27 Juin

Un ascenseur pour les poissons sur le Doubs franco-suisse !

L'ascenseur à poissons du barrage de Grosbois ( image EDF)

Ce n’est pas un poisson d’avril hors saison ! Les truites et les ombres du Doubs vont pouvoir prendre l’ascenseur pour remonter le Doubs franco-suisse. Par contre, pour le descendre, ils devront se débrouiller comme avant pour franchir l’imposant barrage de Grosbois avec ses 10 mètres de hauteur de chute.

Cette passe à poissons de luxe a été inaugurée aujourd’hui, près de saint Hippolyte, par EDF (l’exploitant de la centrale de Liebvillers) et l’Agence de l’eau ( le cofinanceur). La solution de l’ascenseur a été retenue car il n’y avait pas d’autres choix en raison du fort dénivelé.

Sept ans de réflexion…

Ces travaux étaient obligatoires. Dans le département du Doubs, quand un exploitant demande   à la préfecture le renouvellement de la concession pour produire de l’énergie hydroélectrique l’autorisation est soumise à conditions : il faut que l’exploitant assure la continuité écologique de la rivière c’est à dire que les poissons peuvent librement circuler. C’est très important pour leur reproduction.

En 2002, Michaël PROCHAZKA, le technicien ONEMA de l’époque écrivait que

«l’unité de production hydroélectrique de Liebvillers-Grosbois occasionne des impacts négatifs très importants au milieu aquatique en général et aux espèces piscicoles en particulier. La présence des installations (barrage, usine) modifie physiquement le cours d’eau avec les conséquences potentielles évoquées plus haut. Le barrage est un obstacle aux migrations biologiques des poissons dont on sait qu’elles sont un facteur essentiel à l’équilibre de toutes les espèces. Le fonctionnement des installations aggrave encore les impacts décrits par les modifications qu’il occasionne au régime des eaux.»

Il aura fallu sept ans de réflexion pour arriver à cette inauguration aujourd’hui. Les études techniques réalisées en concertation avec l’ONEMA et la fédération de pêche du Doubs ont pris du temps et les travaux ont duré plus d’un an.

«Le montant global de cet investissement est 2,5 millions d’euros avec un cofinancement de l’agence de l’eau de près de 1,9 millions d’euros. La construction de l’ascenseur à poissons représente un coût de 2,2 millions d’euros, et 350 000 euros ont été consacrés à la construction de la micro-turbine.» précise EDF.

Comment ça marche ?

«Une nasse capture en aval les poissons pour les remonter à l’aide d’un ascenseur automatisé à l’amont du barrage d’une hauteur de 11 mètres; explique EDF.  La montée de l’ascenseur s’effectue par cycles. Afin d’attirer les poissons vers cette nasse, un « débit d’attrait » de 750 litres/seconde est lâché au pied de l’ascenseur. Les poissons sont attirés par ce courant et pénètrent ainsi dans la nasse. Ce débit d’attrait de 750 litres/secondes est prélevé à l’amont de barrage. Il est turbiné au passage, avant d’alimenter l’ascenseur, par un microgroupe (turbine) de 65kW. » décrit EDF document à l’appui.


Obligation de résultat !

Des caméras ont  été installées pour vérifier que les poissons prennent bien l’ascenseur, elle permettra  également de les compter et de recenser les espèces. Est-ce que l’Apron du Doubs va s’aventurer jusque là ?  C’est la fédération de pêche du Doubs qui est chargée de ce suivi pendant un an. Le comptage n’a pas encore commencé. Edf devra montrer aux autorités compétentes que le système marche car il arrive que les passes à poissons soient boudées par leurs utilisateurs.

Edf a obtenu le renouvellement de sa concession en 2006 pour 40 ans. D’autres exigences environnementales ont été obtenues en particulier pour les débits réservés (débit minimum nécessaire à la vie aquatique, maintenu dans un cours d’eau équipé d’un barrage) .

Désormais, assure EDF «l’augmentation et la baisse des débits se font progressivement, en deux heures et demie, alors qu’il y a une dizaine d’années, la variation totale du débit était obtenue en moins d’une demi-heure». Ces débits réservés sont encore au coeur des relations délicates entre pêcheurs et exploitants.

Isabelle Brunnarius
isabelle.brunnarius@francetv.fr