02 Sep

La leçon de photojournalisme d’Andres Kudacki

Le photojournaliste Andres Kudacki au palais des congrès mardi 1er septembre 2015, à l'occasion de Visa pour l'Image. © Camille Hispard.

Le photojournaliste Andres Kudacki au Palais des congrès, mardi 1er septembre 2015, à l’occasion de Visa pour l’Image. © Camille Hispard

Andres Kudacki a donné une leçon de photojournalisme à son public dans le cadre des rencontres de Visa pour l’image 2015, mardi matin, au Palais des congrès de Perpignan.

Ne pas aider, ne pas susciter de faux espoirs. Andres Kudacki met un point d’honneur à ne pas influencer les scènes qu’il photographie. « Je leur disais que mon objectif était de témoigner, d’être le plus invisible possible », explique-t-il aux festivaliers de Visa pour l’Image. Il parle là des Espagnols menacés ou victimes d’expulsions et d’expropriations qu’il a suivis, à Madrid, ces trois dernières années. Une manière de traiter la crise financière qui fait l’objet d’une série de photographies dont certaines sont exposées à Visa pour l’image cette année, à l’église des Dominicains.

« Je souhaitais parler de l’intimité de ces familles pour montrer leur attachement à leur maison et la gravité de la perte de leur logement », raconte-t-il. Le photojournaliste se trouve confronté à des situations de détresse, se refusant toujours d’intervenir. Car il tient à être « honnête et sincère» dans ses photographies, à être le plus crédible possible auprès du public « pour que la société puisse croire au travail que je réalise », explique-t-il.

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01 Sep

Jean-François Leroy : « La presse n’est plus le seul revenu des photojournalistes »

Jean-François Leroy, Directeur Général du festival Visa pour l'image © Jean-Louis Fernandez

Jean-François Leroy, Directeur Général du festival Visa pour l’image © Jean-Louis Fernandez

Années après années, Jean-François Leroy, le directeur fondateur du festival Visa pour l’image, ne perd pas de son franc-parler. Absence d’exposition du World Press Photo, arrivée du Centre de international de photojournalisme de Perpignan, il revient sur l’actualité chargée du festival.

Dans votre édito, vous dites que la nouvelle génération de photojournalistes doit trouver d’autres débouchés que la presse. Sans la presse, est-ce que l’intérêt du métier est le même ?

Jean-François Leroy : « Les photojournalistes sont confrontés à un relatif désintérêt de la presse. Tout le monde rêve évidemment d’une double page dans le New York Times ou dans Match. La presse reste la quête du Graal mais des journaux paient une demi-page entre 60€ et 80€. Il faut donc trouver d’autres moyens de vivre. »

Comment fait-on pour s’en sortir quand on est un jeune photojournaliste ? Internet ?

Jean-François Leroy : « Il faut avoir un papa très riche… Sans blaguer, Internet ne génère pas de revenus. Il nous faudrait le Steve Jobs du photojournalisme. Il y a 15-20 ans tout le monde piratait sa musique. Il est arrivé avec son idée magnifique d’iTunes et, aujourd’hui, pirater n’a plus beaucoup d’intérêt. En photo, ça n’existe pas encore. Je crois que les jeunes photojournalistes ont compris que la presse ne serait plus leur seule source de revenus. Ils se tournent vers le corporate, l’institutionnel et l’humanitaire. Pour les aider, à Visa, on a créé des prix. Nous distribuons plus de 133 000€ de prix cette année. »

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Instagram prend du poids dans le photojournalisme

Le compte Instagram du photojournazliste canadien Marcus Bleasdale est suivi par 119.000 internautes.

Le compte Instagram du photojournaliste canadien Marcus Bleasdale est suivi par 119 000 internautes. © Dimitri L’Hours

Avec 300 millions d’utilisateurs et 20 milliards de photos partagées pour la seule année 2014, le réseau social Instagram est aujourd’hui incontournable. A tel point que les photojournalistes s’en emparent eux aussi, même si cela ne leur rapporte rien directement. Pour l’instant au moins.  

Non, Instagram ne sert pas seulement à poster des photos de lolcats, de doigts de pied en éventail au bord de la mer ou de selfies. Les photojournalistes se prennent eux aussi au jeu. Sur les 26 photographes exposés au festival Visa pour l’Image à Perpignan, quatorze font preuve d’une activité régulière sur ce réseau social de partage d’images.

