Emblème et devise (2/2)
Symbole de force et de bravoure, le sanglier blanc a été pris comme emblème par Richard, duc de Gloucester, alors que ses frères Edouard IV et George, duc de Clarence ont respectivement choisi le lion blanc et le taureau noir.
Le sanglier bleu faisait déjà partie des nombreux emblèmes d’animaux du Roi Edward III, trisaïeul de Richard, et dernier patriarche Plantagenêt des maisons d’York et de Lancastre. Richard III a conservé ce symbole, mais les lois de l’héraldique l’obligèrent à avoir sa propre couleur, ce qui lui fit passer du sanglier d’azur (bleu) au sanglier d’argent (blanc).
Quelques rumeurs disent aussi que le choix du sanglier, « boar » en anglais viendrait d’un jeu de mots avec Eboracum, nom latin de l’ancienne cité romaine, devenue York par la suite.
Quelles que soient les raisons qui aient orienté Richard dans son choix, le sanglier était un symbole merveilleusement approprié car Richard était aussi courageux et volontaire que la bête elle-même. Tout au long de sa vie, Richard fut en effet un militaire vaillant et un chef résolu.
Le sanglier blanc de Richard est également connu pour avoir été massivement distribué sous forme de badge lors de l’intronisation de Richard en 1483. En effet, la guerre des Deux-Roses étant aussi une guerre des signes, à des fins de propagande, il avait fait faire 13000 badges en tissu de futaine qui devaient être distribués à ses partisans. Les autres badges en métaux précieux étaient destinés à des personnes de statut supérieur, ducs et notables, en reconnaissance de leur fidèle soutien.
Nous avons repris cette emblème à quelques endroits dans le décor mais surtout sur les motifs ornant l’armure en porcelaine dessinée et peinte à la main par Stéphane Blanquet puis sculptée par Christian Couty et enfin cuite grâce au concours de la Manufacture de porcelaine de Limoges.
Sur cette armure, composée d’un brassard complet pour le bras gauche comprenant canon d’avant-bras, cubitière, canon d’arrière-bras et épaulière ; puis pour la poitrine et l’abdomen d’un plastron et d’une pansière ; et enfin pour la jambe droite d’une tassette, d’un cuissard, d’une genouillère et d’une grève, on retrouve donc plusieurs des emblèmes de Richard III : Le sanglier blanc, le faucon au visage de vierge tenant une rose blanche, le soleil étincellant et bien-sûr la rose blanche des Yorks.
Cette rose blanche dessinée à plusieurs reprises sur l’épaulière et le cuissard de l’armure a été prise comme emblème au XIVes par Edmond de Langley, 1er duc d’York, fils cadet de la Maison Plantagenêt, le blanc étant le symbole de la lumière, caractérisant l’innocence, la pureté, la joie et la gloire. Durant la guerre dite des roses, la rose blanche des York fut opposée à la rose rouge de la branche Lancastre, issue de Jean de Gand, frère aîné d’Edmond de Langley. L’issue de cette guerre de trente ans, a été marquée par la défaite de Richard III face à Henry VII qui épousa Elisabeth d’York et réunifia ainsi les deux branches avec la rose bicolore de la dynastie Tudor.
La devise « Loyaulté me lie » et les emblèmes de Richard III ont acquis une place très importante dans notre processus de création. Ils furent des signes posés sur quelques éléments de costumes, d’accessoires ou de décors. Mais plus important, ils constituent des guides pour l’interprétation conduite par Jean Lambert-wild et Elodie Bordas. Car comment allier le blanc sanglier au parfum de la rose ? Comment faire du visage de Richard, dans ses moments de fureur, une hure de sanglier, toujours aux aguets, toujours décidé à charger, l’écume aux lèvres, les pieds en garde et les broches en avant ! Un cœur sauvage, au verbe enragé de sang, qui voudrait faire du trône sa souille mais qui perdrait par instant toute sa férocité et se retrouverait gauche, assommé par le parfum délicat d’une rose qui d’une épine pourrait l’endormir ou d’un souffle pourrait l’abattre. Alors chaque jour VLA-AU ! Il nous faut monter sur scène sans rechigner en nasillant au cri poussé par ces veneurs que sont Lorenzo Malaguerra et Gerald Garutti, car pour Richard, comme pour tout bon sanglier, c’est forcer le passage ou mourir qu’il faut.