09 Août

Faut-il encore pêcher dans la Loue ?

Truite photographiée par Nicolas Germain

«Caresser une jolie zébrée ou un bel ombre»... C’est le rêve de tout pêcheur venant en vacances dans la vallée de la Loue mais est-il encore réalisable ? Depuis les mortalités de 2010, la question se pose. L’idée de cet article est justement partie de cette interrogation postée par Bibi sur le blog de pêcheur «Gobages.com» :

Le post du touriste Bibi sur le blog Gobages.com

Bibi a été rapidement conseillé par des pêcheurs : c’est possible mais... Il vaut mieux prendre un guide, aller sur les parcours privés, ne pas trop regarder le fond de la rivière… Et même aller pêcher sur le Dessoubre ou le Doubs franco-suisse !

Une certitude, les truites et surtout les ombres se font rares surtout à Ornans, Cléron et Quingey. Les dernières pêches électriques organisées par la fédération de pêche du Doubs révèlent qu’il y a 70 à 80% de salmonidés en moins par rapport à 1998 sur ces secteurs. Ces résultats confirment ceux de l’ONEMA, réalisés en 2010.
Pour la Haute-Loue ( Montgesoye, Vuillafans, Mouthier-Hautepierre), c’est moins dramatique  :  40% de moins qu’en 1998.D’après Georges Lauraine, président de la fédération du Doubs, «le fonds de poissons se refait. Des lamproies de Planer, chabots ou vairons ont été répertoriés lors des récents comptages». Un signe encourageant pour les années à venir.

Le pêcheur Bibi doit aussi savoir qu’il ne peut pêcher qu’en no-kill (il faut relâcher le poisson), l’ arrêté préfectoral est toujours en cours. Certains secteurs sont également fermés à la pêche.

Arrete Loue Poissons Signe Cle14bb14
Depuis deux saisons, l’AAPPMA de Montgesoye a décidé de fermer la pêche. «On a constaté depuis longtemps la disparition du poisson, m’explique le président de cette société de pêche Jean-Marie Conche. Dans les statuts de l’AAPPMA, il est précisé que l’association doit défendre le milieu et maintenir le cheptel piscicole. C’est donc logique de rester fermer». Jean-Marie Conche n’approuve pas la technique du no-kill, pour lui, «cela ne fait qu’affaiblir les poissons et donc augmenter les risques de maladies». Jean-Marie Conche continue d’aller au bord de la Loue, juste pour observer… Sous le pont de Montgesoye, il ne voit qu’une quinzaine de truites. «Avant, il y en avait une centaine !» regrette le président. Et même si la pêche est fermée sur ce secteur, 55 cartes de pêches ont été vendues soit un tiers par rapport aux années avec ouverture. Un geste solidaire.

A Mouthier-Hautepierre et Lods, Bibi pourrait trouver son bonheur. Depuis l’ouverture, 122 cartes journalières ont été vendues. Un bon chiffre qui pourrait s’expliquer, selon Yvon Cattin, le président de L’AAPMA «La truite de Lods-Mouthier» par le «déplacement des pêcheurs qui remontent la Loue faute de poissons vers Cléron ou Ornans». Mais Attention, dans ce village, il y a deux associations de pêche !

A Vuillafans, la pêche a été ouverte de nouveau cette année mais «à part deux trois touristes, le reste du village ne pêche pas» me confie Daniel Poirot, le président de l’association de pêche du village. Daniel Poirot est, lui aussi, sceptique sur les vertus du no-kill alors il préfère s’abstenir. «A mon avis, il faut laisser les poissons tranquilles, cela fait deux ans que je ne pêche plus, poursuit-il. On a ouvert pour le tourisme mais à contre-coeur.» Les résultats de la récente pêche électrique n’ont fait que confirmer ses craintes : «Sur 250 mètres de rivière, on a trouvé une trentaine de truites et quatre ombres. Et seulement une dizaine de truites qui faisaient la taille …»

Le mot de la fin, j’aimerai le laisser à Bibi. Alors Bibi, si vous lisez cet article, merci de laisser un commentaire pour nous dire comment se sont passées vos vacances au bord de la Loue !

