02 Sep

[#VISA OFF] Une communauté gitane de Gérone dans l’oeil de Carles Palacio

Des visiteurs devant l'exposition de Carles Palacio à la médiathèque. © M.L.

Des visiteurs devant l’exposition de Carles Palacio à la médiathèque. © M.L.

Carles Palacio n’aurait pas pu choisir meilleur lieu que le quartier gitan de Perpignan pour exposer « Polvorins », dans le cadre du Off, le festival amateur en marge de Visa pour l’Image. Son exposition, visible à la médiathèque Emile Zola, traite du quotidien de la communauté gitane dans le quartier des Pedreres, à Gérone, en Espagne. Un travail documentaire riche avec des clichés pris à la volée.

Des repas au feu de camp, des scènes de vie dans la caravane, des enfants qui font des batailles d’eau, sont autant d’instants gravés sur la pellicule du jeune photojournaliste Carles Palacio. Ce natif de Gérone, qui excelle dans les jeux d’ombre et de lumière, a voulu donner une image plus noble d’un quartier mal connu de la ville catalane.

Mais, surtout de la communauté formée autour de la famille Amador, y vit depuis des années. Cette exposition est à découvrir jusqu’au 19 septembre, aux horaires d’ouverture de la médiathèque Emile-Zola de Perpignan.

MARINE LANGEVIN

« Pour une fois à Visa, ça n’a pas l’air d’être un conflit »

La vie à bord du bateau JCM-Services (Jésus-Christ Merveilleux Services) et sur la rive du fleuve après Mbandaka, 100 km avant Lisala. Les gens du village viennent vendre crocodiles (25 dollars), poulets, canards, et acheter des marchandises. © Pascal Maitre / Cosmos / National Geographic Magazine

La vie à bord du bateau JCM-Services (Jésus-Christ Merveilleux Services) et sur la rive du fleuve après Mbandaka, 100 km avant Lisala. Les gens du village viennent vendre crocodiles (25 dollars), poulets, canards, et acheter des marchandises. © Pascal Maitre / Cosmos / National Geographic Magazine

Chaque jour, les festivaliers découvrent des centaines de clichés et tentent de comprendre le message du photojournaliste. Sans la légende, la mission est plus compliquée. Certains visiteurs se sont essayés à l’exercice avec une image de Pascal Maître, un reportage sur le fleuve Congo.

« Au premier plan, il y a un alligator ligoté, qui vient sans doute d’être chassé, avec des animaux de la ferme ! On ne sait pas trop ce que va devenir l’alligator. » Martin Grimaldi est un Nimois de 20 ans venu faire les vendanges. « Il y a ces deux jeunes qui rament. Ils essaient peut-être de gagner leur vie. On se trouve sans doute dans un pays africain. » Juste au moins sur la région.

Gérard Chaumeron, originaire de Loupian (Hérault), hésite, et se lance : « Pour une fois à Visa, ça n’a pas l’air d’être un conflit. C’est peut-être une opération de sauvetage d’animaux.» Il est vite repris par son épouse, Marthe. « C’est étonnant que tu penses ça, toi, qui est si pragmatique. Je crois plutôt que les deux hommes transportent les animaux jusqu’à un marché. La scène pourrait peut-être se dérouler en Guyane. »

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Sergey Ponomarev en Syrie : « Le ménage était fait avant notre arrivée »

Sergey Ponomarev, photographe russe du New-York Times explique le contexte de son reportage en Syrie.  © Lisa Sanchez

Sergey Ponomarev, photographe russe du New-York Times explique le contexte de son reportage en Syrie. © Lisa Sanchez

Avec l’exposition La Syrie d’Assad, le Russe Sergey Ponomarev montre un pays où la vie suit son cours malgré la guerre. Sa nationalité lui a ouvert beaucoup de portes à Damas. Sa profession de photojournaliste lui a permis de contourner au mieux la propagande.

