04 Sep

Photojournaliste, un métier qui s’uberise

Photojournaliste, un métier en pleine mutation. © Justin Mourez

Le métier de photojournaliste est en pleine mutation. © Justin Mourez

De plus en plus précaires, les photojournalistes sont-ils les « sacrifiés » du monde de la presse ? Pour alerter les pouvoirs publics, la Société civile des auteurs multimédia (Scam) publie une enquête alarmante présentée à Perpignan, vendredi 4 septembre à Fleur Pellerin, ministre de la Culture et de la Communication.

« S’il faut tapiner devant une mairie pour prendre des photos de mariage, je le ferai. » Georges Bartoli, photojournaliste depuis 30 ans, est prêt à tout pour travailler. Il est photographe avant d’être photojournaliste. Et il n’est pas le seul à accepter ce qui aurait paru inacceptable il y a quelques années. Sur Wedding photojournalist association, une plateforme en ligne, créée en 2002 dans le Connecticut, des photographes de presse proposent leurs services : les mariages y sont traités comme des reportages et les mariés comme les héros d’une histoire. Ils travaillent aussi pour des institutions, des comités d’entreprise ,ou des ONG. « Le savoir-faire est le même. Par définition, le métier est chaotique », résume Georges Bartoli. « Le métier est un champ de ruines », surenchérit Patrick Bard.

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Femmes yézidies, images d’une résistance contre Daech

Berivan, 18 ans, est membre de la brigade des combattantes yézidies du Sinjar. Sans demander la permission de ses parents, elle s’est enrôlée après l’attaque de Daech contre son village et se bat désormais en première ligne dans la ville de Sinjar, Irak, 13 mai 2015. © Alfred Yaghobzadeh pour Paris Match

Berivan, 18 ans, est membre de la brigade des combattantes yézidies du Sinjar. Sans demander la permission de ses parents, elle s’est enrôlée après l’attaque de Daech contre son village et se bat désormais en première ligne dans la ville de Sinjar, Irak, 13 mai 2015.© Alfred Yaghobzadeh pour Paris Match

Grâce à l’exposition Le corps des femmes yézidies comme champ de bataille du photographe iranien Alfred Yaghobzadeh, le public découvre ces combattantes kurdes qui ont pris les armes pour défendre leur village, encerclé par les forces de l’état islamique. 

L'exposition d'Alfred Yaghobzadeh est visible à l'ancienne unviersité. @Caroline Malczuk

L’exposition d’Alfred Yaghobzadeh est visible à l’ancienne université, à Perpignan. @Caroline Malczuk

Novembre 2014 et mai 2015. Le photographe iranien Alfred Yaghobzadeh et la journaliste française Flore Olive se rendent au Kurdistan irakien où la résistance contre Daech s’organise dans les villages Yézidis (une minorité religieuse monothéiste) de Dihuk et Zakho. Des femmes combattantes, âgées de 16 à 30 ans, se préparent à se battre contre les jihadistes qui ont exécuté, violé ou réduit en esclavage des membres de leur famille, depuis l’offensive menée contre leur village sur le mont Sinjar, en août 2014. Elles constituent la première brigade de combattantes yézidies : l’YPS.

Elles n’ont pas d’autres choix que de prendre les armes. « Au sol, il n’y a pas grand monde. Les forces internationales agissent par les airs », rappelle Flore Olive. « Le courage de ces jeunes femmes, de celles qui se battent sur le terrain comme de celles qui tentent de se reconstruire pour continuer à vivre, a été une source d’énergie et d’inspiration », explique Alfred Yaghobzadeh. « Elles ont été faciles à photographier, ce qui n’était pas le cas des femmes ayant été captives et violées. C’est une question d’honneur. » Selon Flore Olive, près de 3 500 femmes et enfants yézidis sont encore détenus par Daech.

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Nancy Borowick : « Ma vie personnelle et professionnelle ont fusionné » 

Howie parle des fauteuils « duo » dans le cabinet de l’oncologue où ils font leur chimiothérapie hebdomadaire. Howie et Laurel sont mariés depuis 34 ans. Greenwich, Connecticut, janvier 2013. © Nancy Borowick

Howie parle des fauteuils « duo » dans le cabinet de l’oncologue où ils font leur chimiothérapie hebdomadaire. Howie et Laurel sont mariés depuis 34 ans. Greenwich, Connecticut, janvier 2013. © Nancy Borowick

Nancy Borowick présente à Visa pour l’image l’exposition « Le cancer, une histoire de famille ». Une série de photos en noir et blanc de ses parents, atteints de cette maladie. Photojournaliste, l’Américaine raconte leur combat en attendant la mort. Interview.

Pouvez-vous nous expliquer cette photographie qui ouvre l’exposition ?

