de Philippe Richel et Frédéric Rébéna
Personnage controversé et mystérieux, figure incontournable de la Cinquième République, Mitterrand n’en finit pas d’intriguer. Philippe Richelle nous propose de découvrir ses années de formation, entre 1935 et 1945 (entre ses 19 et 29 ans). Il sera notamment fait prisonnier pendant la guerre, s’évadera avant de s’impliquer pour l’aide à la réinsertion des prisonniers sous le régime de Vichy. Outre ses rapports avec des figures historiques telles que le maréchal Pétain, Laval ou Giraud, ce roman graphique donne à voir un leader et surtout un fin politicien en construction.
Les auteurs ont fait le choix d’éclairer une période peu connue de la vie de François Mitterrand, ses années de jeunesse. En 1935, étudiant en droit, il hésite à embrasser une carrière d’écrivain. Jeune bourgeois catholique fréquentant la haute société parisienne, il est proche de la droite antirépublicaine de l’époque. Pourtant, il n’est pas encore prêt à s’engager en politique et s’intéresse plus aux femmes et aux belles lettres.
Il se range aux côtés de Pétain en 1940. Il recevra même « la Francisque » au printemps 1943 qui lui est décernée par le maréchal Pétain. Cette récompense du régime de Vichy est « le symbole du sacrifice et du courage et fait référence à une France malheureuse renaissant de ses cendres ». Quelques années plus tard, ce passé trouble le rattrapera notamment avec le procès de son ami, René Bousquet, secrétaire général de la police française sous Vichy.
Pourtant, François Mitterrand basculera ensuite du côté de la Résistance. Il se défie alors du monde politique, qu’il méprise. Et c’est un personnage qui selon Philippe Richelle, le scénariste, « évolue et change d’avis ». De François Mitterrand, on a beaucoup écrit. Qualifié souvent de prince de l’ambiguïté ou de Machiavel, on observe ici un personnage en devenir.
Le récit est préçis et froid, presque clinique, à l’image de son protagoniste. Ce qui n’exclut pas un certain romanesque comme l’ont été les années de guerre pour ce futur Président. Le dessinateur Frédéric Rébéna affirme que « cette personnalité à multiples facettes est très difficile à cerner et donc à saisir par le dessin. » Et il est vrai que le trait de Rébéna n’est pas toujours identique comme si la figure de Mitterrand se dérobait au geste du crayonné.
L’album se finit de façon assez brutale à la fin de l’année 44. Un second album devrait suivre qui courra de l’immédiat après-guerre à la fin des années cinquante.
M.K.
Fiche technique
Scénario : Philippe Richelle
Dessin : Frédéric Rebena
Edition : Rue de Sèvres
152 pages