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Pourquoi ils photographient les photos ?

De nombreux visiteurs photographient les travaux des professionnels exposés.

De nombreux visiteurs photographient les travaux des professionnels exposés, en guise de souvenir du festival. Ici au couvent des minimes, lors de l’édition 2015. Crédit photo : Gwenaëlle GERNIOUX

Beaucoup de festivaliers arpentent les expositions de Visa, smartphone à la main ou appareil photo en bandoulière. Ils s’arrêtent parfois, prennent un ou deux pas de recul, et immortalisent un cliché exposé. Des images qui les touchent, les inspirent. Mais qu’en font-ils ensuite ? 

Il y a ceux qui la jouent furtif. Ils déclenchent rapidement l’appareil photo de leur smartphone et le rangent dans leur poche. Et il y a les autres, qui prennent le temps de chercher le meilleur angle, la meilleure lumière, boitier numérique dans les mains. Dans le dédale de Visa, un nombre important de visiteurs se mue en photographe. Pour capter les lieux accueillant le festival, mais surtout les travaux exposés par les professionnels. « J’en prends quelques-unes pour les garder, en guise de souvenir, justifie Denise, une sexagénaire habituée des lieux. Mais je ne partage rien sur mon compte Facebook et j’efface les photos de mon téléphone au bout d’un certain temps. »

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Ce que deviennent les photos après Visa

Que deviennent les photos après le festival ? Photo T.C

Une des salles d’exposition du festival Visa pour l’image 2015, dans le couvent des Minimes. Photo T.C.

Les visiteurs les admirent, les scrutent, les décortiquent. Pendant deux semaines, les clichés des photojournalistes sont les stars du festival Visa pour l’image. L’heure de gloire avant les oubliettes ?

A la fin du festival, une fois que les photographies exposées retournent dans l’ombre, que deviennent-elles ? Les photographes, propriétaires de leurs fichiers, repartent tout simplement de Perpignan leur série sous le bras. « Je vais récupérer gratuitement les tirages après le festival », se satisfait Adrienne Surprenant, qui compte bien exposer sa série au Canada, chez elle. « On envoie aux photojournalistes les tirages deux semaines après la fin du festival. Ils en font ce qu’ils en veulent. Ils les exposent, les vendent, les déchirent », complète Jean-François Leroy, directeur général de Visa. Les doubles numériques, eux, sont conservés.

Pour la 27e édition du festival, plusieurs laboratoires ont tiré près de 1 500 photographies. L’entreprise Dupon Images est une habituée : cela fait vingt-six ans qu’elle travaille en partenariat avec Visa. Cette année, elle a imprimé une dizaine d’expositions. Si elle n’est pas supposée conserver les clichés envoyés par l’équipe de Jean-François Leroy, Dupon Images en garde certaines : « On est obligé d’en sélectionner. Tout ce qui est culturel ou historique, on conserve, au cas où… Avant, on devait rendre les négatifs, mais on les scannait », affirme Jean-François Camp, le PDG. L’entreprise organisatrice de Visa, Images évidence, conserve également les photos. « De quel droit, s’étonne un photographe français qui travaille en Argentine. S’ils le font, ils doivent nous en parler, nous payer, sauf si nous signons un contrat qui stipule qu’ils peuvent utiliser nos photos gracieusement. » La loi de 1997 sur la propriété intellectuelle autorise la conservation privée des photos, sans utilisation publique. « On sait que les clichés ne nous appartiennent pas », se presse d’ajouter Jean-François Camp.

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“De Hara-Kiri à Charlie” : Xavier Lambours, une référence de l’irrévérence

Comment prendre une photo irrévérencieuse de Lambours ? « Tu te démerdes », répond-il, avant de se mettre en scène, mimant un de ses clichés. © Justin Mourez

Comment prendre une photo irrévérencieuse de Lambours ? « Tu te démerdes », répond-il, avant de se mettre en scène, mimant un de ses clichés. © Justin Mourez

Heureusement que Photoshop existe ! Sans le logiciel de retouches qui hérisse les poils de certains, nous – simples spectateurs – n’aurions jamais pu découvrir un cliché d’exception.

