Jeudi 21 avril 2016, 8h16, hôtel Prado Real, Soto Del Real, 46 km au nord-ouest de Madrid. 9°4, 897m d’altitude.
Un bijou d’hôtel surréaliste, tout y est : la fille de la patronne a un chien, une boule de poil blanc comme le pelage des toros d’Aurelio Hernando d’origine Veragua chez qui nous avons passé la journée en tournage. Le cabot, race caniche aboie très haut, t’as les tympans en usure. Ah, si j’avais récupéré mon escopette. Je récupère ma clef, chambre 221. La porte poussée, un mini-salon, un canapé, la télé en face, un frigo, un évier. Je cherche le lit. Montez quinze marches, largeur 70 cm et vous parvenez à l’étage où se trouve le « plume » et la salle de bain. Faut que je me renseigne sur le nom de l’architecte ubuesque qui a pondu ces piaules.
La salle de bain fait 2,68 mètres carrés. A droite, la douche, le lavabo au centre, sur la gauche le bidet puis le WC. Je m’y pose en me mettant de profil : le genou gauche bute contre un angle de mur carrelé, le droit contre un mini chauffage! Ce n’est pas au WC que j’en veux mais à ce fichu bidet qui ne sert plus à rien depuis le début du XXème siècle. Qu’un de nos romanciers puisse écrire un jour un livre au titre de « Du désuet des bidets dans la construction des auberges et hôtels de Castille ».
09h30. Au « p’tit Déj » Curro Diaz qui a dormi-là, revenant d’une tienta à Salamanque. Nous rejoignent Juan-Carlos Carreño, le mandataire des arènes de Céret, le banderillero Pablo Saugar « Pirri » et l’éleveur. Accolades toreras, départ à la finca.
Un énorme coup de cœur que cette propriété où rien n’a bougé depuis deux siècles. La placita est en pierre, les corrals itou et dans les corrals des burladeros formés de deux immenses blocs de granit à faire pâlir de jalousie tous les menhirs de Carnac. Un truc troglodyte. Bouleversant de beauté rustique. Rien à voir avec les fincas à la chaux de la Basse-Andalousie. Sur la remorque du tracteur nous filmons le lot de Céret. Huit toros blancs et deux noirs. Splendides, impressionnants de force et sérénité sauvage. Des toros de Lascaux.
Quatre vaches au tentadero, présence du jeune matador madrilène Gonzalez Caballero. Curro Diaz impérial.
15h00. On plie le matos, gamelle dans un resto de la cité, grande table de quinze, palabres taurines. On adore ces « after » de toreo. Au bout de la table, le ganadero Aurelio qui nous raconte que ses premières pesetas il les a gagné à l’âge de dix ans comme figurant dans un western spaghetti. La production avait demandé trois gosses montés sur des ânes pour traverser un rio. Aurelio et ses deux copains ont une nuit empruntés trois ânes à un voisin et les lui ont rendus le lendemain avant que le propriétaire n’aille porter plainte à la Guardia Civil.
20h48. Apéro-tapas dans la salle de restaurant de l’hôtel. J’apprends à l’équipe que Prince vient de mourir. Le caniche est sous la nappe du buffet. S’il bronche, mes bottes camperas vont s’en charger.
Macadam Toros, Zocato.