26 Jan

Et si on arrêtait de polluer les bébés ?

Qui voudrait faire du mal à Benjamin ,

 

Le titre est un peu provocateur, en général les parents font attention à leur progéniture.

Pourtant, on met régulièrement nos enfants en danger sans même le savoir. Cela commence par la toilette, et les produits qu’on utilise pour les badigeonner. Il y a aussi la lessive avec laquelle on lave le linge qu’ils portent sur eux 24 heures sur 24. Et puis il y a la peinture du lit à barreaux, qu’il a bien fallu rafraîchir parce qu’il a déjà servi aux cousins. Et même si le lit est neuf, le problème est généralement le même. Encore un exemple, pour la route ? Allez, vous avez pensé au traitement chimique anti-feu qui recouvre les peluches neuves ? Bon, ok, j’arrête là. Vous avez peur ? Et bien… il y a de quoi.

 

La faute aux perturbateurs

 

Beaucoup de produits contiennent des perturbateurs endocriniens. Qu’est-ce que c’est ? Voici la définition de l’OMS : « Un perturbateur endocrinien est une substance ou un mélange de substances qui altère les fonctions du système endocrinien et de ce fait induit des effets néfastes dans un organisme intact. »

Jean-Loup Bernard, le patron de Solibio, entreprise bio de Solignac en Haute-Vienne (que nous retrouverons tout à l’heure), explique plus simplement : « Ce sont des molécules que notre corps ne connaît pas et qu’on va détecter comme des hormones parasites. On va déclencher des réactions bizarres, parce qu’on n’a pas le patrimoine génétique pour résister à ça. »

 

Des normes encadrent aujourd’hui l’utilisation de ces produits dangereux. Par exemple, les biberons en plastique qui contiennent le fameux Bisphénol A sont interdits. Mais plusieurs associations voudraient aller plus loin, et pour cela, il reste du travail…

 

Des maternités en première ligne

 

Près de chez nous, des maternités se saisissent du sujet, souvent à l’initiative de soignants sensibilisés aux questions environnementales. Line Mullot, infirmière puéricultrice à la polyclinique de Limoges, explique clairement sa motivation : « Les bébés ont une peau très fine qui absorbe beaucoup plus que celle des adultes. Pourtant, on met beaucoup de produits sur leur peau : on a envie de les masser, on a envie de les laver, de leur mettre des crèmes, des choses comme ça. Et puis finalement, on fait plus de bêtises qu’autre chose. »

Dans son service, tous les produits contenant des perturbateurs endocriniens ont été bannis, en espérant que les parents resteront sur les mêmes rails.

 

La maternité de l’hôpital de Guéret se met aussi au vert. Par exemple, les produits utilisés sont le plus possible issus de la région, pour améliorer leur bilan carbone ; et on n’utilise plus de détergeant pour laver le sol. Selon Lise Retailleau, sage-femme, l’hôpital doit mieux jouer son rôle de prévention avec des conseils parfois très simple pour lutter contre les polluants, comme l’aération des maisons matin et soir : « Quand un nourrisson arrive dans une maison, on a envie qu’il soit pris en charge le mieux possible. C’est le moment où les parents sont le plus réceptifs pour changer les habitudes, pour eux et pour leur enfant. »

 

Simple et bio

 

Dans ces « éco-maternités », si les grandes marques qui utilisent des perturbateurs endocriniens disparaissent, de nouveaux produits sont utilisés. C’est le cas des produits de Solibio, dont nous avons parlé plus haut. L’entreprise fabrique du savon bio, de la lessive bio pour le linge, et du liniment oléo calcaire pour nettoyer les fesses des bébés. Elle travaille avec plusieurs maternités de Nouvelle Aquitaine. En ce moment, Jean-Loup Bernard a le sourire, parce-que son travail commence à séduire le monde médical : « On a deux maternités qui ont qualifié notre gel douche pour le lavage du cordon ombilical ! C’est super : on a fait un produit très simple, on a été très réglos dans la formule, et elles nous ont dit : « c’est exactement ce qu’on cherchait. Il n’y a pas d’effets secondaires. » »

 

Alors, à quand la fin des grandes boites roses pleines de publicités et de cadeaux pas très sains pour les bébés, qui sont encore souvent distribuées aux jeunes mamans ? Dans les éco-maternités que nous avons visitées, c’est déjà terminé. Reste à savoir si elles feront des émules…

 

P.S. : l’Agence Régionale de Santé (ARS) de Nouvelle Aquitaine a publié un guide intitulé « POLLUTION INTÉRIEURE : RISQUES SANITAIRES POUR LA FEMME ENCEINTE ET LE JEUNE ENFANT ». C’est effrayant, mais instructif…

Edit #2 : un inquiétant rapport consacré aux perturbateurs endocriniens a été publié par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) le vendredi 2 février 2018.