Plusieurs milliers de partisans d’une « Alsace unie » sont attendus samedi à Strasbourg pour un rassemblement contre le projet de réforme territoriale qui envisage le mariage de leur région avec la Lorraine et la Champagne-Ardenne.
La manifestation aura valeur de test pour la droite locale à la tête des trois collectivités alsaciennes, qui a ressuscité en septembre son projet de fusion des départements et de la région dans un « conseil unique » pour contrer la réforme défendue par le président François Hollande. Réunies au sein du collectif « L’Alsace, ma région », la Région Alsace, les conseils généraux du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, auxquels se sont joints les sections locales UMP, UDI et Modem, espèrent rassembler 10.000 personnes autour d’une manifestation annoncée comme « festive » et « bon enfant ».
Leur modèle: la manifestation pro-bretonne de Nantes qui, le 27 septembre, a réuni entre 13.000 et 30.000 partisans autour du rattachement de la Loire-Atlantique à la Bretagne. Le Medef alsacien a également appelé ses adhérents à manifester. A Strasbourg, les partisans d’un conseil unique alsacien, projet pourtant rejeté dans les urnes en 2013, jouent leur va-tout avant l’examende la réforme territoriale au Sénat. « C’est la dernière des dernières chances de nous faire entendre » au niveau national, a lancé le président UMP du Conseil général du Bas-Rhin Guy-Dominique Kennel lors d’une rencontre avec la presse lundi. « Si la mobilisation n’est pas forte, (notre cause) sera très difficilement plaidable », a-t-il ajouté.
Le rassemblement est prévu à 14H30 samedi. En Alsace et en Lorraine, le projet de la droite alsacienne suscite l’inquiétude à gauche. « La manifestation présente un risque de faire monter une tension (…) un sentiment identitaire », craint le député socialiste du Bas-Rhin Philippe Bies. A l’extrême droite, les mouvements régionaliste Alsace d’abord et autonomiste du groupe « Unser Land » (Notre pays) ont en effet aussi appelé à manifester. En Lorraine, la gauche multiplie les appels du pied en direction de l’Alsace. Début octobre, le président socialiste de la Région Lorraine, Jean-Pierre Masseret a réaffirmé son attachement au projet Alsace-Lorraine, aux côtés de 13 députés et sénateurs socialistes des deux régions.
La fusion des trois régions, option la plus plausible
Mardi, une délégation d’élus alsaciens, parmi lesquels le maire PS de Strasbourg Roland Ries et le président de la communauté urbaine (CUS) Robert Herrmann, a plaidé au cours d’une entrevue avec Manuel Valls à Matignon le rapprochement avec la seule Lorraine. Si l’option Alsace-Lorraine n’est « pas enterrée », la fusion des trois régions, telles que l’envisage le projet de loi modifié serait néanmoins l’option « la plus plausible » aux yeux du Premier ministre, selon une source proche de la délégation. Une seule chose serait acquise: la place de Strasbourg qui conserverait son statut de capitale régionale sur la nouvelle carte, selon cette source.
« L’Alsace seule est une solution de court terme », soutient Philippe Bies. « Si on regarde le produit brut (de l’Alsace), la région va s’affaiblir. La seule solution justifiée c’est avec la Lorraine », souligne le député. Du côté de la population, difficile de mesurer l’adhésion à la proposition de la droite. Une pétition sur internet lancée par le maire de Mulhouse, l’UMP Jean Rottner, a recueilli à ce jour quelque 55.000 signatures. Accusée à gauche d’organiser une manifestation partisane, la région présidée par l’UMP Philippe Richert a suscité une polémique en annonçant la semaine dernière la vente de billets de train TER au tarif préférentiel de 5 euros l’aller-retour pour permettre à la population de se rendre à la manifestation.
Le préfet de région Stéphane Bouillon a annoncé qu’il avait demandé à ses services « d’effectuer un contrôle de la légalité de la mesure », sans toutefois engager de procédure en référé car « il n’y a pas d’atteinte aux libertés publiques ». La région a vocation « de se défendre », a souligné Philippe Richert. Mais « la collectivité ne finance pas la manifestation », a-t-il assuré. Le coût de la manifestation, estimé entre 20.000 et 30.000 euros, est pris en charge par une association, « L’Alsace unie », qui se veut « transcourant » et dont la création remonte au référendum de 2013. (AFP)