Sergey Ponomarev a choisi de raconter le conflit depuis le « camp » de Bachar Al-Assad et de son armée. « Le fait que je sois russe a été un atout pour me faire accepter par le régime, quel que soit le journal pour lequel je travaille», explique-t-il lors de sa rencontre avec les festivaliers à Visa pour l’image, mardi 1er septembre, au Palais des congrès de Perpignan.

Le photographe du New-York Times s’est rendu à deux reprises en Syrie, à Damas et Homs, en août 2013 et mars 2014. Sur ses clichés, la capitale du pays semble « au premier abord, une ville comme les autres. J’ai trouvé intéressant de raconter le conflit du point de vue du régime. La version des rebelles a déjà été largement relayée dans les médias. Bien sûr, ça n’a pas été facile de côtoyer les partisans de Bachar Al-Assad, qui tue son propre peuple, mais on ne peut pas juger son régime qu’à travers les morts. Il faut voir comment cela se passe à l’intérieur ». Être Russe a aussi facilité les relations de Sergey Ponomarev avec les militaires qu’il a beaucoup photographiés. « La première chose qu’ils m’ont dite en me voyant, c’est « Félicitations pour la Crimée » », confie-t-il avec un rire nerveux.

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Adrienne Surprenant : « J’aurais pu être arrêtée par la police »

En décembre 2014, la photographe québécoise Adrienne Surprenant est au coeur des manifestations au Nicaragua contre la construction d’un gigantesque canal interocéanique. Les autorités les répriment violemment et arrêtent les protestataires. La photographe nous détaille l’histoire d’un cliché pris pendant ces évènements, juste avant les arrestations. Il fait partie de l’exposition En attendant le canal au Nicaragua, au Couvent des minimes.

AMANDINE LE BLANC & LUC GALLAIS

La leçon de photojournalisme d’Andres Kudacki

Le photojournaliste Andres Kudacki au palais des congrès mardi 1er septembre 2015, à l'occasion de Visa pour l'Image. © Camille Hispard.

Le photojournaliste Andres Kudacki au Palais des congrès, mardi 1er septembre 2015, à l’occasion de Visa pour l’Image. © Camille Hispard

Andres Kudacki a donné une leçon de photojournalisme à son public dans le cadre des rencontres de Visa pour l’image 2015, mardi matin, au Palais des congrès de Perpignan.

Ne pas aider, ne pas susciter de faux espoirs. Andres Kudacki met un point d’honneur à ne pas influencer les scènes qu’il photographie. « Je leur disais que mon objectif était de témoigner, d’être le plus invisible possible », explique-t-il aux festivaliers de Visa pour l’Image. Il parle là des Espagnols menacés ou victimes d’expulsions et d’expropriations qu’il a suivis, à Madrid, ces trois dernières années. Une manière de traiter la crise financière qui fait l’objet d’une série de photographies dont certaines sont exposées à Visa pour l’image cette année, à l’église des Dominicains.

« Je souhaitais parler de l’intimité de ces familles pour montrer leur attachement à leur maison et la gravité de la perte de leur logement », raconte-t-il. Le photojournaliste se trouve confronté à des situations de détresse, se refusant toujours d’intervenir. Car il tient à être « honnête et sincère» dans ses photographies, à être le plus crédible possible auprès du public « pour que la société puisse croire au travail que je réalise », explique-t-il.

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01 Sep

Jean-François Leroy : « La presse n’est plus le seul revenu des photojournalistes »

Jean-François Leroy, Directeur Général du festival Visa pour l'image © Jean-Louis Fernandez

Jean-François Leroy, Directeur Général du festival Visa pour l’image © Jean-Louis Fernandez

Années après années, Jean-François Leroy, le directeur fondateur du festival Visa pour l’image, ne perd pas de son franc-parler. Absence d’exposition du World Press Photo, arrivée du Centre de international de photojournalisme de Perpignan, il revient sur l’actualité chargée du festival.

