16 Jan

L’urgence et la prudence : réactions aux mortalités dans le Dessoubre

Une truite malade du Dessoubre en janvier 2014.

Une truite malade du Dessoubre en janvier 2014.

La prudence semble être un mot clé pour les services de l’Etat.  Un peu moins d’une semaine après l’alerte lancée par Stéphane Regazzoni, la préfecture a réagi à cette nouvelle mortalité de truites et d’ombres dans le Dessoubre. Dès le lendemain, l’ONEMA était certes sur le terrain. Mais, pour réagir l’Etat prend son temps !

« Les premières observations effectuées sur le Dessoubre jeudi 9 et lundi 13 janvier révèlent la présence de 104 cadavres de poissons mycosés, en grande majorité des truites et quelques ombres. 
La situation est jugée suffisamment préoccupante pour que des observations complémentaires et les prélèvements pour analyse soient réalisés dans les prochaines semaines. Les nouvelles prospections permettront de voir si le phénomène continue et s’il s’amplifie ou non.Le Préfet du Doubs rappelle qu’en cas de découverte de mortalités par des tiers les services de l’ONEMA et de la DDT doivent immédiatement être prévenus. »

La situation est effectivement préoccupante. Et le décalage de perception du temps entre les services de l’Etat et les défenseurs des rivières prend d’autant plus d’ampleur. Le collectif SOS Loue et rivières comtoises estime, lui, que l’Etat cherche « à gagner du temps en espérant que la Nature réparerait seule les agressions humaines. » Depuis sa création en 2010, le collectif réclame des actions urgentes pour sauver les rivières.

« Bien sûr, on a nommé une commission scientifique qui a confirmé ce que tous ceux qui sont au chevet de nos rivières clament dans le désert depuis vingt ans. On a fait des réunions, nombreuses, nommé des comités théodules qui ont accouché de souris. On a dépensé plus d’argent en papier et en rapports divers qu’en actions concrètes contre la pollution.
Pendant ce temps-là, l’image de la Franche-Comté se ternit à longueur de forum sur internet, et beaucoup ne retiennent « d’originale » que l’ampleur de la dégradation de ses rivières emblématiques. » Collectif SOS Loue et rivières comtoises.

Et pourtant les services de l’Etat agissent… mais à leur rythme ! Pour l’instant, tout ce qui est entrepris sous l’égide de la Conférence départementale Loue et Rivière Comtoises ne rassure visiblement pas les amoureux des cours d’eau de notre région. Le conseil général du Doubs n’a pas souhaité communiquer officiellement à la suite de cette mortalité. La collectivité rappelle que ses services continuent de travailler à l’amélioration des rivières. A ce sujet, la préfecture précise que le 13 novembre dernier, des groupes de travail ont été constitués pour « mieux comprendre comment les pratiques agricoles impactent les transferts locaux d’azote et de phosphore et mieux comprendre les flux et dynamique de transfert de l’azote et du phosphore ». Des études, encore des études… déplorent les défenseurs des rivières, qui réclament une autre logique  :

« Quatre ans après la Loue, ce nouvel épisode concernant le Dessoubre montre que nos plus belles rivières meurent les unes après les autres et que « nous continuons à regarder ailleurs »…Sans une amélioration considérable de l’assainissement des eaux usées, un encadrement de l‘industrie du bois de la coupe à la scierie, l’interdiction de certaines pratiques dans les communes, une remise en cause complète des pratiques agricoles pour les rendre compatibles avec notre sous-sol karstique (et l’AOP Comté…), une vraie protection des zones humides,  une correction rapide des aménagements aberrants de nos rivières, elles sont condamnées à court terme. 
L’abstention et la fuite en avant  peuvent être un choix politique, il faut alors l’assumer, et accepter d’en être comptable devant les générations futures. »

Un groupe de travail de la  conférence départementale a été chargé d’améliorer le dialogue entre tous les acteurs. Signe de cette difficulté de compréhension. Avant que ces études, certes utiles, portent leurs fruits, il serait sans doute judicieux de commencer à agir. C’est ce que vient de demander Cedric Bobillier à son député UMP Marcel Bonnot et au préfet de Franche-Comté Stéphane Fratacci. Ce pêcheur du Dessoubre vient de leur adresser un courrier tellement il a été choqué par ce qu’il a vu ces derniers jours dans le Dessoubre.

