06 Sep

Patrick Codomier, de l’agence Vu, fait son marché à Visa

Patrick Codomier : "À 23 ans, certains font déjà un travail magnifique." (Crédit photo : Victor Guilloteau)

Patrick Codomier est occupé. Il parle au téléphone tout en nous faisant signe. Visa, c’est son rendez-vous, son marché. Il est directeur du service média de l’Agence Vu. « Je suis un intermédiaire entre les photographes et la presse », explique t-il avec sa gestuelle emportée.

Son travail, c’est également de participer au choix des photographes qui intègrent le pool. Ils sont une centaine à travailler pour cette agence créée en 1986 par Christian Caujolle. « Ce qu’on veut, c’est un regard, une écriture ». Parmi les centaines de candidatures qu’ils reçoivent, seules quelques-unes seront retenues : « Six dans les trois dernières années ». Les critères de sélection « ne sont pas économiques ». Ce qu’il faut avant tout, « c’est avoir du talent. » Continuer la lecture

Corentin Fohlen, jeune reporter de guerre

Corentin fohlen, jeune reporter de guerre.

Il ne fait pas son âge. A 30 ans, Corentin Fohlen court après la guerre depuis quelques années déjà. Révolte des chemises rouges en Thaïlande, révolutions arabes, Soudan du Sud, il est parvenu en quelques années à se faire une place de choix dans ce métier en couvrant les plus grands conflits.

Même s’il en vit pour l’instant « bien, voire très bien », il est lucide sur la précarité de la profession : « Je ne sais pas ce que je ferai dans vingt ans ».

Au-delà du témoignage journalistique, que recherche-t-il, lui qui « arrive à l’arrache, en improvisant » dans des zones où la misère et la violence règnent en maître ? « Une vie pas comme tout le monde. » Une manière pour lui de ressentir « les plus fortes émotions humaines possibles, parce que bizarrement, c’est lorsqu’ils n’ont rien que les gens sont les plus généreux ».

Mylène Jourdan

« Défense d’afficher » : le webdocu à tout prix

François Le Gall et Jeanne Thibord ont remporté le prix France 24 - RFI pour leur webdocumentaire "Défense d'afficher", co-réalisé avec Sidonie Garnier. (Crédit photo : Camille Peter)

Depuis quatre ans, le webdocumentaire a sa place aux côtés des expositions photos de Visa pour l’image. A son apparition, les photojournalistes y ont vu une opportunité de diversifier leur activité et de mieux financer leurs reportages. Si aujourd’hui, son économie reste incertaine, cette nouvelle forme de journalisme ne cesse de se développer et d’explorer des narrations singulières.

Cette année, le webdocumentaire « Défense d’afficher » réalisé par Jeanne Thibord, Sidonie Garnier et François Le Gall remporte le prix France 24-RFI, décerné à Visa pour l’image. Ce récit multimédia explore la culture du graff dans huit villes du monde. A chaque lieu, sa problématique : la condition des femmes à Bogota, l’omniprésence de la publicité à Paris, la crise économique à Athènes… Avec le street art en fil rouge du récit. Continuer la lecture

Johann Rousselot : « Photoshop, tout dépend de l’utilisation qu’on en fait »

Johann Rousselot : "Le graphisme est là pour augmenter le sens de l’image, pour apporter plus d’informations." (Crédit photo : Romain Dimo)

Du Photoshop dans ses images, des montages à la limite de la création artistique, Johann Rousselot bouscule les codes du photojournalisme. Dans le chœur du Couvent des Minimes, le photographe belge rend hommage aux acteurs du Printemps arabe à travers des portraits graphiquement chargés des signes de leurs colères.

Vous avez couvert les événements du Printemps arabe en réalisant une série singulière de portraits de militants. Pourquoi avez-vous fait ce choix ?

En janvier 2011, lorsque j’ai lu dans la presse ce qu’il se passait en Tunisie, j’ai eu la chair de poule. J’ai été extrêmement touché et je me suis dis que cette révolution avait l’air magnifique, que je ne pouvais pas la rater. Avant de partir, j’ai pris du recul et j’ai réfléchis à la manière dont j’allais aborder cet événement.

Ce qui m’intéressait dans la révolution tunisienne, c’était le rôle d’internet et des réseaux sociaux, ces nouveaux médias de la liberté. Surtout dans les pays arabes où tout est verrouillé. La photo est un médium un peu compliqué pour traiter ce phénomène. Je savais que j’allais avoir du mal à trouver des « gars » devant leurs ordinateurs. J’ai donc pensé à un travail un peu plus conceptuel, presque artistique. Continuer la lecture

05 Sep

Tous photographes …

Ils arpentent les allées des expositions, un appareil photo sur le ventre. Parfois, ils prennent en photo la photo. Pourtant, pas de petit collier rouge autour du cou, donc pas d’accréditation. Galerie de photographes amateurs qui visitent Visa pour l’image armés de leur Canon, Nikon et autres.

Bernard et Danielle Belisme, retraité de la fonction publique
D’Yseure dans l’Allier

A peine entré dans la chapelle du Tiers-Ordre, que déjà Bernard dégaine son appareil. « Je suis photographe amateur depuis la nuit des temps ! J’anime un club photo. Je fais des reportages, je me fixe un sujet, puis je travaille autour. C’est la première fois que nous venons, pour des raisons de calendrier. Je prends des photos du festival pour les monter au club, et donner envie aux membres de venir. Mais je ne prends pas en photo les photos, ce serait ridicule ! »

Bernard participe à des concours, a exposé à Nevers pour le Mois de l’Image, et expose parfois dans les maisons de retraite.

