02 Juin

Des histoires de pêche racontées par Nicolas Germain

Histoires de pêche, la truite en héritage de Nicolas Germain.

Histoires de pêche, la truite en héritage de Nicolas Germain.

C’est une histoire d’héritage, de transmission, d’amitié, de passion et accessoirement de pêche.. Les truites et les ombres ont beau être les vedettes des souvenirs racontés par Nicolas Germain, l’émotion provoquée par cette lecture vient surtout des relations humaines nouées par l’auteur.  Nicolas se décrit lui-même comme quelqu’un qui «voit des truites un peu partout, qui pense pêche à la mouche nuit et jour en prenant beaucoup de son temps pour assouvir sa passion, tout en s’engageant dans la vie quotidienne.» 


Nicolas Germain est le digne héritier d’Aimé Devaux et André Terrier, son blog est suivi par  de très nombreux pêcheurs. «Histoires de pêche» rend hommage à ces deux grands pêcheurs mais va beaucoup plus loin. Nicolas Germain nous confie combien l’Ain, sa rivière de prédilection, lui a apporté du réconfort lors de son adolescence.

«Je savais que quoi qu’il arrive, elle serait toujours là pour moi sans jamais me décevoir. Côté pêche, elle m’a déjà donné sans compter durant près de trente ans. J’ai vécu nombre d’aventures sur ces berges qui m’ont offert des émotions intenses, des rencontres extraordinaires, des instants de vie que je n’oublierai jamais. Et accessoirement, des milliers de truites et d’ombres.»

 L’auteur est né quasiment les pieds dans la rivière. Chez les Germain, on pêche de père en fils.. Les journées d’ouvertures sont plus des prétextes à de joyeuses fêtes qu’à la pêche en elle-même.

 Mais ce qui pourrait n’être considéré que comme «accessoire» comparé aux relations humaines est aussi succulent à lire. Il s’agit de combats, de duels faits de ruse, d’énergie, d’expérience et de patience. Bien sûr, Nicolas Germain utilise des termes qui me sont complètement inconnus.. «Le combat en dix-huit centièmes», «Le vairon manié», «une pointe en quatorze», «zizater», «marsouiner», «patasser». Peu importe, je pense avoir compris l’essentiel. Mine de rien, il y a des truites intelligentes, surprenantes, imprévisibles, déroutantes… Une découverte pour moi ! Pêcher, c’est le contraire de la routine. A chaque fois, la surprise est au bout de la ligne et c’est cela aussi qui plaît à Nicolas Germain.

 «C’est souvent sa difficulté alliée à l’intelligence exceptionnelle d’un poisson qui rend un coup de ligne plus inoubliable que les autres. Dans ces cas là, les mensurations du poisson sont secondaires.. Une truite qui prend bêtement ma mouche ou ma nymphe et ce , même en acceptant des erreurs techniques de ma part me gâche mon plaisir. Il faut un tout pour que les émotions soient hors normes.»

En fait, les pêcheurs de la trempe de Nicolas Germain sont des sentinelles de la rivière. Plutôt qu’un combat avec un ennemi, le pêcheur entame un dialogue musclé et sans concession avec une amie. Et comme en amitié, le temps passé ensemble est primordial.

 «Pour moi, une saison de pêche sur la rivière d’Ain commence dès le lendemain de la fermeture. Le repérage des truites, de leurs habitudes, des postes de chasse préférentiels,   des caches et de tout ce que je peux apprendre sur elles m’a tous les ans permis de prendre de nombreuses truites au printemps suivant. Comme si les poissons avaient un calendrier dans leurs petites têtes. Il faut les voir moins d’une semaine après le dernier jour de pêche reprendre possession de la rivière, se montrer de nouveau sans aucune méfiance, sans cette appréhension palpable du pêcheur.»

 Toutes ces heures passées au bord de l’Ain, Nicolas Germain les partagent le plus souvent possible avec son fils Thibaut. A mes yeux, les plus beaux passages du livre sont ceux où l’auteur nous décrit les parties de pêche avec lui.

 «Oui, c’est le mot bonheur qui me vient à l’esprit lorsque je me remémore cet instant, ces quelques secondes qui ont suivi la mise à l’épuisette, une communion sans précédent entre Thibaut et moi, quelque chose d’incroyablement fort. Comme un passage de témoin entre un père et son fils».

Un jour, le fils a aidé le père à la voix. Le talentueux pêcheur a beau avoir l’expérience pour lui, la jeunesse a pour elle une vue infaillible… Cette fois-ci, Nicolas Germain ne pouvait observer la truite aussi bien que son fils. Alors un «duel à trois» s’est engagé. Imaginez le jeune garçon indiquant à son père les gestes précis à faire pour piéger la truite invisible. «La frustration de ne pas avoir vu ce poisson s’est transformée en pur bonheur.» Une magnifique scène de cinéma. Le film parlerait d’héritages…

 

Isabelle Brunnarius
Isabelle.brunnarius@francetv.fr