31 Déc

Courbet au cimetière d’Ornans : « Il est passé du purgatoire au paradis ! »

montage jeune vieux courbet

Comme de vieux amis qui n’oublieraient jamais l’un des leurs, ils se retrouvent chaque 31 décembre au cimetière d’Ornans, le jour anniversaire du décès de Gustave Courbet. Ils ne sont qu’une poignée mais ils ont la fidélité chevillée au corps.

Tous font partie d’une même famille, celle des admirateurs du maître d’Ornans. Par alliance, par connivence, par naissance, leur lien avec Courbet est indéfectible. Cette année, c’est un natif de la vallée de la Loue qui a rendu hommage à Gustave Courbet. La peinture de Courbet est si vivante qu’ Alain Verdenet, le secrétaire de l‘Institut Courbet, s’est adressé directement au peintre.

C’est formidable d’avoir encore autant d’amis à 198 ans. Cette année, on s’est tous défoncés pour ta gloire que tu aimais tant.

Et d’égréner les expositions et initiatives entreprises en 2016 pour diffuser l’oeuvre de Gustave Courbet, cet artiste précurseur et pilier d’un pan de l’histoire de l’art. Des actualités relayées par le blog de la Loue  : « Courbet et les impressionnistes » au musée Courbet d’Ornans mais l’exposition sur le Retour de la Conférence , celles de Loches et de l’abbaye d’Auberive : trois manifestations qui ont permis à l’Institut Courbet de faire rayonner l’oeuvre du peintre. 
 
L’Institut Courbet s’est de nouveau associé au musée départemental pour proposer cet hiver une exposition originale. En ce moment, vous pouvez voir Courbet comme on le voit rarement. Jeune arrogant, homme apaisé ou encore fatigué avant l’heure. Courbet avait très bien compris l’importance de la photographie. Nadar, Pierre Petit, Etienne Carjat, les plus grands artistes ont su saisir toute l’ambiguïté du personnage. Courbet commandait également des tirages de ses propres tableaux pour mieux les faire connaître.

Peinture du réel, peinture vivante.. Le photographe Lucien Clergue s’est lui aussi adressé directement à Gustave Courbet. Le célèbre artiste, fondateur des Rencontres Internationales de la photographie à Arles, est décédé en 2014. En 1979, il est venu dans la vallée de la Loue. C’est Jean-Jacques Fernier, le conservateur de l’Institut Courbet, qui lui fit découvrir le pays de Courbet. Le photographe est parti « à la recherche des signes et des traces laissées par Courbet ». Des clichés également exposés en ce moment au musée Courbet.

L’émotion indicible de vivre à l’intérieur des tableaux de Courbet, de m’y promener à ma guise, de les reconstruire, les étayer, les trahir, les sublimer.

Lucien Clergue a laissé un texte particulièrement émouvant. Le photographe avait été touché par les nus dans l’eau de Courbet, des chefs d’oeuvre qu’il avait observé à Paris ou New York. Et voilà maintenant le photographe, les pieds en marche sur cette terre foulée par le peintre, les oreilles emplies des sons de cascades et les yeux en quête de cadre.

Bien sûr que Courbet, aujourd’hui, serait photographe. Il a un oeil de photographe. Et nous voilà dialoguant tous les deux. « Quelle ouverture ? Quel film ? tu le fais en noir ou en couleur ? Oh ! La grotte de la Loue sera très bien en noir, mais cette eau à travers les herbes folles, pardessus les branches cassées, dévalant entre deux rochers, la couleur lui irait très bien, cette eau reflète le ciel, les rochers, les frondaisons, va pour la couleur ». Et on casserait la croûte ensemble, nos pieds déchaussés dans la rivière, nous touchant, nous parlant, nous repassant la chopine pour boire à même le goulot. Frères, quoi, frères d’armes, de combat, cherchant le bon angle, pour viser juste et tirer au bon moment !
Ah ! Courbet ! mon frère, je t’aime ! Tu vois je continue ! Cette fille je l’ai mise dans l’eau d’une rivière espagnole ses longs cheveux plaqués sur un sein généreux.
Et tu me disais à l’oreille « regarde le reflet du type en face, ce noir dans cette eau claire, bouge un peu, là tu seras mieux, le soleil l’illumine, c’est lui qui la peint vas-y c’est bon : appuie ».

Lucien Clergue aurait peut-être aimé se retrouver un 31 décembre à Ornans avec les amis de Courbet.

Tu vois, on est maintenant une armée d’amis, pour te faire aimer. C’est peut-être ce qui t’a le plus manqué pour faire aimer ton pays, notre pays.

conclut Alain Verdenet ce matin au cimetière d’Ornans. Oui, aujourd’hui, les admirateurs de Courbet sont bien plus nombreux qu’une poignée autour d’une pierre tombale. Sur la toile, celle tissé par internet, les tweets célébrant la date anniversaire de 31 décembre sont nombreux…

 

 

Une famille disséminée partout dans le monde où défenseurs de la Commune côtoient le ministère de la Culture !  Dans deux ans, un autre anniversiaire sera célébré, celui de la naissance du peintre en 1819 à Ornans. En 2019, la famille se sera encore agrandie.

Isabelle Brunnarius
isabelle.brunnarius(a)francetv.fr