En 1981, Xavier Lambours, photographe, fait partie de la rédaction du journal satirique Hara-Kiri. Un mardi soir, après le bouclage, il se retrouve avec le Professeur Choron, co-fondateur du journal, au restaurant le Dodin Bouffant, à Paris. « C’était notre cantine. » François Mitterrand, alors en campagne présidentielle, dîne derrière eux. Le Professeur Choron se met à chanter à tue-tête. De la pure provocation, le style Hara-Kiri, quoi. « J’ai juste eu le temps de prendre mon appareil. J’ai fait une photo à hauteur de la ceinture, sans viser. Je me mordais la lèvre pour ne pas me marrer. »

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« Ce n’est même plus de la tristesse, c’est de la douleur »

Carmen Martinez Ayuso (85 ans) s’est fait saisir son appartement lorsque son fils a perdu son emploi et qu’elle ne pouvait plus payer le prêt hypothécaire et les taux d’intérêt élevés. © Andres Kudacki / AP

Carmen Martinez Ayuso (85 ans) s’est fait saisir son appartement lorsque son fils a perdu son emploi et qu’elle ne pouvait plus payer le prêt hypothécaire et les taux d’intérêts élevés. © Andres Kudacki / AP

Contextualiser une photo sans sa légende. C’est le jeu auquel les festivaliers de Visa pour l’image se prêtent, chaque jour. Aujourd’hui, ils réagissent sur un cliché d’Andres Kudacki. Une scène qui illustre la crise du logement en Espagne.

Difficile de décrypter cette image qui incarne le désespoir. C’est ce que laisse entendre Göran Stenberg, photographe retraité. « Manifestement, ce cliché dégage une certaine peine. La scène pourrait se dérouler n’importe où en Europe », estime ce Suédois. Assis sur les marches de l’ancienne université de Perpignan, il procède par élimination. « Ce n’est pas en Suède, nous n’avons pas ce genre de vêtements. Peut-être en Roumanie ou en Grèce ».

À quelques pas de là, Véronique, festivalière venue de Périgueux, se laisse influencer par ce qu’elle appelle ses « origines » professionnelles. « C’est la maladie d’Alzheimer. Cette dame est perdue dans une maison de retraite ». Une situation que cette aide-soignante vit au quotidien.

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Ces hommes et femmes font tourner Visa

Ils et elles travaillent dans l’ombre de « Visa pour l’image » en tant que salariés. A l’accueil, à la technique, à la vente, dans les coulisses. Beaucoup sont de Perpignan, d’autres viennent de la capitale. Parmi ces « petites mains », on compte de nombreux habitués, fidèles au festival depuis plus de 20 ans. Tous ont l’impression de participer à l’un des plus grands évènements de photojournalisme du monde.

Réalisé par Caroline MALCZUK

Giulio Piscitelli : « Le passeur a violemment poussé des gens hors du bateau »

C’est l’histoire d’une photo prise sur la mer Méditerranée en avril 2011. Giulio Piscitelli embarque depuis la Tunisie en compagnie de 120 migrants venus de toute l’Afrique. Il paye la somme de 800 euros à un passeur, au port de Zarzis, pour monter sur un bateau surchargé. Les conditions à bord sont exécrables, le voyage dure plus d’une dizaine d’heures. La suite, le photographe italien nous la raconte.

Dimitri L’HOURS et Benjamin CHAUVIRE

31 Août

Le Centre de photojournalisme ose le don

Le Couvent des minimes accueillera une exposition permanente. © Mazen Saggar

Le couvent des Minimes accueillera une exposition permanente. © Mazen Saggar

On dit que les photojournalistes vont mal. Un Centre international devrait voir le jour à l’automne, à Perpignan. Un endroit pour les valoriser, mais sans les payer ?

La 27e édition du festival Visa pour l’image est l’occasion de remettre sur la table le projet de Centre international de photojournalisme. Censé conserver des documents photographiques, il devrait ouvrir ses portes à l’automne, au couvent des Minimes. Quelques détails restent encore à régler, comme l’acquisition des clichés exposés. « On veut constituer un fonds, une banque d’images », affirme Jean-François Camp, PDG du laboratoire Dupon, qui imprime une dizaine d’expositions cette année. Pour cela, il veut contacter les exposants des 27 éditions du festival. L’idée : que les photojournalistes « offrent deux ou trois photos, voire plus » qu’ils ont présentées à Visa.

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