27 Déc

Le groupe Castel condamné à 4 millions d’euros après son rachat de Patriarche

cave_2Le groupe bordelais de vins Castel Frères a été condamné à une amende record de 4 millions d’euros par l’Autorité de la concurrence, pour avoir volontairement oublié de l’informer du rachat d’activités du groupe bourguignon Patriarche en 2011. C’est seulement la troisième fois que le gendarme de la concurrence sanctionne une entreprise pour ce motif de « défaut de notification ». Les deux premières amendes avaient été dix fois moins lourdes, à 392.000 et 400.000 euros.

En infligeant une telle amende à la maison mère du groupe Castel, la Copagef, l’Autorité de la concurrence a indiqué jeudi vouloir dénoncer « la gravité » des faits, mais aussi « la méconnaissance volontaire du groupe Castel Frères de ses obligations en vue de réaliser rapidement l’opération ». L’ampleur de la sanction tient compte enfin de la taille de ce géant très discret du vin français.

Castel avait racheté six sociétés de Patriarche en mai 2011, sans le signaler à l’autorité de la Concurrence, qui est notamment chargée de vérifier qu’une acquisition ne conduit pas  à fausser les règles de la concurrence. « La réalisation de l’opération a été portée à la connaissance de l’Autorité par un tiers », souligne l’Autorité.

Après examen, celle-ci avait finalement fini par valider, en juillet 2012, ce rachat malgré la position déjà « conséquente » de Castel sur le marché des vins de grande consommation. En effet, l’entité issue du rapprochement dispose « de plusieurs marques de vin de cette catégorie (notamment Vieux Papes, La Villageoise, Cambras, Cramoisay, Champlure et Lichette), dont certaines apparaissent comme incontournables », soulignait à l’époque l’Autorité.

Tout en validant l’acquisition, l’Autorité avait émis des réserves sur la forme et s’était réservée la possibilité d’imposer une sanction financière.  L’Autorité estime aujourd’hui que le groupe bordelais « s’est exonéré consciemment » de l’obligation de notification qui s’applique à ce genre d’opérations et ne l’a pas saisie dans les règles. Castel a ainsi commis « un manquement grave » qui « fait obstacle au contrôle des concentrations », estime le gardien de la concurrence.

« L’infraction reprochée au groupe Castel est d’autant moins justifiable qu’elle s’explique par une démarche dont l’unique objectif était la réalisation rapide de la concentration », ajoute-t-il. « Les faits constatés (…) dénotent l’adoption d’un comportement volontaire » de la part du groupe Castelqui « a formellement décidé de renoncer à vérifier son obligation de notification ».

Contacté par l’AFP, le groupe Castel, qui peut contester cette décision devant le Conseil d’Etat, n’a pas souhaité faire de commentaire.

De son côté, un porte-parole de la société Patriarche n’a pas non plus souhaité faire de « commentaire particulier sur une décision d’une autorité administrative ». Il a indiqué à l’AFP ne pas souhaiter  « rentrer dans un débat juridique » sur la nécessité qu’il y avait ou non d’une notification préalable au rachat, car « on est sur la pure forme ».

Créé en 1949 à Bordeaux par neuf frères et soeurs, Castel est progressivement devenu le premier producteur de vins en France et en Europe, avec une présence dans plus de 130 pays dont la Chine et la Russie. Il détient 1.400 hectares de vignobles et possède 21 Châteaux, dont 17 dans le Bordelais. Castel est aussi le propriétaire du caviste Nicolas (475 magasins en France et 55 à l’international). Il est numéro deux de la bière en Afrique et a longtemps possédé la marque d’eau Cristalline. Pierre Castel et sa famille sont classés huitième fortune de France avec un patrimoine de 7 milliards d’euros par le magazine Challenge.

Patriarche, créé en 1780, commercialise des appellations prestigieuses comme Montrachet, Meursault, Pommard, Nuits Saint-Georges, mais aussi des marques plus grand public comme Couvent des Visitandines (Bourgogne) et Pisse-Dru (Beaujolais). Le Château de Meursault et le Château de Marsannay avaient été exclus de la transaction avec Castel, ainsi que certains actifs situés à Beaune (Côte-d’Or).

AFP