Alain Rousset devant la presse, ce lundi 22 février
La nouvelle grande région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes vient de traverser sa première grande crise de croissance, deux mois tout juste après sa mise en place. Cette crise, d’abord financière, est finalement surtout politique et elle risque de marquer durablement le début du mandat d’Alain Rousset. Car, le président est resté seul à la manœuvre au cours de ces dernières 24 heures, et c’est donc lui qui va devoir assumer les conséquences de ce grand déballage comptable, qui provoque des tensions personnelles avec Jean-François Macaire et Ségolène Royal, qui nourrit l’antagonisme territorial entre l’Aquitaine et le Poitou-Charentes, les deux poids-lourds du nouveau territoire, et qui surtout offre à l’opposition des arguments pléthoriques sur son angle d’attaque favori, la mauvaise gestion des socialistes.
Alain Rousset avait beau dire, ce lundi soir, en conférence de presse que « nous ne sommes pas dans une série policière, mais dans un travail de rigueur budgétaire », il n’empêche, son coup d’éclat médiatique a provoqué un véritable psychodrame politique. Et même s’il reconnait « je suis peut être un peu excessif dans ma démarche, c’est ma façon de faire, ça secoue les élus de Poitou-Charentes, c’est humain », la question est posée de savoir, si Alain Rousset n’a pas surréagit, face à la découverte des déséquilibres financiers du Poitou-Charentes. S’agissant d’un partenaire aussi proche, son vice-président aux finances, ancien président de région et soutien inconditionnel pendant la campagne, la démarche la plus solidaire aurait pu consister en une conférence de presse commune, en ce jour de commission permanente, pour annoncer des difficultés passagères de comptabilité et un règlement rapide dans le cadre de l’harmonisation budgétaire. Tous les observateurs n’y auraient vu que du feu. Au lieu de cela, Jean-François Macaire se retrouve vice-président « sans délégation » et pour une durée indéterminée.
En choisissant une mise en cause, aussi brutale qu’inattendue, Alain Rousset a déclenché une crise à plusieurs niveaux. Il s’agit d’abord d’une crise personnelle, entre lui et Jean-François Macaire, et peut être au-délà, avec tous ses proches, élus du Poitou-Charentes, qui vont sans doute assez peu apprécier de voir leur chef de file, et ancien président, ainsi maltraité. Il s’agit aussi d’une crise interne au sein de la majorité socialiste, qui s’étale au grand jour, car il est très inhabituel de voir le président d’un exécutif porter lui même les coups contre son propre camp. La crise, et c’est surement, encore plus grave, est aussi territoriale, car le sentiment qui se dégage de cet affrontement, est que la grande et majestueuse Aquitaine, décidément exempte de tout reproche, s’érige en parangon de vertu financière, et distribue les bons et surtout les mauvais points à ses nouveaux vassaux. Il y a aussi, une crise politique d’ordre national, car deux ténors du Parti Socialiste, Alain Rousset et Ségolène Royal s’affrontent publiquement, la ministre de l’écologie menaçant même de porter plainte en diffamation. Alors que le PS affiche à n’en plus finir ses divisions, sur la déchéance de nationalité, sur la réforme du code du travail ou sur les primaires, ces bisbilles personnelles n’apportent qu’un peu plus d’eau au moulin de la confusion générale.
Et la conséquence de tout cela, c’est l’immense plaisir accordé à l’opposition qui n’en demandait pas tant. La réaction, ce soir de Virginie Calmels sur sa page Facebook est extrêmement sévère pour Alain Rousset, personnellement mis en cause. Et voilà, qu’Olivier Chartier, futur président de la commission des finances se retrouve en position de force, trop heureux d’avoir, bien malgré lui, »éliminé » son vice-président de tutelle et adversaire pendant tant d’années à Poitiers.
Alain Rousset aurait-il donc été à ce point maladroit, lui qui connait si bien les rouages de la vie politique depuis près de 40 ans ? C’est tellement difficile à croire, qu’il faut peut être chercher une autre explication et faire plutôt le constat, que le président de la grande région, a finalement ce soir pris pleinement les commandes de son nouveau territoire. Le voilà, plus fort que jamais, ayant réussit à neutraliser ses partenaires limousins, au demeurant fort peu nombreux, en leur concédant les vice-présidences demandées, et en ayant anéanti son rival picto-charentais, d’un grand coup sur la tête.