01 Sep

« Ce n’est même plus de la tristesse, c’est de la douleur »

Carmen Martinez Ayuso (85 ans) s’est fait saisir son appartement lorsque son fils a perdu son emploi et qu’elle ne pouvait plus payer le prêt hypothécaire et les taux d’intérêt élevés. © Andres Kudacki / AP

Carmen Martinez Ayuso (85 ans) s’est fait saisir son appartement lorsque son fils a perdu son emploi et qu’elle ne pouvait plus payer le prêt hypothécaire et les taux d’intérêts élevés. © Andres Kudacki / AP

Contextualiser une photo sans sa légende. C’est le jeu auquel les festivaliers de Visa pour l’image se prêtent, chaque jour. Aujourd’hui, ils réagissent sur un cliché d’Andres Kudacki. Une scène qui illustre la crise du logement en Espagne.

Difficile de décrypter cette image qui incarne le désespoir. C’est ce que laisse entendre Göran Stenberg, photographe retraité. « Manifestement, ce cliché dégage une certaine peine. La scène pourrait se dérouler n’importe où en Europe », estime ce Suédois. Assis sur les marches de l’ancienne université de Perpignan, il procède par élimination. « Ce n’est pas en Suède, nous n’avons pas ce genre de vêtements. Peut-être en Roumanie ou en Grèce ».

À quelques pas de là, Véronique, festivalière venue de Périgueux, se laisse influencer par ce qu’elle appelle ses « origines » professionnelles. « C’est la maladie d’Alzheimer. Cette dame est perdue dans une maison de retraite ». Une situation que cette aide-soignante vit au quotidien.

« Elle part pour la dernière étape »

Dans la cour du Couvent des Minimes, Sophie, 45 ans, laisse d’abord la parole à sa fille. Elles viennent de Canohès. « C’est une dame dans un pays en guerre, comme la Syrie ou la Turquie. Elle pleure parce que sa famille est décédée. Ou parce qu’elle en a marre de la situation de son pays », tente d’abord Zoé, 11 ans. C’est finalement Sophie qui se rapproche le plus de la réalité. « Elle doit quitter sa maison parce qu’elle est trop âgée. Elle part pour la dernière étape ».

Dans ce cliché d’Andres Kudacki, une femme de 85 ans vient d’être expulsée alors qu’elle ne pouvait plus payer un prêt hypothécaire. Pascale, festivalière venue de Chambéry, a déjà vu cette photo. Qui l’a beaucoup marquée. « À la fin de sa vie, on devrait être tranquille. Ce n’est même plus de la tristesse, c’est de la douleur ».

CAMILLE VITTET