de Lucia Biagi
Sabrina est une jeune italienne de 26 ans au caractère bien trempé, elle vit chez ses parents dans une petite ville de province, mais passe le plus clair de son temps chez son petit ami, Stefano. Mal à l’aise dans son corps et dans sa vie, elle exprime parfois violemment son mal-être et se heurte à sa famille et à son entourage. Confrontée comme tous les Italiens de sa génération à une terrible crise économique, elle affronte également une crise existentielle. Au seuil de l’indépendance et du monde adulte, elle ne se sent pas en mesure de faire face à ces changements. Début décembre, une grossesse imprévue vient bouleverser sa vie déjà passablement mouvementée. Elle décide d’avorter mais le rendez-vous à la clinique est fixé au mois de janvier, du fait des fêtes de fin d’année…
L’italienne Lucia Biagi livre ici un récit tout en finesse. Loin de porter un quelconque jugement sur les contradictions de son héroïne, elle aborde le thème de l’avortement à travers un récit intimiste et nuancé. Perturbée -comment ne pas l’être quand un tel événement vous tombe dessus- Sabrina doit composer avec le chaos psychologique qui s’empare d’elle.
L’auteur choisit les tons jaunes et bleus –la bichromie- et un trait simple et direct pour transcender une histoire finalement assez banale. A la manière des mangas, les décors sont vite croqués et les personnages rapidement reconnaissables. Dans l’Italie d’aujourd’hui, et pour une génération touchée de plein fouet par le chômage et la précarité, Lucia Biagi aborde la problématique de son personnage sans tabou, en affirmant clairement la liberté du choix d’avorter, sans pour autant esquiver la difficulté de s’y confronter.
Lucia Biagi ausculte le parcours de Sabrina sans jamais prendre parti. Dans un entretien à Télérama paru le 2 juillet 2015, elle affirme que « l’avortement a souvent été abordé, en Italie, d’un point de vue politique ; je souhaitais, de mon côté, mettre en scène le choix d’une personne spécifique. Je n’ai pas voulu expliciter pourquoi Sabrina souhaite avorter de façon si déterminée, parce je pense que ce choix lui appartient, et qu’il ne doit en aucun cas être questionné. »
Deuxième opus d’une jeune auteur, c’est la chronique d’une jeunesse désenchantée qui ne croit plus aux grands idéaux mais qui tente malgré tout, jour après jour de gagner une liberté difficile à conquérir.
M.K.
Fiche technique
Scénario et dessin : Lucia Biagi
Editeur : Ça et là
160 pages