Pour la seconde année, l’AAPPMA d’Ornans a décidé de ne pas remettre de truites arc-en-ciel dans la Loue à l’occasion de sa fête annuelle. Un bassin va donc être installé sur la place Courbet demain samedi à partir de 10h30. Plus de 100 truites seront à pêcher pour être ensuite dégustées chez soi. Une buvette est aussi prévue. L’occasion pour l’association de pêche de remplir un peu ses caisses, les ventes de cartes de pêche diminuant ces dernières années.
En mars dernier, le groupe d’experts mandaté par le comité des sages recommandait de ne pas avoir recours au repeuplement en raison des risques sanitaires et génétiques. Cette question fait d’ailleurs débat chez les pêcheurs. L’introduction de truites arc-en-ciel peut poser des problèmes, ces poissons d’élevage peuvent introduire des bactéries dans les rivières et si ils ont le temps de devenir adultes , ils peuvent manger les petites truites Fario…
Les gammares sont très utiles pour mesurer la qualité des eaux.
Connaissez-vous les gammares ? Ce sont des invertébrés qui vivent tout le temps dans l’eau, ils sont donc de bons indicateurs pour la qualité de l’eau. Ils se nourrissent d’algues d’où leur rôle important pour l’équilibre des rivières. Deux agents de l’Onema, Michaël Prochazka (en retraite) et André Rousselet (bientôt en retraite) ont eu l’idée de faire une étude comparative pour montrer les dégâts des insecticides sur cette microfaune.
En avril dernier, à la demande du collectif Loue et rivières comtoises, ils ont publié sur Youtube cette video qu’ils avaient réalisée en mars 2011. La démonstration est implacable : en une heure, une simple sciure récupérée dans une scierie puis jetée dans une bassine d’eau suffit pour tuer tous les gammares. Les scieries sont de nouveau pointées du doigt. Pour conserver leur résineux, elles les plongent dans des bacs qui contiennent des insecticides et des fongicides en forte concentration.
Comme pour les autres activités humaines dans la vallée, des actions de prévention et des contrôles sont effectués mais il y a toujours un mais… L’Adib (Association régionale pour le développement de la forêt et des industries du bois en Franche-Comté ) a effectivement utilisé une première version de cette video sur ce thème pour alerter ses adhérents sur la toxicité des produits employés mais…toutes les scieries ne sont pas adhérentes à l’Adib et seules les installations soumises à autorisation sont soumises à contrôle. En 2009, cette opération de sensibilisation a concerné une quarantaine de scieries de résineux dans le Doubs et le Jura. La plupart de ces professionnels ne savaient que le traitement du bois pouvaient avoir un tel impact. Il y a un autre «mais» : Si des précautions sont bien prises par les grosses scieries, le traitement directement en forêt n’est absolument pas contrôlé… sans parler de tous les particuliers qui traitent leurs volets ou même leurs rosiers ( ce sont les mêmes matières actives m’a-t-on expliqué).
Dans son rapport, le groupe d’expert du comité des sages s’appuie sur l’étude de l’hydrobiologiste Olivier Adam (2008). Cette «étude démontre que les communautés aquatiques sont susceptibles d’être exposées de façon chronique aux produits de préservation du bois, y compris les organismes vivant plusieurs kilomètres en aval de l’aire de traitement.» et dans leurs recommandations, les experts concluent : «les données disponibles sur les polluants toxiques susceptibles d’être présents dans l’écosystème sont incomplètes. Notamment, aucune information n’est disponible concernant, par exemple, les herbicides ou les micropolluants résultant des activités de traitement du bois.»
Olivier Adam a justement mis au point un indicateur pour alerter de la présence de micropolluants dans l’eau des rivières. Cet outil qu’il a développé pour sa thèse utilise les gammares, il ne «permet pas de quantifier les micropolluants mais les détecte à des concentrations que l’on ne peut pas mesurer chimiquement» et d’après Olivier Adam, il a l’avantage d’être «simple et peu coûteux». Un outil existe mais…il n’est pas encore utilisé.
