16 Oct

Les Français de France votent Obama mais les Français d’Amérique ?

88% de Français espèrent la victoire Obama et jusqu’à 70 % des électeurs Front National ! Vous avez sans doute lu ou entendu parler de cette enquête Harris interactive publiée par Marianne le 11 octobre dernier. Une confirmation. Déjà en juin dernier, un sondage du centre d’études américain Pew Research Center restitué par France-Amérique révélait que 92% des Français souhaitaient la réélection du président sortant.

Vu de loin (voir la MAJ en fin de billet), selon Harris, Barack Obama « est perçu comme  « plus ouvert, plus « cool », plus progressiste que son challenger. » Son bilan ou son projet comptent donc beaucoup moins que ces « valeurs » mises en avant  par 60% des Français interrogés. Mais in situ ? Il était  tentant de chercher à savoir ce que pouvaient en penser les Français d’Amérique ?

Des Français électeurs

On n’en a pas toujours conscience, mais de nombreux Français participeront au scrutin de novembre. Sur les 123 000 compatriotes inscrits au registre mondial aux USA (cf.billet précédent), près d’un sur deux est binational. Le site France Amérique (encore lui) est allé à la rencontre de quelques uns de ces électeurs franco-américains pour constater ce que l’on pouvait imaginer : les Français d’Amérique sont beaucoup plus partagés. Du 50/50, en l’occurrence et pour les besoins de la cause …éditoriale.

Les plus « américains » et les plus anciens d’entre-eux penchent naturellement pour le candidat républicain. Par conviction. Alain, 66 ans rééditera son vote pour la 6ème fois « Il est tout à fait ahurissant que la gauche s’arroge le droit de penser, d’agir, de philosopher au nom d’un peuple qu’elle considère totalement inapte à agir, et à penser  sans son aide. » Même crédo pour  Suzanne, 68 ans, membre du Tea Party : « voter pour le moindre mal, c’est pénible » mais « L’économie a été complètement détruite. Et l’on se dirige vers une omniprésence de l’État  contraire aux valeurs de l’Amérique ». Plus jeune, Annabelle, 40 ans, reproche au président sortant d’avoir « privilégié certaines réformes comme Obamacare, alors qu’il aurait dû se concentrer sur l’économie »

Réflexe opposé chez Bernard, 57 ans, qui n’a qu’une peur, que Mitt Romney, élu, abroge l’Obamacare : « Beaucoup de gens aux États-Unis sont ruinés parce qu’un membre de leur famille est tombé gravement malade. Je considère qu’à notre époque, un pays qui se dit civilisé devrait avoir au moins un système de retraite et une assurance médicale ». Pour Erwan, 32 ans et Madeleine 18 ans, ce sont les valeurs sociétales « droit des femmes et des homosexuels » pour elle et le choix d’« une société du partage » pour lui, qui motiveront leur premier vote « américain ».

des blogueurs chafouins

Du côté des simples observateurs, difficile de trouver des points de vue tranchés sur le casting de ces élections. Il est vrai que, jusqu’au premier débat de la campagne, la victoire annoncée de Barack Obama n’incitait pas à se livrer outre mesure. L’inversion des sondages en faveur de Mitt Romney les a interloqués. Et c’est peut-être entre les lignes de dépit devant la performance du favori que l’on peut discerner un certain tropisme en faveur de Barack Obama.

«  Tout à changé parce que Monsieur le Président se la joue blasé. » écrit le blogueur « Inside América«  de retour d’un séjour parisien où il avait assuré à ses amis qu’Obama allait s’imposer. « Le nez dans les chaussures pendant que l’autre lui matraque la tête. Infoutu d’articuler une réponse simple (un « même pas vrai » aurait suffit). Paralysé par son crayon à prendre des notes comme si ça faisait sérieux. Incapable de trouver la faille dans un énoncé de conneries. Grave, quoi. »


En titrant son billet, « Obama peut-il perdre cette élection ? », Marc Albert Cormier n’en pensait pas moins. Avant le premier débat. Installé au Canada, cet ex radical, en lice aux législatives de l’étranger aux côtés du gaulliste Gérard Michon, disposait de données solides. Mise à jour après mise à jour de ses évaluations (voir les commentaires), le doute s’est instillé dans l’esprit de ce fin connaisseur du système électoral américain. Système dont il détaille d’ailleurs utilement, le mécanisme.

Incrédulité enfin, teintée de fatalisme, de ce jeune français qui pour être installé en Californien ne renie pas ses penchants politiques. : « en tant que français de gauche (la vraie, pas celle d’Hollande), mon cœur balance évidemment plus pour Obama même si mon opinion n’a aucune importance vu que je ne peux pas voter. Mais pour être franc, je ne comprends même pas qu’on puisse voter républicain » .  » Une position tranchée, largement explicitée sur son blog « Ma vie à Los Angeles » , qui a le mérite de susciter un débat nourri et éloquent à la fin du billet.

Qu’ils soient sans illusion comme Balthazar « Évidemment qu’Obama doit être réélu, mais il n’est qu’un mensonge de plus.. » voire même  libéraux de conviction comme Pierre « Je suis entoure de gens plutôt intelligents et bien portants qui ne supportent pas Obama. Et ils ne sont pas spécialement rétrogrades ou puritains, je pense qu’on a du mal a comprendre l’idéologie US, en particulier l’opposition farouche de certains a l’intervention de l’état. »(..) »Tout ça étant dit, je suis plutôt de droite mais je pense aussi que je voterais Obama … », il semble bien que les jeunes Français d’Outre Atlantique qui s’intéressent à la vie publique aient un peu de mal avec le positionnement du Parti Républicain.

MAJ Attention aux erreurs de perspectives ! Interpellé par les sondages sur la popularité d’Obama en France et titillé par la lecture du billet ci-dessus, le blogueur « Inside América » a repris le clavier pour une analyse éclairante du décalage entre l’image de la politique américaine et la réalité de son action quotidienne. Selon lui, c’est le système électoral qui fausse la perspective en obligeant les candidats à faire campagne aux extrêmes : « C’est cette débauche de positions radicales que l’Amérique expose au monde. Notre œil de français s’en trouve effaré par trop de violence, trop d’argent, trop de peur, trop de faim. Et puis un président est élu. Et l’Amérique retrouve son bon sens, son pragmatisme « . CQFD