Nancy Borowick : « La première photographie représente mes parents qui sont en chimiothérapie. Je leur rendais visite pour être à leur côté. Mais c’était très dur de les regarder car ce sont mes parents. Ensuite, je me suis dit : « Je suis photographe ». Et j’ai vu la symétrie de l’image. J’ai dû penser à une composition. Je me suis servie de ça pour me détacher de la réalité. »

Vos parents étaient-ils gênés par votre appareil photo ?

« Cela ne leur posait aucun problème. Il y a des moments où mon père me disait : « Tu es encore en train de prendre des photos ! » Mais il sentait que si cela pouvait aider des gens à s’en sortir, cela valait le coup. Mes parents savaient qu’ils étaient en train de mourir. Ils n’avaient rien à perdre. D’une certaine manière, ils m’ont donné beaucoup en faisant ça. D’autres personnes ont pu en profiter. Chacun cherche un sens à sa vie avant de mourir. J’imagine que c’est le but qu’ils s’étaient fixés. »

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Visa pour l’image, un coup de projecteur qui dure

Diana Zeyneb Alhindawi vient d'être récompensée du Visa d’or humanitaire du Comité international de la Croix-Rouge.

Diana Zeyneb Alhindawi a reçu mercredi soir le Visa d’or humanitaire du Comité international de la Croix-Rouge. © CAROLINE MALCZUK

Que deviennent les lauréats de Visa pour l’image, après avoir reçu leurs prix ? Tous poursuivent les projets engagés grâce à l’argent reçu. Mais le festival est aussi et surtout le moyen d’acquérir une notoriété. Car les jeunes photographes, habituellement derrière leur appareil, sont soudain mis sur le devant de la scène.  

Pour certains, l’impact a été immédiat. En juin 2015, Diana Zeyneb Alhindawi apprend qu’elle est lauréate du Visa d’or humanitaire du Comité international de la Croix-Rouge pour son travail sur le procès pour viol à Minova de militaires de la République démocratique du Congo. Les mois suivants, ses photos ont été publiées dans Paris Match, The Toronto Star, sur Newsweek.com. Elles sont actuellement visibles à Visa pour l’image, à Perpignan. Cette travailleuse humanitaire, qui était basée en République démocratique du Congo au moment de la prise des clichés, fait de la photographie professionnelle depuis deux ans. Elle ne s’attendait pas à gagner . « Je ne réalise pas encore ! Je n’étais pas du milieu. J’ai juste envoyé mon travail. Je voulais que les gens sachent ce qu’il se passait. J’ai été surprise quand j’ai reçu l’appel. » Ce prix lui a été remis en main propre mercredi soir.

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Pascal Maitre sur « l’autoroute » du fleuve Congo

Pascal Maitre a réalisé ce reportage sur le fleuve Congo pour le magazine National Geographic. Le photojournaliste français s'est rendu quatre fois sur place.

Pascal Maitre, à l’issue de sa conférence à Visa pour l’image, jeudi 3 septembre. © Benjamin CHAUVIRE

Pour le magazine National Geographic, Pascal Maitre a remonté le fleuve Congo à plusieurs reprises en 2013. Il nous raconte le quotidien à bord des imposantes embarcations, véritables vecteurs d’une économie régie par ce cours d’eau légendaire. 

« Je veux juste montrer ce que j’ai vu. » Sans parti pris. Le photojournaliste français Pascal Maitre est un habitué de l’Afrique et du festival Visa pour l’image à Perpignan, où il expose pour la huitième fois. Le Soudan, l’Erythrée, le Cameroun, la Somalie, Madagascar : autant de reportages qui ont construit sa vision du continent et qui l’ont amené à s’intéresser plus particulièrement au fleuve Congo en 2013. Alors qu’il présente son exposition à Perpignan, le photojournaliste tient à mettre en garde : « Il ne faut pas cantonner le continent à la guerre, les tribus, la nature. » L’Afrique, c’est aussi et surtout, pour lui, un potentiel économique.

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03 Sep

Tchernobyl, une ville touristique comme les autres

Pendant leur journée de visite dans la zone d’exclusion, les touristes ont quelques minutes pour se prendre en photo devant le sarcophage entourant le réacteur numéro 4.  Pripyat, Ukraine, 2013. © Gerd Ludwig / National Geographic Creative / National Geographic Magazine

Pendant leur journée de visite dans la zone d’exclusion, les touristes ont quelques minutes pour se prendre en photo devant le sarcophage entourant le réacteur numéro 4. Pripyat, Ukraine, 2013.© Gerd Ludwig / National Geographic Creative / National Geographic Magazine

Le photojournaliste allemand Gerd Ludwig se rend régulièrement à Tchernobyl depuis plus de 20 ans. Son travail actuel, exposé à Visa pour l’image, se concentre sur un aspect peu abordé : le tourisme nucléaire, pratiqué dès 2011 sur le site ukrainien.