Enfin, un de mes nombreux interlocuteurs (j’ai mis un temps fou pour écrire cet article !) m’explique qu’il existe un projet de recensement de toutes les activités industrielles sur le bassin versant de la Loue. Un travail qui pourrait être réalisé par les Chambres de Commerce et d’Industrie du Doubs et du Jura. Mais…renseignement pris, cette action n’est pas du tout financée donc pas du tout à l’ordre du jour dans le Doubs. Dommage, c’était un bon début mais…
Rarement un peintre n’a autant peint sa terre natale. Falaises, pans de calcaires sont souvent en arrière-fond des toiles. Et ce ne sont pas des paysages inventés, ils sont bien réels ! Le ruisseau du Puits noir, la grotte Sarrazine, la roche Bottine sont aisément reconnaissables pour celui qui sait observer la Vallée. C’est le cas de Pascal Reilé. Natif d’Ornans ( sa famille y vit depuis au moins trois générations, c’est dire…) , cet hydrogéologue connaît aussi bien les sous-sols de ce bassin versant que ses paysages. Il a grandi à deux pas du musée et a appris tout naturellement à décrypter l’œuvre du Maître d’Ornans.
Trait d’union
Avec un tel bagage, c’est plutôt facile pour lui d’écrire le trait d’union entre l’œuvre, la vie de Courbet et la vallée d’aujourd’hui. Il y a tout juste un an, à l’occasion de la réouverture du musée Courbet, le département du Doubs a demandé à Pascal Reilé de réaliser des « Sentiers de Courbet » . Quatre parcours sont désormais disponibles. Vous pouvez les consulter sur le site internet du musée Courbet ou les trouver directement à Ornans. Pour le tournage de notre page été diffusée prochainement sur France 3 Franche-Comté nous lui avons demandé de nous guider sur les pas de Courbet. Un parcours quasi-initiatique.
«Vers le sud, point n’était besoin de mur de bois ni de pierre : la tour seigneuriale déploie ses ailes dépareillées au sommet d’une falaise abrupte au pied de laquelle coule la Loue. La tranquille rivière continue de lécher l’escarpement rocheux, s’appliquant à dessiner depuis toujours les mêmes boucles vertes sur la terre.»
Avec "Du domaine des murmures", Carole Martinez a remporté le Goncourt des lycéens 2011.
A peine quelques pages tournées, et le lecteur s’engouffre dans cette fable romanesque. Que nous aimions la Loue ou pas, «Du domaine des murmures» est à lire. Son auteur, Carole Martinez, nous emmène dans une histoire à peine croyable de demoiselle emmurée à vie. Esclarmonde vit au XII ième siècle dans le comté de Bourgogne à Hautepierre, là où se faufile encore aujourd’hui la Loue. Au fil des pages, la rivière endosse son rôle de cours d’eau mystérieux où les hommes vont se perdre. Pourquoi avoir choisi la vallée de la Loue ? Pour ces falaises et sa rivière en contrebas. Carole Martinez n’a jamais mis les pieds dans la vallée ! Tout est imaginaire et pourtant si proche du réel.
J’ai passé un moment délicieux à écouter cette auteur me raconter comment elle était tombée sur la vallée de la Loue. Pour ancrer son château sorti de ses rêveries, Carole Martinez cherchait une forêt escarpée avec rivière en contrebas. Après des heures sur Google Earth, elle finit par chercher dans des guides de varappe… Bingo ! Le charme de la Loue a vite opéré. «Déjà, rien que le nom de la Loue est splendide, m’explique-t-elle. Et puis cette idée de la source de la Loue peinte par Courbet en lien avec l’Origine du monde.. Comme je parle du féminin, cette Loue si féminine me convenait bien, il fallait que je pose mon château là !»
Mouthier Hautepierre, photographié par Jean-Claude Gagnepain.
De fil en aiguille, ce qui au départ ne devait être qu’un chapitre du roman, prend de l’ampleur, embarque Carole Martinez. «Je me laisse surprendre, c’est un peu comme un voyage. Je sais où je veux aller mais ce n’est pas organisé. Je me laisse happer par ce que je rencontre en cours de route». La personnalité d’Esclarmonde, les légendes franc-comtoises de la Dame Verte, du cheval Gauvin, de la jument d’Amaury, de Berthe de Joux, nourrissent l’imaginaire de Carole Martinez. «J’ai inventé comment la fable de la Dame Verte était née, j’aime montrer la force de l’imaginaire populaire. Les histoires qui tiennent ont été inventées par cette force là.» L’écrivain préfère imaginer plutôt que d’être déçue par le réel alors viendra-t-elle arpenter les abords de la Loue ? Des lecteurs lui ont déjà envoyé des photos de Mouthier Hautepierre et elle ne semble pas déçue ! Ses trois prochains romans devraient toujours se passer autour de son château imaginaire de Hautepierre mais cette fois-ci aux XIV ième, XVI ième et XXI ième siècles… C’est promis, si d’ici là, Carole Martinez ose s’aventurer dans le réel, je l’emmènerais flâner au bord de la Loue.
