Chaque jour pendant une semaine, les festivaliers de Visa pour l’image à Perpignan se prêtent à un petit jeu : commenter et tenter de légender la photo du jour, sélectionnée parmi les nombreuses photographies de cette 24e édition du festival international du photojournalisme.
« Pour moi, c’est clair, net et précis, c’est du volley ! »
11 heures. Au bar-restaurant « Le Lisboa », place Rigaud à Perpignan. A l’intérieur, sous un drapeau portugais, le patron feuillette le journal et dicte les plats du jour à inscrire sur l’ardoise. « Ici, on soutient tous les clubs de football », lance Victor. Il jette un œil à la photo. « Ca c’est du foot… Ce pourrait être un gardien… Ou plutôt du volley-ball. » Il hésite puis ajoute : « L’inclination du corps… Un gardien de foot ne reste pas avec un pied à terre. J’étais arbitre de football pendant 15 ans », argumente l’homme. « Le corps d’un gardien de football va dans tous les sens. Pour moi, c’est clair, net et précis, c’est du volley ! » Dommage. Il faut encore chercher.
« Holala, mon dieu ! Pour jouer au foot là-dedans… »
Dehors, attablée devant un café au lait et des gâteaux, son épouse, Dulcinia, lache : « Holala, mon dieu ! Pour jouer au foot là-dedans… Demandez à mon mari ce qu’il en pense… Du volley ? Je ne crois pas ! C’est du foot. Mais déjà, ce n’est pas français. » Elle interpelle alors Luce, assise en face d’elle. « Toi qui est de là-bas, tu connais mieux que nous. » Luce précise : « Je suis pied noir mais je suis partie quand j’avais quatre ans, alors… ». Un long silence s’installe. Dulcinia la relance « Qu’est-ce que tu en penses ? ». Silence. « C’est écrit liberté, freedom… » Après une pause, elle se lance finalement. « Ca ne peut pas faire penser au mur de Berlin, il est beaucoup plus gros. C’est en Israël ? » Luce se rapproche du but…
Victor rejoint alors dehors Luce et sa femme. « Il n’y a pas de cage de but au volley », lui envoie Luce. « C’est pour tromper l’ennemi », réplique Victor.
« La palissade n’a pas l’air d’être dans son pays d’origine »
Derrière, à une autre table, Didier finit son café. « Je ne sais pas lire l’arabe. Mais ça n’a pas l’air d’en être, c’est plutôt juif, des signes comme ça… ». Il remarque alors la palissade. « Elle n’a pas l’air d’être dans son pays d’origine, elle à l’air d’être en France… Ce sont la végétation et les poubelles autour qui me font penser ça. » Il poursuit son raisonnement. « Elle n’a pas l’air faite avec du bois, mais du béton. Ce ne serait pas le mur entre Israël et le Liban, construit il y a deux ou trois ans ? » Presque.
La photo est d’Amélie Debray, l’une de celles révélées à l’occasion de la soirée de projection de Visa lundi dernier. Elle fait partie de son exposition intitulée « Surface de réparation ». Ce mur sépare Israël des territoires occupés de Palestine.
Lucille Topin