Tome 1 : Déluge de feu
De Laurent Astier
Colorado, juillet 1900.
Emily débarque à Silver Creek, une petite ville minière, pour se marier. Mais son futur époux vient de mourir. Fille d’une prostituée – le récit est construit avec des flash-backs qui racontent sa jeunesse – Emily, sans argent, se résout à pratiquer le métier de sa mère pour survivre. Quelques semaines plus tard, elle tue le candidat en campagne pour le poste de sénateur et s’enfuit. Dès lors, elle sera poursuivie par l’agence Pinkerton, et par la Cavalerie du fort le plus proche. Cet élément déclencheur et le jeu des flash-backs éclaireront peu à peu les motivations de l’héroïne.
C’est la vengeance d’Emily qui constitue le cœur du récit. Mais Laurent Astier aborde également la question indienne à travers l’occupation par l’armée des territoires ancestraux de ces populations autochtones comme pour faire un trait d’union entre tous les opprimés de la conquête de l’Ouest.
Ce western, sorti dans la foulée d’Undertaker, de L’homme qui n’aimait pas les armes à feu, ou de Stern, tire largement son épingle du jeu. Laurent Astier ne manque pas de rendre hommage à ses illustres prédécesseurs : Jean Giraud en tête, avec un hommage appuyé à Blueberry, ou encore les grands films du genre, La prisonnière du désert de John Ford… Résolument féministe, le personnage d’Emily a la trempe d’une Chihuahua Pearl (Jean Giraud encore).
Bien documentée, la bande dessinée reprend les grandes figures du genre : le saloon et ses entraineuses, la poursuite de l’héroïne, la traversée des territoires indiens, l’armée américaine et son sergent brutal et abruti… Quelques figures historiques croisent également le chemin d’Emily : la photographe Annette Rose Hume, les agents Pinkerton…
Le découpage se distingue par son aspect cinématographique. La composition est différente d’une planche à l’autre. Parfois, il s’agit d’une suite de gros plans ou de plans rapprochés, mais il y a aussi de grandes cases où les paysages prennent toute leur place. On imagine alors sans mal les plans séquences dans un format en cinémascope.
Ce premier opus, d’une série de cinq albums annoncés, peut sembler un peu touffu à la première lecture. Il pâtit de la mise en place d’une histoire complexe et dont on pressent les multiples rebondissements.
L’Ouest sauvage, territoire hostile par définition, est donc à nouveau le théâtre d’un grand règlement de comptes à travers le destin tragique d’Emily, comme on le comprend à la fin de ce premier album. A sa façon, cette héroïne participe à l’émancipation des femmes américaines de ce tout jeune XXème siècle en combattant l’archaïsme de certains de ses contemporains et leurs pulsions les plus meurtrières.
M. Krim
Fiche technique :
Scénario, Dessin et Couleur : Laurent Astier
66 pages / Edition : Rue de Sèvres