Par Laurent Lataste, journaliste à France 3 Aquitaine
Jean Lassalle est un spécialiste des coups d’éclat. Le dernier en date, il vient d’annoncer son intention de se mettre en congé du Modem, car il projette d’être candidat à l’élection présidentielle de 2017. A contre sens de son ami de 40 ans, François Bayrou, il défie même, depuis quelques jours, Alain Juppé. La vengeance est un plat qui se mange froid !
923 kilomètres séparent Lourdios-Ichère, le village au fin fond de la vallée d’Aspe dont Jean Lassalle est maire, de l’Elysée. Mais, il en faut plus pour l’effrayer. Depuis le début de la semaine, il le répète : « si le peuple est derrière moi, je serai candidat ». Une candidature atypique, pour ce fils de berger qui a été élu à toutes les fonctions politiques locales depuis 1977, date de son premier mandat de maire. Ce n’est pas un perdreau de l’année. A 60 ans, il a déjà 39 ans de carrière politique. Et il s’est battu pour cela. Lors des dernières élections législatives de 2012, il arrache la victoire de quelques voix, et il est l’un des deux seuls députés Modem à siéger à l’Assemblée nationale.
Jean Lassalle défend son territoire
Jean Lassalle se distingue pour la première fois en 2003, où on le voit entonner la chanson occitane « Si canti » sur les bancs de l’hémicycle pour protester contre la disparition d’une gendarmerie près du tunnel du Somport et plus généralement des services publics en zones rurales. Et encore en 2006, lorsqu’il entame une grève de la faim pour éviter que l’usine Toyal, située sur sa commune, ne soit délocalisée. La presse vient à sa rencontre et Jean Lassalle commence à être reconnu au-delà de ses chères Pyrénées. Une notoriété, qu’il met à profit en 2013, pour un tour de France. Huit mois de marche à travers l’hexagone pour recueillir les peurs et les doutes des Français qu’il consigne dans un livre intitulé « Les cahiers de l’espoir ». Une candidature à l’élection présidentielle serait donc une suite logique. Oui, il veut défendre les campagnes, les sans grade. Mais, Jean Lassalle a aussi des comptes à régler.
Règlement de comptes
En 2015, Jean Lassalle se met dans la tête d’être le candidat de la droite et du centre aux élections régionales en Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes. François Bayrou son ami de toujours, le laisse faire. Jusqu’à ce que le président du Modem s’entende avec Alain Juppé autour de la candidature de Virginie Calmels. Difficile à avaler pour le béarnais. Du coup, depuis lundi, le député Lassalle se lâche et « ne croit plus aux chances de François Bayrou pour une éventuelle candidature à la présidentielle » et encore moins en celles d’Alain Juppé, dont on ne retient selon lui que les millions de personnes descendues dans la rue en 1995 et la dissolution ratée de 1997 : « si ça, c’est un stratège, je peux largement concourir », assure t-il. François Bayrou et Alain Juppé lui ont volé sa candidature pour les régionales, il va être le grain de sable dans leur entente en vue de l’élection présidentielle.
Candidat, mais avec quels moyens ?
Il sera difficile, cependant, pour Jean Lassalle d’être vraiment candidat, sans soutien financier, sans parti, et sans moyen humain. Mais, il veut s’assurer que la démocratie fonctionne. Et, il pose la question : « après tout pourquoi un parlementaire ne pourrait pas être candidat à la magistrature suprême ? ». Il veut se servir des réseaux sociaux pour alimenter le débat. Il veut écouter, entendre le peuple de France et tenter de l’entraîner derrière lui. Le bataille semble pourtant perdue d’avance, mais il n’en a cure, il mènera son combat, les béarnais sont têtus. Et la tortue n’a-t-elle pas réussie à dépasser le lièvre ? L’élection présidentielle est devenue un moment de folie financière et de luttes à mort et la carrure de rugbyman de Jean Lassalle n’y suffira peut être pas. Même s’il peut compter sur son large parapluie de berger, les coups n’ont pas fini de pleuvoir.