12 Mai

Le Manoir à Mouthier Haute-Pierre : quand l’art rencontre la nature

Alexandre Tiercelin, Philosophe et Max Renneisen, artiste devant une de ses oeuvres à la Galerie d'art Charles Pouchon du Manoir de Mouthier Haute-Pierre

Alexandre Tiercelin, Philosophe et Max Renneisen, artiste devant une de ses oeuvres à la Galerie d’art Charles Pouchon du Manoir de Mouthier Haute-Pierre

Courbet est l’ambassadeur de la vallée de la Loue. D’autres artistes pourraient bientôt eux-aussi faire rayonner ce petit bout de territoire à l’international. A Mouthier Haute-Pierre, un « centre d’art et de villégiature » ouvre samedi 13 mai. L’association Le Manoir présente sa première exposition intitulée « Bonjour Monsieur Courbet !  » autour des oeuvres de Katharina et Max Renneisen. D’autres suivront à l’issue de résidences d’artistes.

C’est un couple d’artistes. Ils partagent une forme d’élégance hiératique et intemporelle. Katharina et Max Renneisen vivent à Berlin et c’est leur troisième séjour dans la vallée de la Loue.

« C’est ici que l’on sent l’énergie et la force primitive de la nature que l’on trouve également dans les tableaux de Courbet »

m’explique Katharina dans un français parfait. Ensemble, nous sommes allés à la Source de la Loue. Lieu culte pour tout admirateur du maître d’Ornans. La jeune femme a mis en place son appareil photo : pied, chambre, objectif, plan-films, voile de visée. Tout un matériel contemporain mais dont la technique remonte au XIXe. La photo argentique grand format lui permet d’obtenir des tirages en noir et blanc d’une grande précision. A l’heure du selfie, Katharina Renneisen privilégie l’intemporalité. A la manière de Courbet qui évitait tout référence à son époque dans ces peintures de paysage. Une fois rentrée à son atelier, elle colorise ses clichés à la peinture à l’huile.

Cette combinaison originale de techniques traditionnelles en peinture et en photographie ouvre une nouvelle esthétique qui échappe à la photographie numérique. La prise photographique saisit la Nature à un instant donné dans la variété infinie de ses détails et la peinture à l’huile permet d’en proposer une interprétation ultérieure pour aboutir à la création de paysages universels: ceux-là mêmes que n’a cessé de poursuivre Gustave Courbet. 

Lorsque vous irez voir l’exposition de Mouthier, prenez une loupe pour observer ces photos prises au pays de Courbet ou à Barbizon. Vous vivrez une belle expérience : vous passerez de l’anodin au féérique. On peut passer devant ces tableaux en pensant voir de simples photos couleurs mais, dès que l’on scrute, on bascule dans un ailleurs. L’artiste allemande brouille les pistes comme Courbet qui voulait rendre son Atelier du peintre, allégorie réelle déterminant une phase de sept années de ma vie artistique, assez incompréhensible. Voici l’interview de Katharina Renneisen :

De retour au manoir, son mari Max Renneisen nous donne les clés de ces tableaux : une série de nus féminins. Un jeu savant de correspondances avec ceux de Courbet peut s’instaurer. Le Berlinois puise lui aussi dans la tradition pour construire ces peintures mais ses modèles sont puisées dans les magazines naturistes et les accessoires sont contemporains.

La confrontation de corps modernes dénudés avec des paysages directement empruntés à l’histoire de la peinture est l’occasion de relancer la réflexion sur les relations entre les hommes et la Nature. 

max-renneisen

Vous pouvez admirer les oeuvres de ces deux artistes jusqu’au mois d’octobre à la galerie Charles Pouchon du Manoir de Mouthier Haute-Pierre. Il  y a quelques temps, je vous avais présenté ce nouveau lieu culturel de la vallée de la Loue. Les artistes qui doivent venir en résidence dans cette belle demeure exposeront ensuite leurs oeuvres à la galerie.

Plusieurs membres de l’association qui gèrent ce « centre d’art et de villégiature » vivent une partie de l’année à Berlin, véritable vivier international d’artistes. Comme l’explique dans l’interview ci-dessous, le philosophe Alexandre Tiercelin, une quarantaine d’artiste est intéressée par ce projet de résidence-exposition. Le manoir a une douzaine de chambres de disponibles.

Des parcours culturels seront proposés cet été dans la vallée de la Loue. Ils pourront prendre la forme de promenades photographiques en compagnie de Jean Daubas.

Photographie de Jean Daubas

Photographie de Jean Daubas

Résider et travailler au Manoir, c’est mettre ses pas dans ceux de Courbet. Pas pour le copier mais pour faire vivre son manifeste de 1855.

Savoir pour pouvoir, telle fut ma pensée. Etre à même de traduire les moeurs, les idées, l’aspect de mon époque, selon mon opinion et mon appréciation, être non seulement un peintre, mais encore un homme, en un mot, faire de l’art vivant, tel est mon but.

Extrait du Manifeste de Courbet . 1855.

Extrait du Manifeste de Courbet . 1855.

 

Isabelle Brunnarius
isabelle.brunnarius(a)francetv.fr