Dans la vallée de la Loue, janvier est le mois des traditions. La fête des failles de Mouthier Haute-Pierre et la Saint-Vernier dans l’un des villages de la vallée ont lieu à une semaine d’intervalle. Ces deux fêtes existent depuis la nuit des temps et au XXe siècle, elles sont revenues au goût du jour. Ont-elles encore un avenir ?
Par une journée ensoleillée et une nuit givrée, mon confrère Denis Colle et moi, nous avons rencontré ceux qui savent encore fabriquer et tourner les failles. Le samedi 18 janvier, ils nous avaient donné rendez-vous à la cabane des chasseurs. Nous avons filmé le savoir-faire d’Henri Chopard et de Bernard Sancey. Ils savent choisir le bois : Un manche en tilleul parce qu’il se fend bien et des copeaux de frêne parce qu’ils brûlent bien. Ils utilisent un drôle d’étau fait maison : Assis, ils appuient avec leurs pieds pour serrer le bois.
PAS DE FAILLE, PAS DE FÊTE !
A leurs côtés, quelques rares enfants. Comment vont-ils transmettre cet artisanat de la faille ? Pas de faille, pas de fête ! C’est l’association locale des chasseurs qui a repris le flambeau de l’organisation de la fête des failles. Vont-ils parvenir à transmettre cette tradition ou faudra-t-il qu’ils s’associent à d’autres associations pour élargir leur cercle d’initiés à la fabrication des failles ?
Reportage avec Denis Colle et Amélie Goiffon. Avec Henri Chopard Guillou, Romuald Maugain, Maire de Mouthier Haute-Pierre (Sans Etiquette), Emily Vernoit, Guillou d’adoption.
Pour ne pas risquer de disparaître.. la fête de Mouthier Haute-Pierre s’ouvre au monde. Un feu d’artifice est offert juste avant l’embrasement du bûcher. Anachronisme ou friandise pour attirer les jeunes générations ? Nouvelles venues, les lanternes offrent aussi leurs magies à tous. Les Guilloux ( c’est le nom des habitants ) ont le sens de l’accueil. L’équipe municipale préfère jouer les iconoclastes en introduisant des touches contemporaines à la tradition plutôt que de risquer de faire disparaître cette fête ancestrale.
Dimanche 26 janvier à Montgesoye, c’est une autre fête bien connue qui va avoir lieu dans la vallée de la Loue : la Saint-Vernier. La tradition remonte au XVIe siècle. A cette époque, les vignes sont partout ! Claude-Antoine Beau, l’un des premiers professeurs de Gustave Courbe,t a représenté son élève en Saint-Vernier..Le tableau est exposé au musée Courbet d’Ornans.
La confrérie Saint-Vernier a été créée en 1583 à Ornans, dans « le but de venir en aide aux veuves et aux orphelins de ceux qui travaillaient la vigne. Aujourd’hui, la Saint Vernier célèbre une messe solennelle une fois par an en janvier, à la date de la Saint Vincent, tour à tour dans chaque village de la Vallée » explique le site du diocèse de Besançon. Il s’agit d’une fête « tournante », chaque année, c’est un village différent de la vallée de la Loue ( entre la source et Cléron) qui accueille la confrérie. Voici des images de cette fête tournées par France 3 en 1997.
Et si vous vous passionnez pour cette fête, un film sur la Saint-Vernier à Vuillafans est encore disponible sur Viméo. Une tradition qui avait failli disparaître. En 1979, au moment du renouveau de la vigne à Vuillafans grâce à l’association Ruranim, la fête a repris de la vigueur. Yves Messmer, féru d’histoire locale, a même participé à la création d’un répertoire de chansons typiques de la vallée pour la chorale Saint-Vernier.
DES CHANTS DE LA VALLEE
Aujourd’hui encore des messes font parties intégrantes des fêtes des failles ou de la Saint-Vernier. La chorale reprend ces chants populaires.
Vignes de ma vallée Au soleil de Septembre,
Vignes de ma vallée Venues du fond des âges,
Bercent la grappe d’ambre Quand s’achève l’été,
Ourlées de buis sauvages, Parfois de houx bronzés,
Ourlées de buis sauvages, parfois de houx bronzés
Mais, d’ici quelques années, qui connaîtra encore ces chants ? Chorale et confrérie sont animées par des personnes aux cheveux grisonnants. L’un des piliers de la confrérie, Alain Verdenet, le reconnaît, la fête de la Saint-Vernier s’étiole. Ce dimanche 26 janvier, une centaine de personnes devraient participer au défilé dans les rues de Montgesoye avant la messe. Un vin d’honneur et un repas sont prévus. Faut-il réinventer cette tradition au risque de trahir son cérémonial ? Est-ce le seul moyen d’assurer sa pérennité ? Faut-il faire vivre les traditions ? Ce sont les habitants de la vallée de la Loue qui ont les réponses.
Isabelle Brunnarius
Isabelle.brunnarius (a) francetv.fr