Les Américains appellent cela le « ruin porn ». Autrement dit, la fascination pour les ruines et les paysages dévastés. Une tendance que revendique Gerd Ludwig. « En tant que journaliste, nous avons une attirance pour les scènes post-apocalyptiques », explique-t-il en déambulant le long de son exposition Tourisme nucléaire. C’est accidentellement que le photographe allemand a débuté un travail de longue haleine sur le site nucléaire de Tchernobyl et la ville fantôme de Pripyat. « En 1993, National Geographic m’avait chargé de réaliser un reportage sur la pollution en ex-URSS. J’ai passé plus de temps que prévu à Tchernobyl : c’est devenu une histoire dans l’histoire. »

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Edouard Elias : « Ils sont tous réunis autour d’une figure charismatique »

Durant le mois d’août 2014, Edouard Elias, photojournaliste français de 24 ans, a suivi la Légion étrangère en Centrafrique. Il a partagé le quotidien des soldats fait de combats mais aussi de moments d’attente, de réflexion et de partage. Il nous fait revivre son travail grâce à une photo prise en arrivant à la base de Bria.

STEPHEN CROZET et LUCIE PUYJALINET

02 Sep

Adrienne Surprenant : « J’aurais pu être arrêtée par la police »

En décembre 2014, la photographe québécoise Adrienne Surprenant est au coeur des manifestations au Nicaragua contre la construction d’un gigantesque canal interocéanique. Les autorités les répriment violemment et arrêtent les protestataires. La photographe nous détaille l’histoire d’un cliché pris pendant ces évènements, juste avant les arrestations. Il fait partie de l’exposition En attendant le canal au Nicaragua, au Couvent des minimes.

AMANDINE LE BLANC & LUC GALLAIS

La leçon de photojournalisme d’Andres Kudacki

Le photojournaliste Andres Kudacki au palais des congrès mardi 1er septembre 2015, à l'occasion de Visa pour l'Image. © Camille Hispard.

Le photojournaliste Andres Kudacki au Palais des congrès, mardi 1er septembre 2015, à l’occasion de Visa pour l’Image. © Camille Hispard

Andres Kudacki a donné une leçon de photojournalisme à son public dans le cadre des rencontres de Visa pour l’image 2015, mardi matin, au Palais des congrès de Perpignan.

Ne pas aider, ne pas susciter de faux espoirs. Andres Kudacki met un point d’honneur à ne pas influencer les scènes qu’il photographie. « Je leur disais que mon objectif était de témoigner, d’être le plus invisible possible », explique-t-il aux festivaliers de Visa pour l’Image. Il parle là des Espagnols menacés ou victimes d’expulsions et d’expropriations qu’il a suivis, à Madrid, ces trois dernières années. Une manière de traiter la crise financière qui fait l’objet d’une série de photographies dont certaines sont exposées à Visa pour l’image cette année, à l’église des Dominicains.

« Je souhaitais parler de l’intimité de ces familles pour montrer leur attachement à leur maison et la gravité de la perte de leur logement », raconte-t-il. Le photojournaliste se trouve confronté à des situations de détresse, se refusant toujours d’intervenir. Car il tient à être « honnête et sincère» dans ses photographies, à être le plus crédible possible auprès du public « pour que la société puisse croire au travail que je réalise », explique-t-il.

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01 Sep

Jean-François Leroy : « La presse n’est plus le seul revenu des photojournalistes »

Jean-François Leroy, Directeur Général du festival Visa pour l'image © Jean-Louis Fernandez

Jean-François Leroy, Directeur Général du festival Visa pour l’image © Jean-Louis Fernandez

Années après années, Jean-François Leroy, le directeur fondateur du festival Visa pour l’image, ne perd pas de son franc-parler. Absence d’exposition du World Press Photo, arrivée du Centre de international de photojournalisme de Perpignan, il revient sur l’actualité chargée du festival.

Dans votre édito, vous dites que la nouvelle génération de photojournalistes doit trouver d’autres débouchés que la presse. Sans la presse, est-ce que l’intérêt du métier est le même ?

Jean-François Leroy : « Les photojournalistes sont confrontés à un relatif désintérêt de la presse. Tout le monde rêve évidemment d’une double page dans le New York Times ou dans Match. La presse reste la quête du Graal mais des journaux paient une demi-page entre 60€ et 80€. Il faut donc trouver d’autres moyens de vivre. »

Comment fait-on pour s’en sortir quand on est un jeune photojournaliste ? Internet ?

Jean-François Leroy : « Il faut avoir un papa très riche… Sans blaguer, Internet ne génère pas de revenus. Il nous faudrait le Steve Jobs du photojournalisme. Il y a 15-20 ans tout le monde piratait sa musique. Il est arrivé avec son idée magnifique d’iTunes et, aujourd’hui, pirater n’a plus beaucoup d’intérêt. En photo, ça n’existe pas encore. Je crois que les jeunes photojournalistes ont compris que la presse ne serait plus leur seule source de revenus. Ils se tournent vers le corporate, l’institutionnel et l’humanitaire. Pour les aider, à Visa, on a créé des prix. Nous distribuons plus de 133 000€ de prix cette année. »

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