Isabelle Brunnarius

26 Juil

Pêche électrique à Cléron : « Nos pires craintes sont confirmées »…

La Loue est bel et bien entrain de devenir une « rivière-atelier », un cours d’eau dont l’évolution pourrait servir de référence pour le suivi d’autres rivières en France ou même en Europe. Depuis le début de la semaine, les pêcheurs des quatre fédérations de pêche de Franche-Comté épaulées par celle de l’Yonne, de Côte d’Or, de Saône-et-Loire et de l’Ain participent à une étude d’envergure pilotée par l’Université de Franche-Comté. Actuellement, la dernière étude de référence est celle du professeur Verneaux, elle date des années 70. Une autre a été réalisée entre 1998 et 2000. Bref, il est temps d’avoir des informations à jour et complètes ! Le recensement effectué ce jeudi à Cléron attriste Christian Rossignon, selon cet hydrobiologiste de la fédération de pêche du Doubs, les poissons comptés aujourd’hui « c’est un millième de ce que nous aurions du trouver aujourd’hui »…
L’étude du laboratoire de Chrono-environnement de l’Université de Besançon va se servir de ces comptages pour évaluer la faune de la Loue. Comme je l’expliquais dans l’article précédent, tout les facettes de la vie du bassin versant doivent être étudiées pendant trois ans sur le terrain puis analysées pendant deux autres années.
Voici le reportage réalisé par Stéphanie Bourgeot et Florence Petit.

18 Juil

L’Université de Franche-Comté et la fédération de pêche du Doubs au chevet de la Loue

La Loue va être auscultée sous toutes les coutures. Les chercheurs du laboratoire de chrono-environnement viennent de commencer leurs travaux. Annoncée depuis au moins un an, cette vaste étude prévue sur cinq ans a enfin commencé ces jours derniers.« Il s’agit,  m’a expliqué François Degiorgi, l’un des coordinateurs de cette étude, d’un travail pluridisciplinaire qui porte aussi bien sur le bassin versant que sur la rivière. L’objectif est de localiser les causes du mauvais état de la Loue puis de chercher à les relier à une spacialisation des effets dans la rivière« .

Programme Loue Université 02122011
Pendant une première phase de trois ans, une quinzaine de chercheurs va travailler sur le terrain pour cette étude. Ils sont chimistes, biologistes, géologues, pédologues; la plupart d’entre eux sont rattachés au laboratoire de chrono-environnement mais le laboratoire de géographie Théma, le museum d’histoire naturelle de Besançon, l’Université de Neuchâtel, le laboratoire d’analyse de Poligny prêteront également main-forte à l’équipe. Déjà des universitaires ont  prélevé des larves et des insectes adultes au bord de la Loue pour pouvoir évaluer la qualité du milieu de façon beaucoup plus précise que les indicateurs utilisés habituellement pour classer les rivières.

Autre partenaire de taille, la fédération de pêche du Doubs. Dès lundi, une soixantaine de pêcheurs est mobilisée chaque jour de la  semaine pour réaliser des pêches électriques afin d’effectuer de nouveaux inventaires piscicoles sur au moins huit stations de la Loue. Toutes les associations de pêche de la vallée, les fédérations de pêche des départements de Bourgogne et de Franche-Comté, le département de l’Ain ainsi que des bénévoles sont mobilisés la semaine prochaine.

Tout les amoureux de la Loue ont encore en tête les images des relevés piscicoles effectués, eux aussi à grand renfort de moyens et de médias par l’Onema en 2010. Alors, pourquoi recommencer et ne vaudrait-il pas commencer à agir concrètement pour diminuer les sources de pollution ?

« Pour que les politiques se bougent encore plus, il faut des preuves sur les origines de la pollution, m’explique Alexandre Cheval, garde pêche de la fédération du Doubs, cette étude va permettre d’affiner le tir, il nous faut des connaissances les plus fines possibles pour réajuster le tir. En 2010, l’Onema n’avait travaillé que sur quatre stations ».

