Comme annoncé par nos confrères du JDD, le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis a annoncé, ce samedi 6 février, le départ des universités d’été du PS de La Rochelle pour Nantes. Organisé dans la capitale de Charente-Maritime depuis 1993, ce rendez-vous rassemblait chaque année des milliers de militants et marquait le coup d’envoi de la rentrée politique. Il représentait une manne économique importante pour la ville, en terme de nuits d’hôtel et de dépenses dans les restaurants, estimée à 1,5 millions d’euros selon France 3 Poitou-Charentes. Mais depuis l’élection d’Olivier Falorni aux législatives de 2012 face à Ségolène Royal, et l’élection en 2014 du maire Jean-François Fountaine, à la tête d’une liste dissidente divers-gauche, contre la liste officielle du PS, la Rochelle est devenue le symbole de la dissidence et du mépris des règles du Parti Socialiste.
Qu’il est loin le temps où Michel Crépeau, maire de La Rochelle, posait aux côtés de François Mitterrand et Helmut Kohl, la première pierre de l’université de La Rochelle. C’était en 1992, quelques mois plus tard, le Parti Socialiste était laminé aux élections législatives de juin 1993, et il choisissait La Rochelle, pour la première fois, pour organiser ses universités d’été. C’était l’année de l’arrivée du TGV, mais c’était aussi un symbole, une ville dirigée par un maire Radical, et un premier adjoint socialiste Maxime Bono. La Rochelle offrait un cadre agréable en cette fin d’été, et l’habitude s’est prise de revenir chaque année, de se retrouver par courant, dans les mêmes restaurants, et de refaire le monde dans les bars, le long du vieux port jusqu’à tard dans la nuit.
François Hollande, premier secrétaire du PS pendant plus de 10 ans de 1997 à 2008, a fait de ce rendez-vous l’un de ses moments préférés, tout comme Ségolène Royal qui venait ici d’abord en voisine, comme députée des Deux-Sèvres, puis en présidente de Région à partir de 2004. Tous les deux avaient pour le maire Maxime Bono, une profonde amitié et ce n’est pas par hasard, que Ségolène Royal a choisit cette circonscription en 2012 pour les élections législatives.
Trop de trahisons
Mais, La Rochelle, la rebelle, est devenue le théâtre des pires trahisons. Par un beau jour de juin 2012, c’est justement à la terrasse des « Grands Yachts » sur le port, aux côtés de Martine Aubry et Cécile Duflot, venues la soutenir en pleine campagne, que Ségolène Royal découvre le fameux tweet de soutien de Valérie Trierweiler à Olivier Falorni. Finalement battue au second tour, par le candidat dissident, Ségolène Royal doit admettre sa défaite, devant toute la presse, dans les jardins du Musée, aux côtés de Maxime Bono.
Quelques semaines plus tard, trop meurtrie encore, Ségolène Royal ne vient pas aux universités d’été du PS. Mais en 2013, sa combativité retrouvée, elle assume son rôle de présidente de région et revient à l’espace Encan, pour un discours qui lui vaut une standing ovation.
Hélas, aux municipales de 2014, Jean-François Fountaine tourne à son tour le dos au PS pour accomplir son ambition personnelle de devenir maire de la ville. Battu lors de la primaire interne au PS, il conduit une liste dissidente face à Anne-Laure Jaumouillié et l’emporte finalement. Lors de l’université d’été suivante, il lui revient, en qualité de maire de la ville de prononcer le discours d’ouverture alors que dans la salle, nombreux sont les socialistes qui s’étranglent de colère. Cette année là, la tension est si vive au sein de la fédération socialiste de Charente-Maritime que le traditionnel pot de bienvenue aux militants est annulé. Ségolène Royal n’est pas là, officiellement retenue par un voyage aux Antilles. C’est alors que les rumeurs d’un déménagement des universités d’été s’amplifient.
En 2015, Ségolène Royal ne vient pas, non plus, en raison officiellement d’un voyage en Afrique pour représenter François Hollande. Pourtant, ces dernières universités se déroulent presque sans accroc. Jean-François Fountaine prononce son discours d’ouverture, comme le veut la tradition, et surprend par son soutien à Alain Rousset, comme le raconte France Bleu La Rochelle. Il y a tout de même eu un long cafouillage et le président du Conseil Régional, Jean-François Macaire doit lui se contenter d’un message vidéo enregistré. Mais ce que l’on retient, ce sont surtout « les journées des frondeurs », à Marennes, quelques kilomètres plus au sud, et la chaleur torride qui oblige Manuel Valls à faire son discours trempé de sueur. Pour la ville, tout semble rentrer dans l’ordre. Ce soutien très appuyé de Jean-François Fountaine à Alain Rousset pour la campagne des régionales confirme la normalisation en cours. Le maire de La Rochelle est d’ailleurs présent le 04 janvier dernier à Bordeaux, pour l’élection du président, et sa présence ne passe pas inaperçue.
La Rochelle, mauvais symbole
Seulement, beaucoup de mal a été fait. Difficile d’imaginer que les prochaines universités d’été qui vont marquer, à la rentrée, une accélération de la campagne présidentielle se déroulent dans un lieu devenu le symbole de la division de la gauche, de la trahison, des aventures personnelles. Ce rendez vous devra être celui de l’unité, du « tous derrière François Hollande ». La ville de Nantes, socialiste depuis 1989 et la victoire de Jean-Marc Ayrault, l’ancien premier ministre, aujourd’hui dirigée par une femme Johanna Rolland, est un symbole parfait. Elle offre en plus des capacités logistiques qui manquaient à La Rochelle.
Si beaucoup de voix vont s’élever pour dénoncer le mauvais coup porté à l’économie locale, de La Rochelle, la belle, il faut bien admettre une certaine justice dans cette « sanction » de La Rochelle, la rebelle.