Dans votre édito, vous dites que la nouvelle génération de photojournalistes doit trouver d’autres débouchés que la presse. Sans la presse, est-ce que l’intérêt du métier est le même ?

Jean-François Leroy : « Les photojournalistes sont confrontés à un relatif désintérêt de la presse. Tout le monde rêve évidemment d’une double page dans le New York Times ou dans Match. La presse reste la quête du Graal mais des journaux paient une demi-page entre 60€ et 80€. Il faut donc trouver d’autres moyens de vivre. »

Comment fait-on pour s’en sortir quand on est un jeune photojournaliste ? Internet ?

Jean-François Leroy : « Il faut avoir un papa très riche… Sans blaguer, Internet ne génère pas de revenus. Il nous faudrait le Steve Jobs du photojournalisme. Il y a 15-20 ans tout le monde piratait sa musique. Il est arrivé avec son idée magnifique d’iTunes et, aujourd’hui, pirater n’a plus beaucoup d’intérêt. En photo, ça n’existe pas encore. Je crois que les jeunes photojournalistes ont compris que la presse ne serait plus leur seule source de revenus. Ils se tournent vers le corporate, l’institutionnel et l’humanitaire. Pour les aider, à Visa, on a créé des prix. Nous distribuons plus de 133 000€ de prix cette année. »

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Pourquoi ils photographient les photos ?

De nombreux visiteurs photographient les travaux des professionnels exposés.

De nombreux visiteurs photographient les travaux des professionnels exposés, en guise de souvenir du festival. Ici au couvent des minimes, lors de l’édition 2015. Crédit photo : Gwenaëlle GERNIOUX

Beaucoup de festivaliers arpentent les expositions de Visa, smartphone à la main ou appareil photo en bandoulière. Ils s’arrêtent parfois, prennent un ou deux pas de recul, et immortalisent un cliché exposé. Des images qui les touchent, les inspirent. Mais qu’en font-ils ensuite ? 

Il y a ceux qui la jouent furtif. Ils déclenchent rapidement l’appareil photo de leur smartphone et le rangent dans leur poche. Et il y a les autres, qui prennent le temps de chercher le meilleur angle, la meilleure lumière, boitier numérique dans les mains. Dans le dédale de Visa, un nombre important de visiteurs se mue en photographe. Pour capter les lieux accueillant le festival, mais surtout les travaux exposés par les professionnels. « J’en prends quelques-unes pour les garder, en guise de souvenir, justifie Denise, une sexagénaire habituée des lieux. Mais je ne partage rien sur mon compte Facebook et j’efface les photos de mon téléphone au bout d’un certain temps. »

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Ce que deviennent les photos après Visa

Que deviennent les photos après le festival ? Photo T.C

Une des salles d’exposition du festival Visa pour l’image 2015, dans le couvent des Minimes. Photo T.C.

Les visiteurs les admirent, les scrutent, les décortiquent. Pendant deux semaines, les clichés des photojournalistes sont les stars du festival Visa pour l’image. L’heure de gloire avant les oubliettes ?

A la fin du festival, une fois que les photographies exposées retournent dans l’ombre, que deviennent-elles ? Les photographes, propriétaires de leurs fichiers, repartent tout simplement de Perpignan leur série sous le bras. « Je vais récupérer gratuitement les tirages après le festival », se satisfait Adrienne Surprenant, qui compte bien exposer sa série au Canada, chez elle. « On envoie aux photojournalistes les tirages deux semaines après la fin du festival. Ils en font ce qu’ils en veulent. Ils les exposent, les vendent, les déchirent », complète Jean-François Leroy, directeur général de Visa. Les doubles numériques, eux, sont conservés.