Les « politiques » se sont déjà bougés en finançant cette étude qui coûte 360 000 euros pour la première phase. Environ 80% de  cette somme est prise en charge par l’Agence de l’Eau, le conseil général du Doubs et le conseil régional de Franche-Comté; le reste étant financé par l’Université de Franche-Comté.

De nombreuses études ont été réalisées ces vingt dernières années, pas forcément coordonnées. Tout l’enjeu de ce travail va être de savoir capitaliser les résultats déjà publiés et surtout d’identifier beaucoup plus précisément l’impact des activités humaines sur le bassin versant de la Loue. En 2015, la directive européenne sur l’eau devra être renouvelée. Les premiers résultats  de cette étude sur la Loue pourraient bien être examinés de près.  De ses malheurs, la Loue pourrait ainsi en tirer un petit bénéfice. La rivière, connue dans toute l’Europe par les pêcheurs à la mouche, pourrait se faire aussi une réputation auprès des milieux scientifiques en étant devenue un véritable laboratoire à ciel ouvert.

Isabelle Brunnarius

12 Mai

12 mai : l’interview intégrale de Christian Triboulet.

Le président de la société de pêche la Franco-Suisse Christian Triboulet était l’invité de notre journal du jeudi midi. il est également vice-président de la fédération de pêche du Doubs. Nous lui avons ensuite posé quelques questions à la suite de la réunion en préfecture du Doubs, présentant pour la première fois une étude complète de cette rivière.

12 mai : Premières mesures pour le Doubs franco-suisse.

Un an après l’avoir demandé, la fédération de pêche du Doubs a enfin obtenu que Français et Suisses se retrouvent ensemble autour d’une table pour se pencher sur les problèmes du Doubs. En mai 2010, des poissons avaient déjà été retrouvé morts dans le Doubs; la fédération avait alors adressé un courrier au président de la commission mixte franco-suisse et à la préfecture du Doubs pour demander une réunion. C’est chose faite…un an et une autre pollution plus tard ! L’intérêt d’avoir attendu est de disposer maintenant d’une enquête complète. L’Etablissement Public Territorial de Bassin Saône et Doubs a présenté la première étude globale du Doubs, des données compilées sur ces dix dernières années. A noter que cette étude a été engagée avant les premières mortalités piscicoles. Le constat n’est pas réjouissant.

Evidemment, comme pour les autres rivières, une fois ce constat assez affligeant dressé, le plus dur va être de mettre en place rapidement les mesures qui pourraient améliorer la santé du Doubs franco-suisse.

De nombreux points de pollution identifiés

Ce 12 mai en préfecture, élus et représentants franco-suisse du dossier ont donc pu prendre connaissance des points noirs de pollution domestiques (station d’épuration) et industriels. Ces causes de pollution sont plus nombreuses sur le bassin versant côté suisse qu’en Franche-Comté. L’activité industrielle y est plus importante notamment dans le secteur de l’horlogerie. Quant aux stations d’épuration de Villers le Lac et de Morteau, elles seraient en cours de travaux pour améliorer leur qualité de traitement.
Les sites et sols pollués ont également été répertoriés, là aussi une majorité en Suisse, autour du Locle et de la Chaux de Fonds. Le problème des rejets du traitement du bois des 118 scieries et exploitations de ce type a été mentionné. Enfin, les 700 exploitations agricoles (dont 537 en Suisse) peuvent également être source de pollution.

Des actions rapides pour réguler l’activité des barrages

Toutes ces sources de pollution potentielles peuvent être aggravées par le fonctionnement des barrages. La fédération de pêche du Doubs a apprécié que les différents exploitants des barrages reconnaissent leurs erreurs et que des engagements soient pris. Les habitats des poissons, la température de l’eau, tout cela peut être modifié en fonction des éclusées plus ou moins violentes. Ces éclusées, si elles sont trop fortes, peuvent augmenter le transit et le colmatage des sédiments ( et les risques éventuels de pollution). Il a été décidé d’interdire d’ouvrir les vannes de fond du barrage du Châtelot pour éviter de renvoyer dans le Doubs des sédiments éventuellement contaminés. La société d’exploitation s’engage à éviter de faire des pics de grosses éclusées. Pour le barrage du Refrain, EDF a reconnu une récente erreur de programmation et l’entreprise s’engage à ne pas refaire la même erreur. Enfin, le canton du Jura a demandé que l’amplitude de variation du niveau d’eau des écluses passe de 1 mètre à 20 cm maximum.

