Il suffit parfois d’un brin de poésie pour que notre esprit s’ouvre à l’inconnu. C’est ce que j’ai appris lors de ma rencontre avec Jean-Philippe Paul. Journaliste pour la revue bimestrielle suisse La Salamandre, cet habitant de la vallée de la Loue parvient à nous faire prendre conscience des enjeux de la biodiversité en empruntant les chemins de l’émerveillement et de la contemplation.
Avec mes confrères Laurent Brocard et Vincent Granddemange nous l’avons rencontré dans son jardin. Au loin, nous entendons les remous de la Loue. Un pinson égaille l’atmosphère et la famille de Jean-Philippe Paul nous accueille à l’heure de la cueillette pour le dîner. Leur maison est en bout du village de Champagne-sur-Loue, le jardin est adossé à la forêt et un peu plus loin, il y a une pelouse sèche riche en biodiversité. Ce territoire fait partie d’une vaste zone Natura 2000. Parfois, un renard vient guetter les poules du jardin. Cette année, les moustiques ont déserté la terrasse. Jean-Phillipe avance une hypothèse séduisante. Une petite mare a été aménagée au fond du jardin. Les moustiques n’ont pas flairé le piège. Ils ont pondu allégrement leurs oeufs délaissant les nids improvisés autour de la maison. Et, les larves de lillebules se sont régalés : un festin d’oeufs de moustique sous leur nez ! Dans un jardin, tout est une question d’équilibre.
Un monde à part entière que Jean-Philippe Paul prend le temps d’explorer quotidiennement. Une curiosité et une fascination qu’il partage avec ses lecteurs. Sur le site internet de La Salamandre, il écrit la chronique « Mon voyage au jardin ». Des écrits courts, scientifiquement documentés et poétiques inspirés par ce qu’il découvre juste dans son jardin. Ses observations sont aussi relatées dans l’Agenda de la nature au jardin 2019. Et, dans le numéro estival de la Salamandre, Jean-Philippe Paul nous propose une « Nuit blanche pour un sphinx ». Un bel article né de sa fascination pour les papillons de nuit. En dix mois, le naturaliste a pu observé 380 espèces différentes de papillons de nuit uniquement dans son jardin ! Une fois photographiés, certains de ces papillons comme « l’énigmatique sphinx du peuplier » ont les honneurs du pinceau de l’aquarelliste.
Jean-Philippe Paul est de nature modeste. Il sait bien que tous ne partagent pas sa passion pour cet univers animal si proche de nous et si peu connu. Mais, en lisant ses articles, le néophyte perçoit l’importance de la biodiversité. Et des clés lui sont données pour la favoriser. Il ne suffit pas d’un arbre à papillons pour les attirer dans son jardin ! C’est un travail qui s’étale tout au long du fameux cycle de vie de ce petit animal. Avant de se ravir du spectacle des papillons, il faut penser à faciliter la vie des larves, des chenilles, des chrysalides ! Alimenter le garde-manger des insectes, préserver leur habitat, ne pas utiliser de phytosanitaires… Jean-Philippe Paul précise que « derrière cette fascination, il y a des enjeux qui nous concernent tous. Ces insectes sont nos éléphants, nos girafes et nos ours blancs. On ne les connaît même pas et on marche dessus » ! L’éphémère poésie des papillons de nuit peut aussi bien nous émerveiller que nous faire réfléchir à notre environnement.
Isabelle Brunnarius
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