Comme nous vous l’annoncions il y a quelques jours sur le site internet de France 3 Franche-Comté, le collectif SOS Loue et rivières comtoises a réagi à l’étude du laboratoire de Neuchâtel annonçant la découverte d’un champignon qui pourrait expliquer les mortalités de poissons dans le Doubs et la Loue. Voici le communiqué intégral.
Tranquillement, sans slogan scandé mais la colère rentrée, le défilé a traversé le village de Jeurre. Cette année, les défaillances des stations d’épurations ont été pointées du doigt par les organisateurs de la manifestation. Charles Varenne, le président de l’AAPPMA La Biennoise a recensé 46 rejets d’eaux usées directement dans la Bienne. Ce type de rejets est interdit dès qu’il y a un réseau dans le village. Le collectif SOS Loue et rivières comtoises et l’association de pêche la Biennoise ont voulu « mettre les élus devant leurs responsabilités » en les invitant à participer à une table-ronde en marge de la manifestation. Les maires de Jeurre, Vaux-les-Saint-Claude, Molinges et Saint-Claude ont répondu à cette invitation, ils ont été rejoints plus tard par Marie-Christine Dalloz, députée du Haut-Jura. Les échanges ont été cordiaux. En fait, les élus présents sont ceux qui ont bien conscience des défaillances de leurs stations d’épurations. Ils ont entrepris des travaux mais il faut monter des dossiers, trouver des financements, faire des études… En fait, comme pour les autres sources de pollution, des actions sont entreprises, des sommes importantes sont investies mais la détérioration du milieu est tellement ancienne et profonde que les résultats ne se voient pas forcément. Le temps des échéances politiques n’a rien à voir avec le temps de l’environnement.
L'affiche de la manifestation de Jeurre du 2 juin 2012 dans le Jura
C’est malheureusement devenu un rituel printanier. 2010 Ornans, 2011 Goumois et … 2012 Jeurre. Malheureusement car ce sont les mortalités de poissons dans la Loue, le Doubs franco-suisse et cette année la Bienne qui sont à l’origine de ces manifestations. Cette fois-ci, c’est L’APPMA La Biennoise qui organise ce rassemblement avec le soutien du collectif SOS Loue et rivières comtoises. Nouveauté cette année, une table-ronde avec des élus est prévue à 14 heures avant la manifestation de 15 heures . Les organisateurs n’ont pas choisi leur date au hasard. A une semaine des législatives, ils espèrent obtenir des élus présents des engagements pour améliorer la qualité de l’eau en les « mettant devant le fait accompli ». Le débat sera certainement intéressant d’autant plus que la pollution de la Bienne est surtout due aux problèmes domestiques. Dans ce secteur, le fonctionnement des stations d’épuration laisse à désirer.
La député sortante Marie-Christine Dalloz (UMP) et son adversaire du Front de Gauche Francis Lahaut, le maire de Saint-Claude ont annoncé leur participation à la table-ronde. les maires de Jeurre, Vaux-les-Saint-Claude seront également présents.
A Ornans, l’enterrement de la Loue avait rassemblé 300 personnes, environ 800 manifestants s’étaient déplacés à Goumois. Cette année, les organisateurs souhaitent mobiliser encore plus et espèrent que des non pêcheurs viendront exprimer leur ras-le-bol du mauvais état de santé des rivières.
Thierry Chauffour et Jean-Pierre Grandidier ont rencontré Françoise Pozet, vétérinaire biologiste du laboratoire départemental d’analyses de Poligny qui a contribué à l’étude de l’université de Neuchâtel sur le rôle du champignon Saprolegnia parasitica dans la mortalités des poissons du Doubs et de la Loue. Georges Lauraine, le président de la fédération de pêche du Doubs réagit à cette étude. Pour lui, il ne faudrait pas que cette annonce fasse oublier que les poissons souffrent également de la mauvaise qualité de l’eau.
Il ne faudrait pas que cela soit l’arbre qui cache la forêt. Cette maxime résume assez bien la réaction des experts français après la présentation, hier, des conclusions de l’Université de Neuchâtel. Certes, c’est une bonne nouvelle car c’est une avancée dans les recherches sur les causes de mortalité mais, pour Alexandre Cheval, garde-pêche de la fédération de pêche du Doubs, cette mise en évidence du rôle de ce champignon dans la mortalité des poissons de la Loue et du Doubs, est plutôt une « conséquence » de la détérioration du milieu.