Danielle, sa femme, porte elle aussi fièrement un reflex. « Je suis plus dans la matière, des images plus graphiques. »

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Pour le malheur et pour le pire

Maya (8 ans) et Kishore (11 ans) posent pour leur photo de mariage dans leur nouvel intérieur. (Crédit photo : Stephanie Sinclair / VII pour National Geographic Magazine)

Afghanistan : Mohammed (45 ans) et ses deux femmes, Majabin (13 ans) et Zalayha (29 ans). Majabin a été donnée à un paysan de la région pour régler une dette de jeu après une partie de cartes. « Je ne cautionne pas ça », s’emporte Marie, 70 ans, venue de Marseille et mère d’une fille. « Je ne conçois pas que l’on puisse vendre son enfant… ».

Stephanie Sinclair expose au Couvent des Minimes « Ces petites filles que l’on marie ». Un photoreportage à la fois « bouleversant et révoltant », selon le jeune Florian (23 ans), venu de Marseille. Ce travail de huit ans vaut à la photojournaliste américaine d’être nominée pour le Visa d’or. Continuer la lecture

Ilvy Njiokiktjien : la décoloration du pays arc-en-ciel

En Afrique du Sud, la séparation entre les jeunes de la "génération libre", qui n'ont pourtant pas connu l'apartheid, existe toujours. (Crédit photo : Ilvy Njiokiktjien)

Une paire de bottes piétine le drapeau arc-en-ciel de l’Afrique du Sud. Puis une autre. Et une autre encore. Dans un camp d’entraînement low-cost dirigé par l’auto-proclamé colonel Franz Jooste, une poignée d’adolescents blancs sud-africains montrent ainsi « tout leur dégoût » pour ce symbole. Le rejet d’une nation sud-africaine unie et la nostalgie de l’apartheid chez certains Afrikaners sont les thèmes d’un webdocumentaire et de l’exposition de la photographe néerlandaise Ilvy Njiokiktjien, au couvent des Minimes.

Des méthodes d’endoctrinement inspirées par les régimes fascistes

« En 2010, un des plus gros leaders de l’extrême droite, Eugène Terre’Blanche, a été assassiné, et c’est là que j’ai commencé mon travail sur les Afrikaners », explique-t-elle. « Durant les funérailles, il y avait un homme vêtu d’un ancien uniforme de l’apartheid ». Cet homme, c’est Franz Jooste, le président du groupe d’extrême-droite Kommandokorps. Continuer la lecture

Sebastian Liste : le temps de l’immersion

Dans cette usine, Sebastian Liste a pu saisi des instants très intimes. (Crédit photo : Sebastian Liste)

Sebastian Liste a passé deux ans dans une usine désaffectée du Brésil, peuplée d’exclus. Un travail singulier : le photographe observe cette étrange communauté avec le regard d’un sociologue. Cette exposition lui a valu le Prix Rémi Ochlik de la ville de Perpignan 2012.

Un homme et une femme font l’amour sur un canapé défoncé. Le photographe Sebastian Liste est dans l’intimité des habitants de cette chocolaterie désaffectée de Salvador de Bahia au Brésil. Une des photo de l’exposition Urban Quilombo,  Prix Rémi Ochlik de la ville de Perpignan 2012. Continuer la lecture

A l’hôtel Pams, « les visiteurs se prennent pour des VIP »

Véronique est bénévole à Visa pour la première fois, elle accueille des visiteurs en extase à l’hôtel Pams. (Crédit photo : Giulia de Meulemeester)

Entre les confessions des visiteurs et ce qu’ils entendent depuis leur chaise, les « tee-shirts rouges », bénévoles à Visa, ont des choses à raconter.

A l’hôtel Pams, les bénévoles sont unanimes, le lieu provoque l’admiration des visiteurs. « Les gens sont fiers de pouvoir entrer dans cet hôtel particulier, ils se prennent pour des VIP ». Lucie lustre son col du dos de la main. Bénévole à Visa depuis quatre ans, elle explique que ce n’est que depuis Visa 2011 que le lieu est ouvert aux visiteurs. « Ils sont tellement contents de retrouver un lieu familier. Les Perpignanais surtout. Avant, c’était une bibliothèque et puis ça a fermé pour se transformer en locaux privés ». Visa en a fait pendant plusieurs années le QG des photojournalistes et des acteurs du festival. Aujourd’hui, ils sont installés au Palais des congrès, plus vaste, plus moderne. « Du coup, on a aussi des photoreporters déçus, ils viennent bouder en disant qu’ils préféraient cet endroit », sourit Lucie.

Il semblerait que les lieux d’exposition soient aussi importants que l’exposition. Contrairement à l’hôtel Pams, l’état du couvent Sainte Claire,  l’ancienne prison, dérange les visiteurs. Continuer la lecture

Corinne Duchemin, libraire au coeur de Visa

Après défection de la Fnac, Corinne Duchemin a repris la librairie de Visa pour l'image en tant qu'indépendante.

Avec Visa pour l’image, le bâtiment de la Poudrière, derrière l’église des dominicains, reprend vie. Pendant deux semaines, la librairie éphémère de Corinne Duchemin s’y installe et devient le lieu où trouver les meilleurs livres de photographies. C’est aussi le rendez-vous des photographes venus dédicacer leurs ouvrages.  « La photo, au départ, c’était pas mon truc », avoue la responsable de la librairie de Visa. Ça l’est devenu, « son truc ».

Corinne Duchemin a même permis à la librairie de survivre en la reprenant à la Fnac. « J’y étais salariée. Pendant sept ans je me suis occupée de la librairie de Visa pour l’Image avec eux. Mais depuis les choses ont changé. Le nouveau directeur ne voulait pas s’embêter avec un festival “local”. J’ai quand même 7000 livres ici! » Continuer la lecture