09 Avr

Nouvelle réunion de la Conférence « Loue et rivières comtoises »

En juillet dernier, la première réunion de cet initiative mise en place à la suite de la crise de la Loue en 2010 avait eu lieu à Quingey. La réunion est prévue ce vendredi 11 avril au fort Griffon à Besançon à l’invitation du conseil général et de la préfecture du Doubs.

De nombreux points sont à l’ordre du jour. Il sera bien sûr question des récentes mortalités de poissons dans le Dessoubre. Le groupe scientifique présidée par Jean-François Humbert fera le point sur ses derniers travaux. ll sera également question de l’exercice de la Police de l’eau sur le département. Un point intéressant car le manque d’effectif de ce service de l’Etat est régulièrement dénoncé par les protecteurs de l’environnement.

Les actions en direction du monde agricole devront occuper une bonne partie de la matinée avec en particulier l’accélération du plan d’action pour la maitrise des effluents agricoles. Une volonté de la chambre d’agriculture à remarquer alors que ce début d’année a été marqué par plusieurs pollutions dues aux effluents agricoles. Autre bon signe, la signature de l’arrêté renforçant le règlement sanitaire départemental.

La singularité des bassins versants karstiques et les avancées sur le prochain contrat de territoire sont aussi à l’ordre du jour. L’accord plurinannuel entre le conseil général du Doubs et l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse sera signé à cette occasion.

Cet article, pour moi, c’est l’occasion de relire ce que j’avais écris en juillet dernier :

D’ici la fin de l’année, « un protocole détaillé décrivant les paramètres d’intérêt méritant d »être suivis, les lieux d’échantillonnages et les différentes fréquences d’échantillonnages recommandées en fonction des paramètres choisis » devra être établi avant la fin de l’année(…) Un contrat de territoire devrait être mis en place avant la fin de l’année.

L’année 2014 est bien entamée, le Dessoubre est en pleine crise, espérons que la volonté d’avancer vite affichée en juillet dernier va se concrétiser…

Isabelle Brunnarius
isabelle.brunnarius@francetv.fr

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Voici ce que compte dire le Collectif SOS Loue et rivières comtoises lors de cette réunion de la Conférence départementale :

Pourquoi le Comté ne doit pas être vendu en Chine

Sur son site, le CIGC communique sur ses démarches pour prendre pied sur le marché chinois. Ses responsables précisent que les volumes de production ne seront pas réalisés par une intensification des fermes actuellement productrices de lait à comté. Qu’ils seront réalisés par un recrutement de producteurs au sein de l’aire géographique, actuellement encore en lait standard,  et par une extension de l’aire géographique de l’AOP. (Cette extension  étant déjà définie).

 Cette démarche pourrait être rationnelle si la production de lait des plateaux karstiques était en équilibre avec son territoire. En équilibre avec la vie de ses sols, de la diversité floristique et avec le niveau d’exigence très contraignant des rivières karstiques à la réputation mondiale.

Or le printemps qui arrive va montrer à nouveau des prairies artificielles à la couleur du pissenlit en fleur. Cette plante nitrophile, appréciée pour ses qualités hautement diététiques, généralement limitée à 30 % des surfaces occupées en sols bien conduits, prend la place de la riche diversité des plantes à fleurs, revendiquée par les AOP de montagne. Ces dernières ne supportant pas les sols eutrophes. Et cet automne une partie des trop vertes prairies va se colorer en jaune triste, passée au désherbant. Le glyphosate se banalise sur ces prairies à AOP, alors que sa molécule dérivée, l’AMPA, reconnue cancérigène se retrouve dans tous les cours d’eau à des niveaux de plus en plus élevés !

Les rivières s’enfoncent dans une eutrophisation de plus en plus grave, les populations d’invertébrés, principale source d’alimentation des poissons, se sont effondrées depuis 25 ans. Les poissons affaiblis par ce manque de nourriture et par toutes les sortes d’agressions bien ou insuffisamment identifiées, n’en finissent pas de mourir lors de la fraye et en toutes saisons. Les micropolluants dans ces rivières, mesurés par l’agence de l’eau, sont majoritairement d’origine agricole, comme l’a montré le travail du collectif SOS LRC.