Les services de l’Etat insistent aussi sur ce point. Ce champignon n’est pas la cause unique de ces mortalités de poissons constatées depuis 2009 et il ne faudrait pas que les résultats de cette étude suisse conduisent à abandonner toute action visant à améliorer la qualité de l’eau.
Confirmation de Françoise Pozet, vétérinaire biologiste au laboratoire départemental d’analyses basé à Poligny; les causes de mortalité sont multiples et celle avancée par l’Université de Neuchâtel n’est peut être pas celle à mettre en avant. Françoise Pozet a fourni aux chercheurs suisses des prélèvements réalisés sur des poissons de la Loue. La scientifique précise que l’étude n’est pas finie, d’autres étapes sont encore nécessaires avant de valider définitivement cette piste. Et pour cette vétérinaire, « c’est toujours dangereux d’affirmer aussi vite car il y a un risque de mauvaise interprétation. »
Les Français étaient bien au courant de cette étude menée de l’autre côté du Doubs. Dans le rapport national d’expertise publié en mars dernier, il est précisé qu’ « A ce jour, les éléments de caractérisation du pouvoir pathogène des Saprolegnia parasitica isolées à partir de poissons échantillonnés dans la Loue et le Doubs n’ont pas été finalisés. Cependant, les premiers résultats obtenus par des collègues suisses sur les génomes de plusieurs souches de ce champignon isolées dans les rivières du Jura, montrent que ces souches semblent présenter un caractère monoclonal (même origine génétique). Il pourrait donc y avoir eu, dans la Loue, ainsi que dans d’autres rivières de la région, l’émergence puis la dispersion d’une nouvelle souche ayant un pouvoir pathogène élevé. A ce jour, l’hypothèse de la survenue d’une épidémie bactérienne, virale, ou encore mycosique,comme étant à elle seule responsable des mortalités de poisson constatées, a été rejetée par le groupe d’experts sur la base des résultats d’analyses pratiquées par le LDA39 » , le laboratoire dont fait partie Françoise Pozet. D’où la prudence actuelle vis à vis de cette étude non seulement pour ne pas occulter l’impact du mauvais état des rivières sur la santé des poissons et aussi pour attendre les conclusions définitives de cette étude.
Les surmortalités de poissons ne seraient donc pas uniquement dues à un mauvais fonctionnement de la Loue comme l’avait annoncé le groupe d’experts mandaté par le comité des sages. Les chercheurs suisses ont gagné du temps dans leurs recherches grâce au travail des équipes françaises qui, elles, avaient réussi à écarter la piste des cyano-bactéries.
Le laboratoire de biologie du sol de l’université de Neuchâtel a isolé un agent pathogène appartenant au groupe Saprolegnia parasitica, souche hautement virulente. «Dans les trois rivières étudiées, tous les poissons malades étaient infectés par la même souche de Saprolegnia parasitica. On peut donc considérer que le pathogène constitue une population clonale, c’est-à-dire issue d’un seul et même clone. Un tel résultat plaide fortement en faveur de l’hypothèse d’une introduction récente de cette souche dans le milieu naturel.» explique les autorités fédérales dans leur communiqué. En clair, c’est l’homme qui aurait introduit ce champignon dans le Doubs, la Loue et la Sorne en Suisse. Des bottes de pêcheurs, de promeneurs, un canoë mais aussi l’introduction d’espèces exotiques, l’activité agricole… pourraient expliquer l’apparition de cet agent dans les rivières. C’est pourquoi les autorités piscicoles recommandent de désinfecter avec de l’eau de Javel ou de l’alcool, le matériel de pêche ou d’autres objets comme les canoës ayant été en contact avec les eaux de ces rivières.
Ce type d’agent n’est pas habituellement virulent mais «Le Saprolegnia qui se développe dans le Doubs, la Loue et la Sorne aurait également pu se transformer en une forme agressive suite à des modifications de l’environnement ou pour d’autres raisons inconnues.» Il touche des poissons déjà affaiblis par le mauvais état de la rivière.
Pour que les ombres, fortement touchés par ces mortalités depuis 2009, puissent se reproduire tranquillement, l’interdiction de pêcher cet espèce est désormais étendue au secteur jurassien du Doubs.
L’OFEV, l’office fédéral de l’environnement, a l’intention de surveiller la propagation de la maladie en cherchant cet agent dans d’autres rivières suisses. Il est important d’identifier les zones infectées pour tenter d’éradiquer cette épidémie.