« Il est donc Urgent de prendre ce problème au sérieux et ne pas croire, comme le prétendent certains, à un rapprochement avec la période de reproduction des truites. C’est d’ailleurs en raison de la non prise de responsabilité et de sérieux de cette affaire par certains de nos dirigeants que je vous écris aujourd’hui. Cette quantité de salmonidés morts est anormale ! Le Dessoubre est atteint, le Dessoubre est blessé ! « 

Une initiative encouragée par SOS Loue et rivières comtoises qui propose à ceux qui veulent voir la qualité des rivières s’améliorer réellement, d’écrire également aux maires des communes dont les stations d’épurations ne fonctionnent pas correctement. Le collectif l’a compris dès sa création. C’est la mobilisation des uns et des autres qui peut commencer à combler le fossé entre l’urgence et la prudence.

Isabelle Brunnarius
Isabelle.brunnarius@francetv.fr

Vous avez été plusieurs à réagir au précédent article du blog et je vous en remercie. Si vous voulez réagir à celui-ci, même système : envoyez-moi un mail en précisant qu’il s’agit d’un commentaire à publier ! Cette méthode artisanale semble plus accessible pour vous que le système proposé par le blog.

Réaction de la  CPEPESC, Commission de Protection des Eaux  (le 16 janvier 2014) : 

Le 27 août 2013, dans un article publié sur notre site  http://www.cpepesc.org et intitulé « Vallée du Dessoubre : Les égouts de Belleherbe font encore de la résistance ! » nous témoignions de l’inertie politique et administrative qu’il fallait remuer des années durant dans certains cas pour qu’enfin un rejet polluant soit complètement solutionné.

Si une station a enfin été construite à BELLEHERBE,  les écoulements couleur  purin ont continués!!  Que de réclamations et de menaces  ont a nouveau été nécessaires pour qu’enfin l’administration   fasse son travail, et mette enfin en demeure cette collectivité en mars 2013. On attend impatiemment les résultats au point de rejet !  Et ce n’est qu’un exemple,  car cela fait des décennies que la police de l’eau  n’est assurée qu’à dose homéopathique, sur les plateaux du Dessoubre, comme partout ailleurs.  On ne voit pas pourquoi cette rivière échapperait à la dramatique règle des mortalités piscicoles de nos rivières…  tant que l’on continuera avec les même méthodes constituant à ne pas combattre d’une façon offensive les pollutions à leurs sources sur le terrain.
– Ci-jointe une photo prise début janvier 2014, du rejet de Belleherbe … qui montre bien qu’il reste du travail à faire.

 CPEPESC : Station d'épuration dans la vallée du Dessoubre

– Également une autre photo récente d’un élevage dans la même commune  le long d’un route départementale…  Que fait la aussi la « police »?  Il s’agit des écoulements de purin chargés d’azote et de phosphore sur le sol karstique ou ils finissent par s’infiltrer pour rejoindre la vallée du Dessoubre.  Ces pratiques sont interdites…

CPEPESC : le purin de Bellherbe

 

Réaction de JF Bonvallot, défenseur de la basse vallée de la Loue ( le 16 janvier 2014):

Les désordres du Dessoubre étaient prévisibles et ils ont les mêmes causes multiples, synergiques, qui affectent la LOUE depuis des dizaines d’années.Tant qu’on éradiquera pas les micropolluants de plus en plus nombreux et diversifiés, organiques et médicamenteux des rivières, la situation ne fera que s’aggraver.L’Etat n’a pas la volonté de réagir, ni les moyens législatifs et encore moins de compétences. Il ne peut rien sauf faire croire à la population générale qu’il s’occupe du problème : ce qu’il réussit bien puisque personne ne critique sauf votre serviteur ! La qualité des eaux de nos rivières se dégrade puisqu’elles transportent de plus en plus de molécules diverses non touchées par l’épuration … Cela ne va pas s’arrêter par la volonté de la Vouivre … pas de lois, pas d’argent, pas de compétences : Loue et Dessoubre seront des victimes colatérales de la crise politique et économique que traverse notre pays.

 

 

 

Dessoubre : communiqué de presse de la préfecture du Doubs, page 1 by France 3 Franche-Comté

Dessoubre : communiqué de la préfecture du Doubs, page 2 by France 3 Franche-Comté

Dessoubre : communiqué SOS Loue et rivières comtoises by France 3 Franche-Comté