Par Laurent Lataste, rédacteur en chef adjoint France 3 Aquitaine
Les élections régionales ont, sans conteste, révélé Virginie Calmels. Passée de l’ombre à la lumière par celui qui l’a faite venir sur sa liste aux municipales, Alain Juppé. « La dame de faire » a montré toute sa pugnacité, a mené un combat honorable, et n’a rien lâché.
Mais le constat à l’issue du scrutin est sans appel : le socialiste Alain Rousset la devance de 10 points sur la grande région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, mais aussi de 7 points à Bordeaux, où elle officie en tant qu’adjointe. N’en déplaise à certains, Virginie Calmels a perdu et bien perdu ! Et il ne reste que des miettes aux perdants. L’opposition dans une assemblée élue n’ayant que très peu d’influence et de pouvoirs.
Pourtant, le 13 décembre au soir, Alain Juppé semblait vouloir lui attribuer de nouvelles fonctions tout en relativisant cette défaite. Ne jamais perdre la face !
Certes, Virginie Calmels est devenue vice-présidente de la Métropole bordelaise, alors même qu’Alain Juppé lui-même avait édicté une règle simple : quand on est son adjoint à la ville on ne peut être vice président de la Métropole. Mais les règles sont parfois éphémères et ne dépendent que du « Patron » !
Le poste de vice-président avait été était laissé vacant suite au décès de Josy Reiffers qui faisait lui aussi partie de l’équipe municipale d’Alain Juppé. Aucun problème donc pour l’attribuer à la candidate malheureuse, d’autant que la délégation porte sur l’économie. Quoi de mieux, pour celle qui voulait gérer la Région comme une entreprise…
Virginie Calmels attendait mieux
Elle espérait le titre officiel de première adjointe au maire de Bordeaux. Depuis l’élection municipale de 2008, Alain Juppé se refuse à donner un numéro à ses adjoints mais le contexte politique pourrait le faire changer d’avis. L’annonce était attendue, par certains, le 8 janvier dernier. Ce jour là, Alain Juppé présente ses vœux à la presse. Un moment traditionnel, l’occasion de faire passer des messages. Bref, le jour idéal pour une nomination et adouber un dauphin ou une dauphine.
Car derrière l’élection régionale se jouait également la succession d’Alain Juppé au Palais-Rohan. L’élection présidentielle est dans 15 mois, et si jamais Alain Juppé accède à la fonction suprême, Virginie Calmels, qui a acquit une notoriété grâce à l’élection régionale, pourrait être celle qui lui succèdera. En la nommant première adjointe, ses principaux rivaux dans la majorité municipale seraient alors contraints de se résoudre à la voir devenir maire de Bordeaux, si jamais le destin d’Alain Juppé le décidait.
Mais ce 8 janvier, Alain Juppé a évoqué Bordeaux, la France, l’Europe, les problèmes internationaux, les conflits, la primaire à droite…mais pas le poste de première adjointe. Une déconvenue pour celle qui ne renie pas son ambition. Et si Alain Juppé n’a pas franchit le pas, c’est sans doute parce qu’il a tout simplement analysé les résultats de ces élections régionales. Sa candidate n’a pas brillé à Bordeaux et n’est peut-être pas en adéquation avec la nouvelle sociologie de la ville qui vote de plus en plus à gauche.
Alain Juppé douterait-il de Virginie Calmels ?
Sans doute. En tout cas, il réfléchit et attend de voir. Car l’actuel maire de Bordeaux le sait bien, pour accéder au Palais Rohan, il faut rassembler jusqu’au centre. Un centre plutôt mal à l’aise entre les deux tours des élections régionales avec les déclarations de la candidate Calmels et ses appels du pied à l’électorat FN. Bref, ça passe mal.
Mais, ça passe mal aussi dans la majorité municipale avec certains élus étiquetés Les Républicains. Il y a ceux qui n’apprécient pas l’arriviste à la carrière fulgurante et d’autres qui ne sont pas prêts à mettre de côté leur ambition de succéder à Alain Juppé. Nicolas Florian, Alexandra Siarri, Jean-Louis David et Fabien Robert, se verraient bien dans le fauteuil du « meilleur d’entre nous », et ne doivent certainement pas goûter le caractère et le discours libéral de Virginie Calmels. Loyaux ils le sont envers Alain Juppé mais de là à suivre comme des moutons une Virginie Calmels débarquée depuis peu dans la vie politique, cela parait moins évident. Et Alain Juppé connait bien les réticences de certains élus de sa majorité.
Alors, il laisse planer le suspens tout en laissant sa chance « au produit », comme on dit en marketing.
Mais le chemin tout tracé de Virginie Calmels semble plus sinueux que prévu et la sortie de route pourrait arriver à tout moment sans le soutien total de la droite bordelaise.
Sa défaite aux régionales l’a fragilisée dans ses ambitions bordelaises mais qu’elle se rassure, comme disait André Labarrère : « Les dauphins sont faits pour s’échouer sur les plages ».
La dame à beaucoup à faire, encore, pour accéder au fauteuil de maire de Bordeaux.