Entre le groupe Massilia et le réalisateur Christian Philibert, c’est un grand chemin parcouru depuis de longues années. Après avoir fait le film des 30 ans du célèbre groupe marseillais, il signe leur nouveau clip. Grand moment de cinéma et de rigolade.
Le réalisateur des « 4 saisons d’Espigoule », « Travail d’arabe » et « Massilia Sound System le film » est repassé derrière les caméras, le temps d’un clip. Un court métrage en hommage à Gaspard de Besse, célèbre bandit provençal au grand cœur. Retour sur cet événement avec Christian Philibert
Massilia et Christian Philibert c’est une longue histoire …
CP : Oui, déjà ils ont joué un rôle dans mon engagement, dans le fait de rester en Provence, de vivre et de travailler ici, de ne pas « monter » à Paris. Ils ont donné l’exemple. Au fil des années, on s’est rendu compte qu’Espigoule et Massilia, c’était le même combat. Contre le centralisme culturel notamment. Nous on s’adresse au monde entier, mais on parle d’ici. Et puis les chourmos, les concerts, mes films, tout ça c’est générateur de lien social. J’avais déjà utilisé une de leurs chansons dans Afrik’aïoli (Au marché du soleil), mais notre première véritable collaboration, c’est le long métrage que je leur ai consacré.
C’est Massilia qui est revenu vers toi pour le clip ?
CP : Massilia n’a pas fait beaucoup de clips. Le dernier remontait à 1995 ! (« On Danse Le Parpanhàs »). J’avais déjà réalisé celui de la chanson « Angèle » pour le groupe Moussu T e lei jovents. Là, ils m’ont proposé de réaliser celui de « Sale Caractère ». On a mis quelques idées sur la table et finalement ils ont retenu l’hommage à Gaspard de Besse, le bandit qui prend aux riches pour donner aux pauvres, celui qu’on surnomme le Robin des bois provençal ! Une idée qui a séduit les membres du groupe car elle donnait à la chanson une connotation plus politique… une façon de défendre une meilleure répartition des richesses…
Gaspard de Besse, ça fait longtemps que tu le suis…
CP : Oui il m’accompagne depuis longtemps. Cela fait plus de 30 ans que je travaille sur l’histoire de ce bandit avec mon ami Jacques Dussart. Livre, film, conférence, exposition, nous avons pas mal de projets le concernant. Ce personnage est absolument passionnant. C’est le plus beau héros de l’histoire de cette région. Il est mort à 24 ans, sur la roue, à Aix, huit ans avant la Révolution Française. C’était un bandit au grand cœur. Il ne tuait jamais et ne détroussait pas les gens modestes. Il était jeune, il était beau, il plaisait aux dames. Dès son exécution, il est entré dans la légende…
Le tournage du clip, comment s’est-il passé ?
CP : Il a fallu faire vite car nous n’avions pas un gros budget. Nous l’avons tourné en 2 jours, à 2 caméras. A Cuges-les-Pins d’abord, près du parc d’OK Corral. Les propriétaires du parc nous ont fourni le carrosse et le cocher. Pour incarner l’aristocrate, j’ai fait appel à mon acteur fétiche Jean-Marc Ravera (4 saisons d’Espigoule, Travail d’arabe)… D’autres scènes ont été tournées à La Ciotat, dans un ancien relais de diligence. Nous y avons filmé les ripailles et les « playback » des 3 chanteurs.
Et les 6 de Massilia, ils s’en sortent bien pour des « novices » en cinéma?
CP : J’ai l’habitude de tourner avec des non pro. Mais les Massilia sont habitués aux objectifs et sont acteurs dans l‘âme. En plus, c’est un clip, donc on tourne sans son. Ça simplifie la tâche ! Comme à mon habitude, je les ai pas mal laissés improviser… Même si j’ai conçu le clip comme un court-métrage, cela reste assez différent d’un film traditionnel où c’est le réalisateur qui dirige tout. Le clip exige de se mettre au service des artistes, d’une chanson. Ils participent à l’élaboration du scénario et prennent les décisions finales.
Les costumes sont top aussi ?
CP : Oui, en fait, j’avais tourné en 2009 un court métrage intitulé « Rastègue le brigand ». L’histoire d’un bandit imaginaire qui prenait la relève de Gaspard, mais en plus maladroit. C’était inspiré d’un long métrage que j’avais failli faire avec Arte, une sorte d’Espigoule au XVIIIe siècle ! J’avais conservé les costumes dans plusieurs malles et cartons. Les Massilia les ont portés tels quels. On ne les a même pas lavés !! (rires)… Et puis il y a la Compagnie André Neyton qui nous a prêté aussi plusieurs costumes et de nombreux accessoires. Au final, ça rend bien !
D’autres projets?
CP : avec Massilia, pas encore, mais qui sait… Je reconnais que l’année 2020 m’a un peu déstabilisé. J’ai encore du mal à savoir ce que j’envie de raconter… En attendant, je continue de travailler sur Gaspard de Besse et bien d’autres personnages, comme le poète Germain Nouveau, ami de Rimbaud et de Verlaine, auquel je viens de consacrer un long métrage documentaire (Le poète illuminé, sortie prévue le 13 octobre 2021). Avec ces personnages, je tente de donner aux gens du sud l’envie de se ré-approprier leur histoire et à travers elle, de se recréer une identité.
Massilia – Sale caractère Réalisation Christian Philibert