Il ne faudrait pas que cela soit l’arbre qui cache la forêt. Cette maxime résume assez bien la réaction des experts français après la présentation, hier, des conclusions de l’Université de Neuchâtel. Certes, c’est une bonne nouvelle car c’est une avancée dans les recherches sur les causes de mortalité mais, pour Alexandre Cheval, garde-pêche de la fédération de pêche du Doubs, cette mise en évidence du rôle de ce champignon dans la mortalité des poissons de la Loue et du Doubs, est plutôt une « conséquence » de la détérioration du milieu.
Les services de l’Etat insistent aussi sur ce point. Ce champignon n’est pas la cause unique de ces mortalités de poissons constatées depuis 2009 et il ne faudrait pas que les résultats de cette étude suisse conduisent à abandonner toute action visant à améliorer la qualité de l’eau.
Confirmation de Françoise Pozet, vétérinaire biologiste au laboratoire départemental d’analyses basé à Poligny; les causes de mortalité sont multiples et celle avancée par l’Université de Neuchâtel n’est peut être pas celle à mettre en avant. Françoise Pozet a fourni aux chercheurs suisses des prélèvements réalisés sur des poissons de la Loue. La scientifique précise que l’étude n’est pas finie, d’autres étapes sont encore nécessaires avant de valider définitivement cette piste. Et pour cette vétérinaire, « c’est toujours dangereux d’affirmer aussi vite car il y a un risque de mauvaise interprétation. »
Les Français étaient bien au courant de cette étude menée de l’autre côté du Doubs. Dans le rapport national d’expertise publié en mars dernier, il est précisé qu’ « A ce jour, les éléments de caractérisation du pouvoir pathogène des Saprolegnia parasitica isolées à partir de poissons échantillonnés dans la Loue et le Doubs n’ont pas été finalisés. Cependant, les premiers résultats obtenus par des collègues suisses sur les génomes de plusieurs souches de ce champignon isolées dans les rivières du Jura, montrent que ces souches semblent présenter un caractère monoclonal (même origine génétique). Il pourrait donc y avoir eu, dans la Loue, ainsi que dans d’autres rivières de la région, l’émergence puis la dispersion d’une nouvelle souche ayant un pouvoir pathogène élevé. A ce jour, l’hypothèse de la survenue d’une épidémie bactérienne, virale, ou encore mycosique,comme étant à elle seule responsable des mortalités de poisson constatées, a été rejetée par le groupe d’experts sur la base des résultats d’analyses pratiquées par le LDA39 » , le laboratoire dont fait partie Françoise Pozet. D’où la prudence actuelle vis à vis de cette étude non seulement pour ne pas occulter l’impact du mauvais état des rivières sur la santé des poissons et aussi pour attendre les conclusions définitives de cette étude.