Le festival international de photojournalisme « Visa pour l’Image » s’est ouvert samedi, à Perpignan, avec en toile de fond de cette nouvelle édition, une inquiétude croissante pour une profession lourdement menacée par la crise et les conflits. Il se tient du 30 août au 14 septembre.
Actualité oblige, les sujets chauds de l’actualité donneront le ton avec cette année l’Ukraine, Gaza, la Syrie, l’Irak… mais le souvenir des nombreux journalistes qui ont perdu leur vie sur le terrain, dont 70 depuis 2014, devrait être omniprésent.
« Les journalistes n’ont pas d’armes et c’est pour cela qu’ils sont visés », s’est exclamé le directeur et fondateur de Visa pour l’Image, Jean-François Leroy en présentant cette semaine l’édition 2014 à Perpignan.
A cette occasion, il a rendu un hommage ému à James Foley, journaliste américain otage plus de deux ans puis égorgé courant août devant une caméra quelque part au Proche-Orient. Il a aussi évoqué le photographe américain Chris Hondros, tué en Libye en 2011, ou Anja Niedringhaus, photographe allemande abattue à Kaboul par un policier afghan en avril auxquels deux hommages posthumes seront rendus.
Sans oublier la jeune française Camille Lepage, tuée en Centrafrique le 12 mai dernier. Un prix Camille Lepage devrait bientôt être créé, a indiqué M. Leroy.
Crise du photojournalisme
Aux risques encourus par cette profession s’ajoute aujourd’hui la facilité avec laquelle des dizaines de photos sont produites et achetées pour des bouchées de pain. Ainsi le fondateur de Visa pour l’Image dénonce-t-il dans un éditorial présentant le programme du Festival, qui se tient du 30 août au 14 septembre, une pratique de plus en plus répandue : « le forfait ».
Il y décrit le désarroi d’un grand photographe qu’il ne nomme pas face au prix des photos d’aujourd’hui : 0,58 euro pour un cliché des printemps arabes ou 0,88 pour un autre sur la chute du mur de Berlin. « Mes photos valent moins (cher) qu’un préservatif », lui confie ce photographe, un poids lourd du métier avec plus de 30 ans d’expérience partout dans le monde.
Le président de l’Association Visa pour l’Image, Jean-Paul Griolet, appelle à l’aide le monde politique et financier. « Il faut agir vite pour sauver le photojournalisme » du seul profit financier actuel, dit-il.
Les photos d’amateurs sans effet sur les professionnels
Le photojournalisme, contrairement aux idées reçues, ne semble pas menacé par les photographes et vidéastes en herbe qui cherchent à vendre des documents exclusifs, souligne M. Leroy. Une exposition provisoirement intitulée « Amateurs on the spot » leur est d’ailleurs consacrée au 26e Visa pour l’Image.
Cette nouvelle édition présente aussi une relecture de la guerre du Vietnam avec des clichés de Ceux du Nord, ces photographes vietnamiens, Doan Công Tinh, Maï Nam ou Hua Kiem qui ont couvert le conflit sous les bombes des B52 américains.
Deux expositions, une de Pierre Terdjman et une de Michaël Zumstein, dépeignent les violences intercommunautaires en Centrafrique. Mary F. Calvert aborde les agressions sexuelles dans l’armée américaine et Olivier Laban-Mattéi l’exploitation intensive du sous-sol de Mongolie. Anne Rearick présente ses chroniques d’un township d’Afrique du Sud et Gaël Turine le mur de 3.200 km entre l’Inde et Bangladesh, inconnu du grand public.
Enfin, l’AFP est présente via une exposition collective sur le typhon Haiyan qui a frappé les Philippines en novembre 2013.
Une dizaine de prix (Visa d’or news, magazine, presse quotidienne…) et de bourses (Getty Images, Pierre et Alexandra Boulat…) seront décernés, pour un montant total d’environ 157 000 euros.
(Avec AFP)