Avec les quotas laitiers, des droits à produire ont été déplacés des plaines de Haute-Saône sur les plateaux à Comté.  L’augmentation des performances laitières, privilégiées au détriment de la rusticité de la Montbéliarde, et ces quotas importés ont augmenté les besoins en alimentation. Les agriculteurs y ont répondu par l’importation de nourriture (tourteaux de soja brésiliens, céréales et foin de Haute-Saône) et aussi de paille. Parallèlement à cette démarche, la production de céréales a été abandonnée au profit d’une monoculture de l’herbe participant à la baisse de biodiversité floristique et au développement des campagnols terrestres. Les dégâts de ce petit mammifère ne se limitent pas aux aspects économiques, en plus de la pollution de la bromadiolone, il favorise le lessivage vers les rivières du  phosphore et des résidus du pesticide. De plus, il créé des problèmes de santé par son rôle dans l’échinococcose et le poumon du fermier.

Les méthodes de production, majoritairement pratiquées, font que l’impact écologique du litre de lait produit est plus important aujourd’hui  qu’avant 1990. Les importations déjà évoquées sont la principale cause de l’excédent structurel de fumure totale sur les premiers plateaux qui connaissent des sols peu profonds. Actuellement, il se produit  trop de lait et la manière de le produire n’est pas durable pour les AOP et IGP fromagères. Et cette situation obère totalement l’avenir des rivières.

Une DESINTENSIFICATION  de la production de lait est la voie rationnelle. Elle passe par un cahier des charges et des pratiques adaptés aux exigences des milieux, sols et rivières. Les volumes de fromages se stabiliseront à un niveau compatible avec le territoire et la légitimité des appellations.

La profession doit viser un haut niveau de Qualité dont le contenu environnemental soit indiscutable. Et trouver dans le prix de vente du fromage une compensation suffisante aux pertes liées à la baisse des volumes de lait produit. (1)

L’actuel plafond de 4 600 litres de lait par hectare a montré son incapacité à protéger les milieux naturels. Un plafond beaucoup plus bas, a été avancé lors de la table ronde de Pontarlier du 15 octobre 2012 pour assurer cet équilibre au territoire. Ce nouveau plafond impliquera une baisse de la fumure à l’hectare. Un plafond de 5 000 kg de lait par vache impliquera, lui, une baisse des compléments alimentaires.

 Les producteurs déjà en bonnes pratiques prouvent que ce changement profond est  possible. De plus la production en qualité biologique existe, les fruitières de Cerneux-Monnot, de Chapelle des Bois, de La Chaux, de La Grange de Vaivre et d’autres en apportent la démonstration. Cette voie doit être sérieusement examinée comme un des moyens pour sortir les AOP des difficultés actuelles et asseoir leur avenir. Le BIO peut compenser par un prix de vente plus élevé la baisse de volume de lait.

Non il ne faut pas exporter dans les conditions actuelles le Comté en Chine ni aux Etats Unis, ni au Qatar. L’intégration des producteurs de lait standard en Comté ne pourrait apporter un léger mieux que si les pratiques en Comté étaient totalement respectueuses des milieux et donc significativement  meilleures que celles du lait standard. Enfin si le poids démographique des fermes en lait standard était important. Or aucune de ces deux conditions n’est présente.

L’extension de la zone Comté et le recrutement de nouveaux producteurs, à l’intérieur de la zone actuelle, doivent d’abord servir  à compenser la réduction de production de lait chez les producteurs aux pratiques inadaptées au territoire.  Cette démarche contribuera à calmer les exigences des commissaires ultra-libéraux de Bruxelles et à réguler la transition pour les volumes de fromages.

Les cahiers des charges doivent-être sous-tendus par l’obligation de résultat de la « directive cadre eau 2015 » : les plafonds d’azote et de phosphore exportés par sous-bassins doivent donc être  compatibles avec le sauvetage du patrimoine rivières. Celui-ci doit revenir à un très haut niveau de qualité pour exprimer son potentiel économique.

Une vraie culture du respect des limites du cahier des charges doit s’installer accompagnée par  des moyens de contrôle indépendants et rigoureux, deux conditions sans lesquelles toutes les constructions seront vaines. Les compétences agronomiques des agriculteurs de tous âges doivent être renforcées et valorisées. Comme doit être distinguée dans les comices et au salon de Paris, la Montbéliarde à Haute Qualité Territoriales chère à Denis Michaud.

 Parler du marché chinois ne favorise pas l’instauration d’un débat constructif entre la société civile et la profession agricole. L’abandon de cet objectif me parait être une condition indispensable pour installer un climat propice.

 Marc Goux Collectif SOS LRC

  1. D’ailleurs cette baisse organisée réglera le problème du lait en surplus  dit  «lait de dégagement» dont le prix va -être très pénalisant.