10 Mar

Fukushima : être parti, être resté, y aller, en revenir…

Des expatriés vivaient au Japon, il y a un an. Avant la catastrophe, Mathieu Moindron se sentait plus dans la peau d’un émigré que d’un expat. « Installé avec ma femme (japonaise) à Sendaï, j’ai trouvé un travail, je me suis fait des amis, j’ai pu rencontrer la famille de mon épouse. J’étais bien, ma vie était là-bas. » Virage brutal, tête à queue.  Départ précipité pour un retour en France pourtant inenvisageable 3 jours plus tôt… « Sendaï compte plus d’un million d’habitants et n’est située qu’à une centaine de kilomètres de la centrale de Fukushima. Inconsciemment (..), j’ai songé à Tchernobyl. J’ai repensé aux images de ces enfants irradiés, des dégâts que provoquait ce mal invisible et des mensonges qui l’accompagnaient. J’ai regardé ma fille, âgée de quatre ans à peine et je n’ai plus songé qu’à une chose : rentrer. » La bonne décision affirme-t-il aujourd’hui au terme d’une (belle) réflexion sur ce qui s’est passé vraiment (à lire sur leplus.nouvelobs.com)

Marguerite et cet autre Français sont restés. Ils racontent les bouleversements de leur quotidien au Figaro. École de musique dévitalisée, vigilance permanente sur les aliments. La peur et le doute dans la vie de leurs hôtes Japonais. « un second accident » dit l’homme « signerait la fin du Japon moderne, la structure politique pourrait partir dans n’importe quelle direction…»

Immersions

L’impact de la catastrophe, c’est ce qui intrigue le plus l’artiste rémois, Brice Maire : « D’une manière générale, le nucléaire est révélateur de ce qu’est notre société moderne ; souvent, qu’il soit pour ou contre, le public est spolié du débat. » Plasticien, photographe,  déjà auteur de « Zone contaminée », un ensemble de travaux artistiques sur la catastrophe de Tchernobyl, Brice Maire a décidé de récidiver en partant s’immerger 15 jours à Fukushima. A suivre au jour le jour sur le blog  « road to Fukushima ».

Au cours de son périple, Brice Maire croisera  peut-être certaines de ces familles japonaises et expatriés déjà rencontrées par le documentariste belge Alain de Halleux. Lui aussi familier du questionnement sur le nucléaire, le réalisateur  a précédé  l’artiste sur les lieux de la catastrophe. Il en a tiré notamment une web série « récits de Fukushima », en cours de diffusion sur Arte dont voici la bande annonce

Le premier épisode nous emmène à la rencontre de David et Eiko Morel en proie à « la grande question » : rester ou partir. Le couple avait ouvert une crêperie bretonne à Tokyo, il y a 5 ans. L’incapacité des autorités japonaises à assurer la traçabilité des produits alimentaires a levé leurs derniers doutes. Un an après, les mêmes arguments, la même décision que Mathieu. L’avenir de leur petite fille sera probablement en France, loin de cet ennemi invisible que la culture japonaise, laissée à elle même,  préfère ne pas regarder en face.