Manifestation du 14 mars à Pau – Photo calandreta</p#>
Samedi, ils étaient près de 600 occitans, basques, catalans bretons et français à se retrouver à Pau pour manifester leur soutien aux écoles immersives calandreta (occitan), ikastola (basque), bressola (catalan), diwan (breton)…Avec le même slogan « Les calandretas doivent vivre » et un seul mot d’ordre : faire pression pour que les collectivités territoriales continuent d’aider ces écoles de statut privé. Ce que ne permet pas la loi Falloux.
La lei Falloux
Alfred de Falloux était Ministre de l’Instruction Publique lorsqu’il fit voter le 15 mars 1850 une loi d’inspiration cléricale, avec plusieurs dispositions pour libérer l’enseignement. Une loi d’un autre temps (IIème République), plusieurs fois modifiée et presque abrogée, mais qui sert aujourd’hui de justification à l’Etat pour fragiliser ces écoles immersives. Car cette loi énumère énumère les conditions d’ouvertures des établissements privés et les limites de leur financement par les collectivités territoriales. « Aquela lèi es la vaca sacrada de la Republica » selon Jean-Louis Blenet, président fondateur des écoles calandretas. Une loi attaquée par la droite et soutenue par le Parti Socialiste. C’était dans les années 93-94. François Bayrou, alors Ministre de l’Education voulait réformer le texte et déplafonner la possibilité pour les collectivités territoriales de subventionner les établissements privés. On connaît la suite : des manifestations monstres début 94, des grèves et le conseil constitutionnel qui affirme que le financement de ces structures privées est contraire au principe d’égalité. Aujourd’hui cette loi fait toujours partie des textes en vigueur, intégrée dans le code de l’éducation. C’est à ce titre que la préfecture des Pyrénées Atlantiques refuse le renouvellement du bail par la municipalité d’Artix (64) avec la calandreta.
Calandreta cèrca son niu
Pour tenter d’exister, ces écoles bénéficient souvent d’un bâtiment mis à disposition par une collectivité territoriale (mairie pour le primaire, conseil général pour le secondaire) pour accueillir les enfants. Il existe une soixantaine de calandretas, la moitié hébergées par des communes. Seulement une quinzaine sont propriétaires de leurs bâtiments. « Esser proprietari del bastiment es una desfacha. O divèm pas far » nous dit Jean-Louis Blenet. Calandreta est une école associative sous contrat avec l’Etat. Elle ne peut pas et ne fdoit pas supporter de telles charges. Alors, à Artix comme ailleurs, calandreta est logée contre une somme symbolique. Mais la préfecture n’en veut plus et menace de fermer l’école d’Artix.
Lo fuòc en Pirenèus-Atlantics
Les difficultés sont résiduelles et perpétuelles chez calandreta. Mais depuis quelques temps, elles se concentrent sur le département des Pyrénées-Atlantiques. La faute au basque. « Dins lo 64, lo numèro 1 es basc e l’occitan es lo dorsièr junt » rappelle Jean-Louis Blenet. Ce qui a mis le feu : la volonté de la commune d’Hendaye de bâtir un local pour une école ikastola devenue trop exiguë. Une résolution suspendue par le tribunal administratif de Pau. La commune tient tête et Seaska, la fédération des écoles en langue basque, va porter l’affaire devant le Conseil Constitutionnel. La pression au pays basque, plus cette dichotomie entre la loi et la réalité sociale de ces écoles, en font aujourd’hui un dossier très sensible. Le nouveau préfet Pierre-André Durand semble avoir mis de l’eau dans son vin : « L’Etat ne s’oppose pas au bail locatif ». Plus question de fermer la calandreta d’Artix. On ne touche pas à ce qui existe mais on empêche son développement. Pour calandreta, il n’y pas a pas d’autres alternatives : « Contunhar de nos mobilizar, fargar encara mai d’escòlas. Es la sola causa que farà cambiar la lèi » martèle Jean-Louis Blenet.
Photo Becky Stares – Fotolia.com</p#>
E deman?
Calandreta a écrit au Premier Ministre pour que l’Etat change la loi Falloux et fasse exception du cas des langues régionales. En attendant une loi plus générale qui leur donnerait un statut… Toujours dans les Pyrénées-Atlantiques, la construction d’un nouveau collège calandreta est évoquée. Actuellement à Pau comme à Montpellier, c’est le Conseil Général qui héberge ces collèges. Montpellier où calandreta demande aussi à la Région de s’engager pour créer enfin un premier lycée... « Lo dreit es pas adaptat a la realitat de la situacion » selon Jean-Louis Blenet. « Sèm dins una situacion catastrofica. En França, sèm dins lo regime de l’interdit : pas d’usatge juridic, economic, administratiu per l’occitan »…
Au moment où l’on parle de ratification de la Charte Européenne des langues minoritaires, où certains prétendent qu’il n’est pas utile d’en faire plus pour ces langues qui, selon eux, existent sans encombres, voilà un exemple concret à méditer. Et ce ne sont pas ses défenseurs mais l’UNESCO qui le dit : ces langues sont en danger. Alors si les écoles sont menacées…
Benoît Roux