Dans sa lettre du 30 mars 1916, Léon Mortreux apparaît avec plus de sérénité et d’ardeur que dans ses courriers précédents.
Encore tout excité par sa nouvelle affectation, il raconte avec plaisir ses premières journées aux Zouaves.
Je continue à me plaire beaucoup dans mon nouveau régiment. J’aime les allures indépendantes et la franchise brutale de mes amis de Milly. Ils chantent des refrains typiques
Cela fait une semaine que le sergent Mortreux a rejoint le centre d’instruction à Milly.
Dans sa correspondance de guerre, il partage sa fierté de faire partie du 1er Régiment de Marche des Zouaves à l’histoire singulière … les Zouzous comme les appellent les habitants de Milly.
Le Zouzou Léon Mortreux évoque même sa mort sans crainte.
Si je tombe au front, ça fera très bien sur la plaque commémorative de Béthune d’y lire à côté de mes frères « Sergent Mortreux du 1er Zouaves ».
Mais ce n’est pas le jour. En cette fin mars 1916, dans ce centre d’instruction à Milly, Léon multiplie les exercices de défenses et d’attaques de tranchées … dans l’attente de rejoindre les troupes du 1er R.M.Z sur un des fronts de la bataille de Verdun.
Lettre de Léon Mortreux envoyée à Fernand Bar le 30 mars 1916
Dans sa lettre, Léon Mortreux décrit son nouvel uniforme. Il semble regretter de ne pas avoir « la tenue des anciens zouaves, mais une tenue kaki et un pantalon de velours »
Correspondance de guerre il y a cent ans …
30 mars 1916
Milly (Seine-et-Marne)
1er ZouavesCher Oncle,
Tu n’auras pas été sans recevoir ma carte postale et mon mot de Paris te confirmant mon entrée aux Zouaves. Je continue à me plaire beaucoup dans mon nouveau régiment. J’aime les allures indépendantes et la franchise brutale de mes amis de Milly. Ils chantent des refrains typiques.
Si je tombe au front, ça fera très bien sur la plaque commémorative de Béthune d’y lire à côté de mes frères « Sergent Mortreux du 1er Zouaves ». Je n’ai pas besoin de médaille comme attestation de bravoure.
Dis-moi comment tu vas là-bas à Béthune et comment se comportent les artilleurs Boches des environs.
D’ici nous n’entendons que les coups de canons que tirent de Fontainebleau car Milly n’est qu’à 18 km de cette ville et est située au confins haut de la forêt. C’est un beau chef-lieu de canton de 2500 habitants. Nous y serons fort à l’aise bien.
Bien que cantonné sur la paille, nous y sommes bien. Nous n’avons pas de mess mais mangeons dans un café-estaminet comme nous ne touchons plus le prêt franc comme au 46è il s’ensuit que nos porte-monnaie se portent plus mal.
Je t’adresserai probablement un appel de fonds vers les 15 avril car je pense qu’à cette époque nous serons encore dans le Centre d’Instruction dont Milly est la localité principale (Il y a un Lieutenant Colonel)
J’ai appris que la Classe 17 des Zouaves qui est maintenant à Rueil va venir dans le Centre pour le 15 avril. Cela signifie probablement pour nous un sérieux déménagement.
Nous faisons des exercices d’attaques et défenses de tranchées, exercices beaucoup plus intéressants que ceux que nous faisions au 46è.
Comme vêtement nous n’avons pas la tenue des anciens Zouaves mais une tunique kaki et un large pantalon de velours. On nous donnera à St-Denis, avant de partir un pantalon assorti de couleur à la tunique.
Les camarades de la Classe 17 du 46è sont, depuis mon départ, partis en grande majorité au 31è et au 46è au front. J’espère te lire bientôt et t’embrasse ainsi que Martial quand tu le verras.
Ton neveu reconnaissant
LéonCompliments à Marie et Jeanne