sur le réchauffement climatique. Selon les membres du Groupement intergouvernemental sur l’évolution du climat, ce réchauffement va se poursuivre. D’ici 2100, la température sur notre planète pourrait augmenter de 0,3° à 4,8° selon les scenarii. Avec, forcément des conséquences sur la viticulture. Petit tour d’horizon…
Dans quelle mesure la hausse des températures va-t-elle toucher la viticulture ?
La hausse des températures a un impact sur l’agriculture en général. Avec un accroissement des problèmes de sécheresse, des phénomènes climatiques sinon dévastateurs en tout cas imprévisibles. Le rapport du GIEC montre que tout cela conjugué entraînera très probablement une baisse des productions de cultures essentielles comme le riz, le blé ou le maïs. La vigne sera donc touchée comme toute culture. Avec toutefois un paradoxe c’est que dans certains vignobles plus il y a de soleil mieux c’est. C’est le cas des vignobles au nord, comme la Bourgogne chez nous ou l’Alsace. Parce que les raisins mûrissent mieux, ils ont plus d’alcool, moins d’acidité. Les consommateurs sont plutôt contents.
Quelles conséquences pour les vins ?
– les vendanges sont plus précoces. De 15 à 20 jours en moyenne. C’est plus agréable pour les vendangeurs mais ça suppose une organisation différente et ça pose parfois des problèmes. Parce que les raisins sont récoltés chauds et ça complique la vinification.
– On a aussi constaté une augmentation du rendement. Il y a plus de CO2 dans l’atmosphère. Ca rend les ceps plus vigoureux, ils donnent des raisins plus gros. Mais cela fait des jus plus dilués et donc moins aromatiques.
– les vins auront plus d’alcool. Ils prendront 1° par décennie estiment certains experts. A terme, les vins pourraient donc être tellement alcoolisés qu’ils ressembleront à des spiritueux !
– les vins auront moins d’acidité. C’est bien mais à petite dose. En effet, l’acidité est nécessaire dans l’équilibre des vins. Elle jouerait en outre un rôle sur le vieillissement des vins. S’il y en a moins, comment vont évoluer les vins de Bourgogne ?
– l’augmentation des températures pourraient entraîner l’apparition de nouvelles maladies ou le développement de certaines. On le voit déjà avec la remontée vers le nord de maladie comme la flavescence dorée.
– le développement de phénomènes de sécheresse pourrait être problématique pour certains vignobles, car en France, : l’irrigation est interdite dans les vignes.
Quelles solutions ?
A défaut de trouver une solution au réchauffement climatique, la profession viticole et les chercheurs français se penchent sur le problème. Un projet baptisé Laccave étudie la question en regroupant le travail de 23 laboratoires de disciplines variées de la France.
De nombreuses pistes sont envisagées :
– agir sur les pratiques culturales en cultivant des vignes plus ou moins hautes, plus ou moins larges, en jouant sur la quantité de feuillage selon les régions pour ralentir le mûrissement. Certains préconisent de modifier la date de la taille ou le type de taille pour jouer sur la grosseur des raisins qui mettront ainsi plus de temps pour mûrir.
– Un chercheur bordelais propose aussi –pour les vignobles les plus au sud- d’installer des pergolas pour faire de l’ombre. Ou encore de vendanger en plusieurs fois : une 1ère vendange avec des raisins à peine mûrs, une autre avec des raisins plus mûrs et c’est l’association des deux qui pourrait équilibrer le taux de sucre et l’acidité.
– utiliser des nouveaux cépages. C’est une solution pour les régions où on assemble des raisins de variétés différentes. Mais en Bourgogne, on pratique ce qu’on appelle le mono-cépage : les blancs sont faits avec la variété aligoté ou chardonnay, les rouges avec le pinot noir. C’est imposé dans le cahier des charges des appellations d’origine (les AOP, ex AOC). Changer de cépage signifierait changer ce cahier des charges. D’autre part, il faut du temps pour que la vigne donne. C’est donc une solution onéreuse. La solution pourrait être plus simple : faire de la sélection « massale ». Autrement dit, chercher dans les parcelles, les ceps, ceux qui mûrissent le plus tard. Les sélectionner, les reproduire et choisir de préférence ceux-ci lors des replantations.
– utiliser la technologie pour pallier les défauts. Il existe des techniques pour « désalcooliser » les vins, en utilisant ce qu’on appelle l’osmose inverse. Mais ça n’est pas un atout pour la qualité du vin.
Le réchauffement, une aubaine pour certains ?
Les pays qui aiment le vin mais ne peuvent en produire à cause de leur climat pourraient voir le réchauffement climatique d’un bon œil en effet. C’est le cas de l’Angleterre. Les Anglais adorent les vins effervescents. Ils se sont mis à en produire il y a quelques années, avec de plus en plus de succès. Ils ont le terroir visiblement. Ne leur manque, jusqu’à présent, que du soleil et de la chaleur… Sans compter que c’est un terroir neuf et donc financièrement intéressant, en tout cas nettement, très nettement moins cher que les terres de Champagne !
=> pour en savoir plus :
– un article sur le site de l’INRA
– le projet Laccave
– Vinosciences à Beaune
– des articles de presse : France Info, France Info, Le Figaro-vin, Le Monde