Régulièrement, j’évoque sur ce blog L’Origine du Monde de Courbet. Ce tableau, conservé au musée d’Orsay, a été exposé le temps d’un été au musée Courbet de Besançon. et à chaque fois, je me demande comment je vais poster sur ma page Facebook le plus célèbre tableau de Gustave Courbet pour annoncer un article sur ce blog.. Pour l’instant, je trouve un subterfuge. D’où mon intérêt pour la bataille juridique initiée par un enseignant de Nantes.
Notre confrère de l’Agence France Presse a pu assister à l’audience de ce mardi 5 janvier à la cour d’appel de Paris. « Cette juridiction a été saisie par la société Facebook en conflit avec un internaute qui lui reproche d’avoir censuré son compte, elle dira le 12 février si la justice française est ou non compétente pour juger le géant du net américain.
En première instance, le tribunal de grande instance de Paris s’était déclaré compétent pour juger le réseau social au grand dam de la société américaine qui estime ne pouvoir être poursuivie en justice que devant un tribunal de l’État de Californie où siège l’entreprise. Facebook avait donc fait appel.
A l’origine du litige, l’action en justice d’un professeur des écoles qui reproche à Facebook d’avoir censuré son compte sur lequel il avait posté une photo du tableau de Gustave Courbet « L’origine du monde », représentant un sexe féminin.
L’arrêt de la cour d’appel sera scruté à la loupe en France comme à l’étranger car la question de la responsabilisation juridique des géants d’internet fait débat après la diffusion de messages haineux ou de propagande islamiste.
« Facebook utilise tous les arcanes du droit pour éviter d’être jugée en France où elle compte 28 millions d’usagers. La société a peur que ce dossier fasse jurisprudence », a réagi Me Stéphane Cottineau, avocat de l’internaute. « L’arrêt pourrait également avoir des répercussions sur pratiquement tous les réseaux sociaux et les sites de e-commerce qui disposent eux aussi de clauses abusives obligeant un usager à saisir un tribunal étranger », a-t-il souligné.
A l’audience, l’avocate de Facebook a demandé à la cour de constater l’incompétence de la juridiction française. Elle a fait valoir que l’internaute avait signé les conditions générales d’utilisation qui prévoient la compétence exclusive d’un tribunal californien et estimé que l’usager ne pouvait être considéré comme un consommateur, l’adhésion au site étant gratuite.
Elle a en outre assuré que l’enseignant « photographe free-lance » aurait eu un usage professionnel du site, ce qui le priverait du bénéfice du code de la consommation qui prévoit la saisine d’un tribunal du ressort du consommateur.
Stéphane Cottineau a rappelé que son client était enseignant et n’utilisait Facebook que pour partager sa passion de la photo. Il a expliqué que les conditions générales d’utilisation signées par l’internaute étaient à l’époque illisibles, sur 12 pages et en anglais et plaidé le caractère abusif et déséquilibré de la clause attributive de compétence imposée par Facebook.
L’avocat a enfin souligné que si le site était gratuit, Facebook tirait d’importants profits de l’exploitation des données personnelles des usagers. Il a en conséquence demandé à la cour de confirmer la compétence de la justice française pour juger Facebook. »
Isabelle Brunnarius