Axelle, 20 ans, vouée à la mobilité par sa licence « hôtellerie ». Quentin, 23 ans, jeune ingénieur au chômage et explorateur dans l’âme. Aristide, 30 ans, comptable de profession qui aspire à devenir boulanger. Franck, 40 ans, réalisateur de clips musicaux nourris de culture américaine. François et Claudine, 65 ans, rattrapés par l’ISF au seuil de leur retraite.
Comme eux, plusieurs centaines de candidats à l’expatriation se sont pressés aujourd’hui à la Maison Internationale de la Cité universitaire à Paris pour la 4è édition du salon « S’expatrier, mode d’emploi. » Sur place, un regroupement d’institutionnels, de la Maison des Français de l’Etranger, émanation du ministère, au Pôle Emploi et sa section internationale en passant pas la Caisse des Français de l’Etranger, les Notaires de France et Humanis, un groupe mutualiste. Tous des acteurs de la prévoyance. Des stands, mais aussi des conférences. « Trouver un emploi, prévoir son retour » aura fait salle comble deux fois dans la journée.
Ils sont porteurs d’un rêve ancien ou d’un projet déjà bien avancé, poussés par un désir d’ailleurs et de découverte ou à la recherche d’un nouveau départ, désireux d’échapper à la morosité ambiante, à la fiscalité ou à la fatalité du chômage. Portés par la vague d’expatriation qui s’amplifie depuis le début des années 2000 (+ 60% depuis l’an 2000), ils se verraient bien à l’étranger mais n’ont pas encore franchi le pas. L’expatriation n’est pas un acte anodin, tous ici ou presque en sont convaincus. L’aventure n’est pas une option.
Des projets plus ou moins aboutis
Dans un premier temps, Aristide, voulait se reconvertir en France. Comptable, il se verrait bien boulanger. En cours de négociation avec son entreprise pour un DIF ou un CIF, il s’est déjà renseigné auprès de la profession. « Trop de charges » lui a-t-on répondu. A 30 ans, ce camerounais d’origine vise désormais les Etats-Unis pour donner corps à son envie d’entreprendre. « Je suis ici pour connaître les erreurs qu’il ne faut pas faire ».
François et Claudine mûrissent leur projet depuis 5 ans. Ils veulent s’établir à Sainte Lucie, qui, outre le soleil, offre de menus avantages fiscaux. Pour avoir investi leurs économies dans la pierre, ils se sont retrouvés redevables de l’ISF. Mais François à un problème. Bien que retraité, il est gérant d’une petite société de transport. Peut-on continuer à gérer en vivant à l’étranger ? Faute d’une réponse précise, il est venu à la recherche d’un avis autorisé. Sa retraite dorée à portée de mains.
Franck écoute attentivement les conseils de l’expert de la MFE. Son idée, la création d’une entreprise aux Etats-Unis. « Un visa investisseur est une porte d’entrée plus facile » Problème, Franck, 40 ans et deux enfants, n’a pas le capital nécessaire. Réalisateur de clip musicaux, il dit souffrir « du piston à la Française, les bons plans vont toujours aux mêmes ». Le rêve américain qu’il cultive depuis l’enfance « la musique, le mode de vie, la mentalité » s’éloigne. C’était la première fois qu’il cherchait des réponses à ses aspirations.
Pour le « vieux » conseiller de la MFE qui répond de manière affable à tous, « les Français sont un peu des assistés, faudrait tout faire à leur place! » « Il est arrivé qu’un Français en difficulté à l’étranger nous interpelle violemment ‘ »à quoi vous servez ! » Avant de prendre conscience qu’il disposait d’une assurance rapatriement qu’il n’avait pas encore pensé à faire jouer ! »
« ici, c’est l’ancienne méthode »
« Globalement, il y a les explorateurs qui savent utiliser les réseaux sociaux, les familles qui ont besoin de construire leur projet et les « terre à terre », méticuleux qui ont besoin d’un contact humain et de papier ». Axelle, 20 ans, examine une nouvelle fois le questionnaire qu’elle fait remplir au milieu des stands. C’est dans le cadre de son mémoire « tutoré » qu’elle réalise une enquête sur l’expatriation des autres. Son expatriation a elle ne fait pas de doute. Elle a choisi sa licence pro « hôtellerie » pour ça, la mobilité induite. Les questions, elle se les est posées avant. « Ici, c’est l’ancienne méthode ! »
Et c’est vrai qu’à bien regarder autour de soi, on serait presque surpris de ne pas voir ces bataillons de jeunes diplômés dont les études nous répètent qu’ils sont de plus en plus nombreux à envisager de s’expatrier professionnellement.
Quentin, 23 ans ferait presque figure d’exception. Un premier stage à Dublin en cours de formation puis un stage cher Renault en Roumanie à la sortie de son école d’ingénieur de Rouen et une promesse d’embauche en Argentine, la voie semblait toute tracée. Las, suite à des coupes budgétaires, le constructeur est revenu sur sa parole. Inscrit à pôle emploi, « comme 1/3 de ma promo » avoue-t-il, Quentin n’a pas de véritables inquiétudes. L’inde, l’Indochine (sic) ou l’Amérique du sud, ce n’est que partie remise. Les pays émergents et sa soif de découverte d’autres cultures font toujours partie de ses projets à court terme. S’il est venu ici, c’est juste « pour prendre le temps de bien faire les choses et de poser des questions sur la Sécu ! »
Lien complémentaire : une équipe de France 3 île de France était présente ce matin. Reportage de Bruno Lopez/Colette Zagaroli