Génération Bretagne, sur France 3 Bretagne, s’est penché sur l’arrivée de la Ligne à Grande Vitesse et ses répercussions pour la région. Un débat à voir le vendredi 22 mai à 23h10. C’est l’occasion de se poser une (bonne) question, pour une fois: a-t-on finalement besoin d’aller vite?
Amateurs de vitesse et de records, ce billet n’est pas pour vous. Ou plutôt, si. Vous constaterez que la course contre le temps, symbole du progrès depuis la 1ère révolution industrielle, fait toujours figure d’étalon à l’heure de la transition numérique et énergétique. Oui, nous engloutissons quatre milliards pour gagner quelques 30 minutes, forcément précieuses, sur le trajet entre Paris et Brest. 1h10 entre Paris et Quimper. Comme si cela allait vraiment rapprocher la pointe de Bretagne de la capitale. Comme si ces 70 minutes signaient la défaite de la décentralisation, et faisaient reculer la perspective d’une économie en réseau, d’un maillage intelligent du territoire.
N’endossons pas plus avant la robe des avocats des anti-LGV, s’ils existent, ou des opposants à la ligne Lyon-Turin, qui eux existent bel et bien. Le rôle de ce débat organisé par France 3 Bretagne sera précisément de nous éclairer sur ce que ce temps gagné apportera (ou pas) à la région. La hausse du foncier, l’élargissement du bassin d’emploi, la revitalisation du centre-Bretagne, la fin de l’isolement de la pointe de Bretagne ? Il mettra également en lumière la crainte d’effets pervers, comme l’inégalité face à la mobilité (on mettra presque autant de temps pour faire paris-Rennes que Guingamp-Carhaix) ou le déséquilibre du territoire. Avec ce paradoxe: c’est plutôt vers la pointe de Bretagne que l’on trouvera le plus d’opposition à la LGV, qui atteindra Brest plutôt dans les années 20. Les chefs d’entreprises y voient plutôt le renforcement de l’axe Rennes-Nantes, plutôt que leur désenclavement.
Anachronisme
Vu de l’intérieur (du train), on peut toutefois se demander pour quoi aller si vite, puisque des rames équipées de connexions internet nous permettront de s’informer, de communiquer, de travailler? Cette recherche de vitesse paraît presque anachronique à l’heure de l’information en temps réel en mobilité. Nos ordinateurs portables fournissent largement nos besoins, en autonomie comme en puissance. Et puisque certaines rames sont équipées pour voyager en famille et même faire la fête, pourquoi d’autres ne pourraient-elles pas fournir un confort pour le travail en groupe, en respectant notamment des contraintes de confidentialité. les discussions professionnelles, dans le cadre plutôt informel du wagon-bar, sont familières aux chefs d’entreprises fréquentant le 6h45.
Si le temps est toujours de l’argent, aller moins vite nous permet d’en économiser
L’intérêt du co-voiturage n’est ainsi plus à démontrer, et la SNCF estime entre 7 et 10% le manque à gagner dû à l’autopartage. Un calcul rapide sur un trajet entre Rennes et Paris: on « perd » environ 50mn en co-voiturage, un tiers du temps de trajet en train environ, mais on économise 50% du prix du billet de train. Plus la distance sera longue, plus le temps « perdu » avec le co-voiturage sera important par rapport au trajet en train, et on économisera toujours à peu près la moitié du prix du billet de train. Même si la SNCF a réagit à l’effet de moins en moins marginal, avec les trains Ouigo et les ID TGV.
Autre mouvement intéressant à noter. Alors que la gare de Rennes se refait une beauté pour accueillir la LGV, un nouveau service de bus est mis en place dans la gare routière voisine. (Oui, les gares routières existent encore). La compagnie Starshipper rejoint Euroline en proposant, elle-aussi, des trajets Rennes-Paris à partir de 9 euros. Bien sûr, à ce prix là, il faudra compter entre 5h20 et 5h45 de temps de trajet pour rallier la capitale.
D’autres questions, vitales, restent encore à poser: est-ce que le temps de trajet entre Paris et Rennes permettra toujours de regarder un long-métrage, ou deux épisodes d’une série, ou faudra-t-il faire changer les formats audiovisuels d’usage 😉 ?