05 Sep

Le marathon d’un jeune photographe à Visa

Tim Robinson montre son travail à l'agence Polaris. © Marie Collinet

Tim Robinson montre son travail à l’agence Polaris. © Marie Collinet

Les jeunes photographes sont nombreux à Visa. Ils sont là pour se faire connaître. Mais dans la foule, certains semblent perdus. Tim Robinson, un photographe encore amateur de 24 ans, s’est préparé pour être le plus efficace possible.

8h45 : Le réveil est difficile pour Tim Robinson. Après neuf mois de voyage entre le Pakistan, l’Inde, Londres, il est à Perpignan pour le festival Visa pour l’image. Une grande première pour ce jeune Australien de 25 ans. Il sait qu’il doit être en forme pour présenter ses deux grands projets photos aux agences. Il quitte son hôtel du centre-ville sans petit-déjeuner. L’endroit est un peu miteux, mais c’était le moins cher de la ville. 40 euros la nuit, tout de même.

9h45 : Sacoche d’ordinateur à la main, sac en bandoulière, le photographe en herbe enfile son badge d’accréditation (60 euros). Un peu hésitant, il se glisse dans la file d’attente en bas du palais des Congrès. Il veut être l’un des premiers à gravir les deux étages pour arriver devant le stand de Getty. Il espère pouvoir obtenir un rendez-vous. Avec ses tongs et son jean troué, le grand rouquin se la joue cool. Mais le stress monte. Il commence à transpirer. Le temps qu’il se rafraîchisse, les premières personnes sont déjà rentrées.

10h03 : Dans la salle des agences, au deuxième étage, une bonne dizaine de personnes attendent devant Tim face au stand de Getty. Quand son tour arrive, il n’y a déjà plus aucun créneau pour la journée. Le planning étant fait au jour le jour, on lui conseille de revenir demain encore plus tôt. Mais le bureau n’ouvre qu’à 10 heures, Tim ne voit pas comment il pourrait arriver plus tôt. Il reste courtois malgré l’absurdité de la réponse et la fatigue.

10h05 : Hier, l’étudiant avait réussi à prendre plusieurs rendez-vous pour aujourd’hui. Il se rend donc à une autre agence, Days Japan, à quelques mètres de Getty. Mais quelqu’un a pris sa place. Là encore, on lui conseille de revenir. Tim va prendre un café. Il s’assoit avec les nombreux autres photographes qui patientent entre deux rendez-vous. En attendant, il vérifie sa sélection de 65 photos sur son ordinateur.

10h30 : Tim a rendez-vous avec Polaris. Il présente ses deux projets, celui sur la vie quotidienne et celui sur la foi. La personne qui le reçoit le regarde, parle peu, lui demande d’aller plus vite. Le verdict tombe. « Il n’y a pas de continuité. C’est un lieu puis un autre, une chose puis une autre. Il n’y a pas de fil conducteur. Du coup, ça me déconcentre. Je ne peux pas te faire de remarque ». Le ton est sec, cassant. Tim encaisse. Le passionné rebondit et propose de lui montrer ses clichés sur la foi. Peu convaincue, elle lui donne des conseils pour trier ses photos et le questionne sur son avenir. Tim ne compte pas que sur la photo pour vivre. L’étudiant en histoire et en philosophie veut enseigner pour gagner de l’argent et en parallèle travailler sur de longs projets. « Donc vous ne voulez pas être photographe ? Ou si vous ne comptez pas gagner de l’argent, vous ne comptez pas être un des meilleurs ?» Silence.

L'agence Sipa donne des conseils à Tim pour améliorer son travail.

L’agence Sipa donne des conseils à Tim pour améliorer son travail. © Marie Collinet

11heures : Tim est un peu sonné. Il applique les conseils, trie ses photos, avant de retourner à Days Japan, mais cinq personnes sont déjà devant lui.

11h45 : Days Japan vient le chercher. Le professionnel regarde les photos de Tim sans rien dire. Puis lui demande : « Est-ce que vous pourriez-vous m’envoyer une vingtaine de photos sur la foi en couleur ? ». Bonne surprise pour Tim. Même s’il ne sait pas ce qu’il veut en faire.

11h50 : Tout sourire, Tim va à son rendez-vous avec Sipa. La responsable italienne est sans cesse dérangée. Elle s’intéresse enfin au travail de Tim. Elle lâche : « C’est trop ordinaire, tellement courant… ».

12h10 : Un petit tour dans la salle des agences et puis s’en va. Tim est satisfait de ses rendez-vous. En sortant du Palais des Congrès, il ouvre son ordinateur au milieu des vélos en location pour noter les conseils des professionnels. Le jeune sait qu’il est brouillon, qu’il doit se concentrer sur un sujet précis.

Avant de les oublier, Tim note les conseils de professionnels.

Avant de les oublier, Tim note les conseils de professionnels. © Marie Collinet

12h20 : Après avoir demandé plusieurs fois son chemin dans la rue, il arrive à la Chapelle du Tiers-Ordre. Pour cette première année, il a fait un tour dans les expositions pour aiguiser son regard, avant de rentrer à son hôtel pour manger.

16 heures : Tim n’a pas fini sa journée. Il participe à une rencontre avec les photographes de Getty. Le jeune idéaliste veut rencontrer le leader mondial de la photo qui propose 50 millions d’images pour une utilisation sur le web. Gratuitement.

Marie COLLINET