Pour la 27e édition du festival, plusieurs laboratoires ont tiré près de 1 500 photographies. L’entreprise Dupon Images est une habituée : cela fait vingt-six ans qu’elle travaille en partenariat avec Visa. Cette année, elle a imprimé une dizaine d’expositions. Si elle n’est pas supposée conserver les clichés envoyés par l’équipe de Jean-François Leroy, Dupon Images en garde certaines : « On est obligé d’en sélectionner. Tout ce qui est culturel ou historique, on conserve, au cas où… Avant, on devait rendre les négatifs, mais on les scannait », affirme Jean-François Camp, le PDG. L’entreprise organisatrice de Visa, Images évidence, conserve également les photos. « De quel droit, s’étonne un photographe français qui travaille en Argentine. S’ils le font, ils doivent nous en parler, nous payer, sauf si nous signons un contrat qui stipule qu’ils peuvent utiliser nos photos gracieusement. » La loi de 1997 sur la propriété intellectuelle autorise la conservation privée des photos, sans utilisation publique. « On sait que les clichés ne nous appartiennent pas », se presse d’ajouter Jean-François Camp.

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“De Hara-Kiri à Charlie” : Xavier Lambours, une référence de l’irrévérence

Comment prendre une photo irrévérencieuse de Lambours ? « Tu te démerdes », répond-il, avant de se mettre en scène, mimant un de ses clichés. © Justin Mourez

Comment prendre une photo irrévérencieuse de Lambours ? « Tu te démerdes », répond-il, avant de se mettre en scène, mimant un de ses clichés. © Justin Mourez

Heureusement que Photoshop existe ! Sans le logiciel de retouches qui hérisse les poils de certains, nous – simples spectateurs – n’aurions jamais pu découvrir un cliché d’exception.

En 1981, Xavier Lambours, photographe, fait partie de la rédaction du journal satirique Hara-Kiri. Un mardi soir, après le bouclage, il se retrouve avec le Professeur Choron, co-fondateur du journal, au restaurant le Dodin Bouffant, à Paris. « C’était notre cantine. » François Mitterrand, alors en campagne présidentielle, dîne derrière eux. Le Professeur Choron se met à chanter à tue-tête. De la pure provocation, le style Hara-Kiri, quoi. « J’ai juste eu le temps de prendre mon appareil. J’ai fait une photo à hauteur de la ceinture, sans viser. Je me mordais la lèvre pour ne pas me marrer. »

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« Ce n’est même plus de la tristesse, c’est de la douleur »

Carmen Martinez Ayuso (85 ans) s’est fait saisir son appartement lorsque son fils a perdu son emploi et qu’elle ne pouvait plus payer le prêt hypothécaire et les taux d’intérêt élevés. © Andres Kudacki / AP

Carmen Martinez Ayuso (85 ans) s’est fait saisir son appartement lorsque son fils a perdu son emploi et qu’elle ne pouvait plus payer le prêt hypothécaire et les taux d’intérêts élevés. © Andres Kudacki / AP

Contextualiser une photo sans sa légende. C’est le jeu auquel les festivaliers de Visa pour l’image se prêtent, chaque jour. Aujourd’hui, ils réagissent sur un cliché d’Andres Kudacki. Une scène qui illustre la crise du logement en Espagne.

Difficile de décrypter cette image qui incarne le désespoir. C’est ce que laisse entendre Göran Stenberg, photographe retraité. « Manifestement, ce cliché dégage une certaine peine. La scène pourrait se dérouler n’importe où en Europe », estime ce Suédois. Assis sur les marches de l’ancienne université de Perpignan, il procède par élimination. « Ce n’est pas en Suède, nous n’avons pas ce genre de vêtements. Peut-être en Roumanie ou en Grèce ».

À quelques pas de là, Véronique, festivalière venue de Périgueux, se laisse influencer par ce qu’elle appelle ses « origines » professionnelles. « C’est la maladie d’Alzheimer. Cette dame est perdue dans une maison de retraite ». Une situation que cette aide-soignante vit au quotidien.

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