Vers un rétablissement du Doubs franco-Suisse ?

Des groupes de travail ont été mis en place pour maintenant établir un programme d’action. Il faudrait pouvoir rétablir par exemple une continuité écologique sur le Doubs et ses affluents pour favoriser la reproduction des poissons. Ces actions là doivent pouvoir être mises en oeuvre rapidement  Sur le Doubs, sur les 12 seuils ou barrage existants, 8 sont infranchissables..
Quant aux poissons, ils se raréfient… Des aprons, des chabots ont bien été recensés mais ces espèces patrimoniales sont en forte régression. Quant à la particularité franco-suisse du Doubs, est-ce un avantage ou un inconvénient ? D’un côté, les démarches administratives peuvent prendre plus de temps mais de l’autre cet aspect bi-national peut être une forme d’émulation. En tout cas, de part et d’autre de la frontière, la prise de conscience est réelle et le diagnostic est « partagé ».

29 Avr

29 avril 2011 : La fédération de pêche du Doubs surveille la Loue

Depuis quelques mois, trois opérations de surveillance de la Loue ont été mis en place par la fédération de pêche du Doubs avec l’aide financière de l’Agence de l’eau, du Conseil Général du Doubs et du Conseil Régional de Franche-Comté. Lors d’ une récente réunion à la fédération, les présidents des associations de pêche de la Loue ont pris connaissance des ces récentes actions.
Tout d’abord,  un suivi presque quotidien de la Loue à deux endroits précis doivent permettre de tenter de résoudre le paradoxe de la Loue. Des prélèvements d’eau ont lieu pour mesurer les taux d’azote et de phosphore d’une part sur la source du Maine (gros débit d’eau et bon indicateur des activités jusqu’au Valdahon et Etalans) et d’autre part à la source de Plaisir Fontaine à Bonnevaux-le-Prieuré (affluent de la Brême qui se jette elle même dans la Loue). Ces 90 analyses sont financées à 80% par l’Agence de l’eau et le Conseil Général du Doubs. Les 20% restants de cette étude évaluée à 30 000 euros sont pris en charge par les associations de pêche et la fédération. Ces analyses commencées fin février doivent se poursuivre en mai.

Deuxième action : l’étude et le suivi des végétaux au sens large à huit endroits sur la Loue (Mouthier, Ornans et Ruray) mais aussi le Doubs Franco-Suisse, l’Ain, le Cusancin, le Dessoubre et le Lison. Cette étude a été demandée par le groupe d’experts locaux pilotée par l’Agence de l’eau. Cela va permettre de suivre le développement des algues, des cyanobactéries et des végétaux supérieurs. Il s’agit de comprendre pourquoi les cyanobactéries se développent et les algues apparaissent. Ces analyses ont lieu de mi-mars à fin octobre et leur coût (85 000 euros) sont intégralement prises en charge par l’Agence de l’eau, le Conseil Régional et le Conseil Général du Doubs.
Premiers résultats intéressants : des cyanobactéries ont été recensées sur les rivières où il n’ y a pas de mortalité de poissons (Cusancin, Dessoubre et Lison), cela pourrait donc indiquer que les cyanobactéries présentes dans la loue l’an dernier ne seraient pas les seules responsables de la mortalité des poissons…

Troisième étude : La fédération va étudier le développement du tuf au fond du cours d’eau. Ce sont des sortes de croûtes calcaires liées à l’activité des cyanobactéries. Le milieu devient ainsi beaucoup moins habitable pour les invertébrés et les poissons comme le chabots et la Loche franche.