Exclusif. Depuis son arrivée à la tête de Sigfox il y a 8 mois, Jeremy Prince s’exprime pour la première fois dans un grand média. Pour France 3 Occitanie, il précise la stratégie du leader mondial des réseaux IoT basé à Labège aux portes de Toulouse.
Jérémy Prince, PDG de Sigfox depuis février 2021 © Sigfox
Chemise blanche sans cravate, un sourire omniprésent, la voix posée,… à 47 ans, Jeremy Prince est le successeur de l’emblématique Ludovic Le Moan, co-fondateur de Sigfox. Le passage de témoin avait provoqué un coup de tonnerre dans l’écosystème numérique toulousain en février 2021.
Après une année 2020 difficile pour la pépite de Labège, le nouveau CEO veut rassurer et préciser la stratégie de Sigfox. Entretien exclusif.
Qui est Jeremy Prince ?
Malgré ses origines anglaises, Jeremy Prince est un « Toulousain » qui revient sur les terres de son enfance. « Après avoir grandi à Corronsac (Haute-Garonne), je suis diplômé de Sciences Po Toulouse (..) puis d’un DEA de Droit International à Montpellier« .
« Je connais bien l’Occitanie mais avec un côté anglo-saxon » résume Jeremy Prince.
Après ses études, il multiplie les expériences professionnelles dans les secteurs du numérique et de la télévision, notamment chez Index Multimédia, M6 Web, C.Productions et Mikros.
En 2018, il fait la connaissance de Ludovic Le Moan. Ce dernier le recrute comme Chief Strategy Officer (CSO) et l’envoie en 2019 à Dallas superviser Sigfox aux Etats-Unis.
Comment s’est passé la transition avec Ludovic Le Moan ?
« Ca n’a pas été compliqué du tout. Pour être transparent, le jour où il m’a recruté (..) il m’a dit « de toute manière, à terme, j’ai initié le projet et c’est une société magnifique. Mais ça arrive à une étape où ce n’est plus moi (..) Je vais prendre du recul. C’est pourquoi, je veux faire rentrer de nouvelles personnes » raconte Jeremy Prince.
« En 2021, il y a eu un processus de recrutement. D’abord à l’externe puis à l’interne. J »étais le seul candidat en interne avec le soutien des managers » poursuit-il.
En 2020, Sigfox a lancé un plan sauvegarde de l’emploi. Est-il terminé ?
« Il est terminé » assure le nouveau patron de Sigfox. « Ca a été une phase compliquée. Il fallait se réorganiser. La Covid a eu un impact sur le court terme ».
« Le PSE est terminé. Il a concerné 45 salariés dont 25 départs volontaires » détaille Jeremy Prince.
Cependant la crise sanitaire « a permis de voir l’intérêt de l’IoT » estime-t-il. Exemple « avec la mesure de qualité de l’air ou la télérelève (..). La Covid sera un accélérateur de l’IOT« .
© Sigfox
Comment se porte Sigfox aujourd’hui ?
« Sigfox se porte plutôt bien. On a traversé, comme tout le monde, la Covid (..) avec une activité économique réduite, un télétravail où on ne se voyait pas,.. »
« Effectivement, on n’a pas fait d’interview. On est resté discret quelques mois car on a décidé de se recentrer sur soi. Toute l’équipe a pris le temps de réfléchir cinq minutes pour savoir ce qu’on fait, où on va. Sigfox ne change pas de direction. Sigfox continue de tracer sa route » poursuit Jeremy Prince.
« Sur les six derniers mois, on a ouvert notre réseau sur l’Inde, soit 75 pays. (..) A l’exception de la Chine, on couvre les pays les plus importants au niveau économique mondial » se félicite le nouveau patron.
Sigfox a vendu son réseau allemand. Qu’en est-il pour la France et les Etats-Unis ?
Depuis le début, Sigfox passe par des opérateurs locaux pour déployer sa technologie à l’exception de trois pays : la France, les Etats-Unis et l’Allemagne.
« Pour des raisons de timing, on n’a pas voulu passer par le process de Sigfox opérator, on a alors décidé de commencer tout seul pour ensuite revenir à notre stratégie de départ » explique Jeremy Prince.
Sur la vente des réseaux Sigfox : « Ce n’est pas un changement de stratégie » martèle le dirigeant.
« Aujourd’hui, le marché décolle. On veut que chacun se concentre sur sa mission principale. C’est pourquoi on a vendu le réseau allemand. On a projet de faire de même aux Etats-Unis et en France« .
Ce dossier, Jeremy Prince le connait bien car il est en charge de ces réseaux propriétaires depuis trois ans. La procédure de vente est en cours.
© Sigfox
Quels sont les autres projets de Sigfox ?
« On a signé un contrat significatif dans le domaine du tracking pour connecter 1 million de palettes en Asie. Cela valide notre stratégie. Il y a une erreur que font souvent les gens, c’est de considérer l’IoT comme un seul marché. En réalité, l’IoT, ce sont différents segments avec des cas d’usages différents et des technologies différentes. Notre force a été d’identifier les segments où on a des avantages concurrentiels ».
« Sigfox, c’est avant tout le tracking et le monitoring » précise Jeremy Prince.
Par ailleurs, « notre axe est de continuer à développer la R&D sur les cinq prochaines années pour travailler sur des devices [dispositifs en Anglais] de moins en moins chers (..) L’objectif est d’arriver à l’ultra low-cost ».
Enfin, Sigfox veut limiter son impact environnemental. « C’est beau d’avoir des centaines de millions de devices mais il faut travailler sur cette dimension écologique. On est en phase de prise de conscience ».
Sigfox va-t-il rester à Labège ?
« Sigfox va rester à Labège » conclut Jeremy Prince.
Propos recueillis par Julien Leroy