C’est la saison des foires aux vins. Elles viennent de commencer dans certaines enseignes. Les autres vont s’y mettre dans les jours qui viennent. Jusqu’à mi-octobre, la grande distribution va réaliser 10 à 15% de ses ventes de vin. 2/3 des Français ont annoncé leur intention d’y participer. Et quand on sait que, aujourd’hui, les 2/3 des bouteilles sont achetées dans les hyper et les supermarchés… on imagine assez bien l’ampleur du phénomène. Mais beaucoup de questions se posent au consommateur. Est-ce intéressant ?
A priori oui. Parmi la jungle des étiquettes proposées par les différentes enseignes, il y a effectivement de bonnes affaires à faire. La preuve, c’est qu’aujourd’hui la grande distribution n’est pas la seule à organiser des foires aux vins, les cavistes s’y mettent ainsi que les sites de vente de vin en ligne. De même, toute la presse spécialisée dans les vins ou la cuisine consacre de larges pages, voire des dossiers complets aux foires aux vins. A noter en particulier le dossier de la Revue des Vins de France.
En revanche, il faut faire bien attention si on veut vraiment se faire plaisir parce qu’il y a beaucoup de références et beaucoup de marketing.
Comment sont choisis les vins vendus à ce moment ?
Aujourd’hui toutes les enseignes ont un ou plusieurs œnologues. Ce sont des professionnels. Ils reçoivent des échantillons, ils vont sur le terrain, dans les domaines ou les négoces pour rencontrer des producteurs. Ils font aussi les grands salons –comme Vinexpo à Bordeaux ou Vinisud à Montpellier. Brefs, ce sont des professionnels qui goûtent de très nombreux échantillons pour faire leurs sélections.
Il faut savoir toutefois que leurs critères ne sont pas basés que sur la qualité. Ils doivent prendre en compte également :
– le prix : on n’est pas prêt à payer aussi cher une bouteille en GD que chez un caviste même si, lors des foires aux vins, le consommateur dépense plus pour une bouteille que dans le reste de l’année
– la quantité : quand une enseigne a des magasins dans toute la France, voire au-delà, elle a besoin de gros volumes. Entre un bon vin d’un petit vigneron qui n’a que quelques milliers de bouteilles et un vin moins bon mais en grande quantité, le choix est vite fait !
– le goût des consommateurs. Par exemple, aujourd’hui, la mode est aux rosés, très présents dans les foires aux vins, surtout celles de printemps. Ils sont donc très nombreux dans les rayons avant l’été, mais pas tous de grande qualité. De même, pendant longtemps, c’étaient les bordeaux qui avaient la préférence des consommateurs lors des foires aux vins. Maintenant, tout le monde veut des bouteilles de vignobles moins présents ou moins connus. Les enseignes cherchent donc l’originalité… Mais originalité n’est pas forcément synonyme de qualité.
Comment s’y prendre
La seule vraie grande règle, c’est qu’il faut y aller en étant préparé.
Il faut déjà savoir ce que l’on veut acheter : des vins à garder ou à boire tout de suite. Des vins pour les grandes occasions ou pour un repas improvisé entre copains… Ca permet de choisir plus facilement dans toutes les étiquettes et de ne pas se laisser tenter par n’importe quoi.
Il faut aussi avoir regardé les catalogues distribués par les magasins avant et pendant les foires. Ca permet d’avoir une indication des appellations, prix et millésimes proposés par chaque enseigne.
Certaines organisent des dégustations la veille ou un ou 2 jours avant l’ouverture de la foire aux vins, c’est aussi une bonne occasion se rendre compte de ce qu’on est susceptible d’acheter. Pour y participer, le mieux c’est de se renseigner dans son magasin habituel. Ca permet de goûter les vins ; c’est quand même la meilleure façon de choisir ce qui nous plaît !
Une autre façon de se renseigner, c’est de lire les revues spécialisées dans le vin ou la cuisine. Elles font toutes des dossiers spéciaux foires aux vins avec plein de conseils, pour tous les budgets, même des conseils d’accords mets-vins.
Enfin, les guides sont une bonne source d’informations. Si un vigneron ou un négociant est distingué dans un guide sérieux et que vous trouvez d’autres vins de lui en supermarché que celui mentionné dans le livre, a priori il y a de grandes chances qu’il soit de bonne qualité. Les professionnels ne travaillent pas différemment les vins de gammes différentes.
Peut-on se fier aux récompenses, médailles et autres macarons apposés sur les bouteilles ?
A priori oui, car cela signifie que les vins ont été dégustés par un jury et qu’ils ont été sélectionnés et reconnus comme de qualité. Mais tous les concours ne se valent pas, tous les signes accolés sur les bouteilles n’ont pas le même intérêt. A privilégier donc les médailles obtenues lors de concours connus et reconnus.
Y a-t-il des pièges à éviter ?
Le 1er conseil est valable pour beaucoup de produits : éviter de se laisser tenter par les offres trop alléchantes : 6 bouteilles offertes pour 6 bouteilles achetées, ça laisse perplexe. Pourquoi le prix de la bouteille n’a-t-il pas d’abord été baissé?
Il vaut mieux éviter également les vins très bon marché. Les vins à moins de 3-4 euros sont forcément des vins de très gros volumes, donc souvent de qualité moindre. Ou alors, ce sont des vins que des négociants cherchent à écouler à tout prix. Ils ne sont pas forcément mauvais mais si vous les achetez, évitez de les garder et de le servir à des connaisseurs…
D’autre part, mieux vaut éviter aussi les très grands vins, les grands crus de Bourgogne, les grands noms du bordelais… Les enseignes aiment en avoir en rayon, ça valoriser leur offre globale. Mais le prix en GD n’est pas forcément plus intéressant que chez un caviste. Le conseil sera beaucoup moins personnalisé que chez un caviste ou au domaine, même si toutes les enseignes ont fait de gros progrès dans le conseil avec des œnologues présents physiquement certains jours, des vendeurs formés et des étiquettes très claires. Par ailleurs, vous ne connaissez pas forcément les conditions dans lesquelles ils sont arrivés en rayon : il peut y avoir eu plusieurs intermédiaires. Les conditions de transport ou de stockage n’ont peut-être donc pas toujours été les meilleures… Au prix que ces vins sont vendus, ils seraient dommage qu’ils aient été abîmés.
Pour l’anecdote, c’est en Bretagne que le phénomène est né. Région pas viticole pour un sou ! C’est le fondateur de la chaîne Leclerc qui a eu l’idée d’une dégustation de vins –surtout de Bordeaux- sur le parking d’un de ses magasins un dimanche matin. C’était en 1973. Et ça a tellement bien marché que le phénomène a peu à peu gagné toute la France et toutes les enseignes !