Le Rochelais Julien Dufresne-Lamy livre dans son nouveau roman, « Mon père, ma mère, mes tremblements de terre » (Belfond), le récit d’une métamorphose intime et familiale. Il est l’invité du journal de France 3 Poitou-Charentes, samedi 12 septembre à 19h.
Julien Dufresne-Lamy aime les références aux œuvres de la culture populaire. Dans son précédent roman, l’auteur originaire de La Rochelle, s’appropriait la culture drag new-yorkaise, le voguing, et ses personnages iconiques tels que Ru Paul et son show télévisé. Son nouveau livre, « Mon père, ma mère, mes tremblements de terre » (Belfond), à paraître le 20 août, se nourrit toujours autant de références à la culture pop. « Zombies », la chanson des Cranberries, se fait l’écho de personnages vivant à l’ombre d’eux-mêmes, dans la peur d’une guerre intérieure, tel le père du narrateur, et l’allusion à la formidable série télévisée américaine « Transparent » qui ouvre le roman l’inscrit dans un récit contemporain. Dans la série, un père de famille, universitaire sur le point de prendre sa retraite, annonce à ses enfants sa transsexualité : « Je veux être heureuse. Être heureuse encore deux petites heures » annonce l’épigraphe… « deux petites heures », avant les premières secousses sismiques prêtes à frapper la cellule familiale.
Dans cette nouvelle fiction, le Rochelais s’intéresse lui aussi à la transition d’un père de famille. Comme dans la série, il choisit un procédé où chaque personnage est amené à révéler ses séismes intimes. Si la cellule familiale est tout aussi dysfonctionnelle (et néanmoins aimante) que dans la série, l’auteur retient un autre point de vue, celui du fils, Charlie. Le jour de la vaginoplastie de son père, l’adolescent attend dans la salle d’attente avec sa mère et voit défiler ses souvenirs des deux années passées. Le lecteur se retrouve plonger avec lui dans son journal de bord tenu de l’annonce du père qu’il est en réalité femme – la déflagration, le premier tremblement de terre -, au jour de son opération de réassignation sexuelle, – sa naissance, en tant qu’Alice -.
La vaginoplastie n’est ni une mutilation ni un accident. C’est un voyage dans l’espace – Charlie, le narrateur du roman
Une métamorphose
Le roman adopte le ton oral et vif de l’adolescent et dit en toute simplicité ses bouleversements. D’une parole nombriliste, elle se mue progressivement en une parole plus mature. L’expérience de l’altérité bouleverse alors l’ordre de ce roman bouillonnant et donne toute sa force au récit de Charlie. « Ma mère était aussi secrète, aussi dissimulatrice que mon père », lance-t-il en guise de sentence à mi-chemin du roman. « Elle et lui, finalement, c’était un même combat. Un même magma. » L’adolescent prenant conscience du cheminement de chacun de ses parents, de leur individualité, de leur indéfectible amour et de leur place respective dans sa vie, rallie le camp de son père et se retrouve à veiller sur sa mère, soudainement secouée par ses propres séismes.
Comme le lecteur, le jeune narrateur commence à entrevoir ce qui se joue réellement sous ses yeux : « la vaginoplastie n’est ni une mutilation ni un accident. C’est un voyage dans l’espace », lance le jeune Charlie avec toute la candeur de son adolescence.
Si le sujet de la réassignation sexuelle a fait l’objet de nombreux articles de presse ou de témoignages dans des émissions de télévision, le récit romanesque de Julien Dufresne-Lamy lève un voile sur une métamorphose qui se révèle un pan souvent invisible de l’expérience humaine contemporaine, intime et audacieuse.
L’auteur est l’invité du journal régional Poitou-Charentes de France 3, samedi 12 septembre à 19h.
Rencontres en 2019 avec l’auteur (Blog) et dans le journal régional de France 3 Poitou-Charentes, à l’occasion de la parution de son précédents romans « Jolis, jolis monstres » (Belfond), Grand Prix des blogueurs 2019: