07 Juin

Après la coulée de pierres, un arrêté interdit l’accès « terrestre et souterrain » au massif du Granier

Il n’y pas de risques pour la population et les habitations, mais afin d’éviter des accidents complémentaires, les préfets de l’Isère et de la Savoie ont pris chacun un arrêté pour interdire l’accès à l’ensemble du massif du Granier.

© Fabien Hobléa, Edytem, CNRS-Université Savoie Mont-Blanc.

© Fabien Hobléa, Edytem, CNRS-Université Savoie Mont-Blanc.

A la suite des fortes précipitations qui se sont produites ces dernières 48 heures (50 à 60mm), des laves torrentielles (coulées de pierres et de boue) provenant des derniers éboulements du Mont Granier se sont déversées sur la route montant au col (RD285A), coupant la route en quatre endroits différents.


Images de la lave torrentielle

Une réunion s’est tenue en Préfecture de l’Isère, ce vendredi13 mai au soir, à laquelle ont participé les services de l’État, les pompiers, les Secours Spéléo, Météo-France, le Conseil départemental, les communes de Chapareillan et d’Entremont-le-Vieux et la Préfecture de Savoie.

A l’issue, il a été décidé d’interdire l’ensemble des activités de randonnée, spéléologie, manifestations sportives et de travaux forestiers sur l’ensemble du massif.

zone interdite granier

Devant les différents risques liés à ce phénomène géologique, « chacun doit faire preuve de vigilance et respecter les consignes de sécurité sous peine de poursuites ».

Il est donc conseillé d’éviter tout déplacement dans les secteurs concernés et de respectez, en particulier, les déviations mises en place.

Dès que les conditions météo le permettront, le Conseil départemental de l’Isère interviendra afin de détourner la lave torrentielle en aval de la route et de purger les dépôts.

Des experts vont procéder à une nouvelle inspection de l’ensemble du site.

reportage de Renaud Gardette et Dominique Bourget


POINT SITUATION DU GRANIER

Le Mont Granier n’en a pas fini avec le risque d’éboulements à Chapareillan (Isère)

A l’occasion d’une réunion qui s’est tenue à Chapareillan, la Préfecture de l’Isère a fait le point sur les risques d’éboulements au Mont Granier. Une importante écaille rocheuse menace encore la zone comprise entre Isère et Savoie. 

© @coz_sudest

© @coz_sudest

Cette réunion, qui a eu lieu lundi 9 mai, a rassemblé tous les services de l’État (gendarmerie, Direction Départementale des Territoires, service de Restauration des Terrains de Montagne), le SDIS, le Conseil départemental de l’Isère et la commune de Chapareillan.

La situation géologique

Après un éboulement de 15.000m³ sur la face Nord Est du Mont Granier, le 29 avril dernier, un nouvel éboulement de 30.000m³ s’est déroulé le 7 mai à une altitude de 1.800m.

Le diagnostic identifie désormais « un risque de nouveaux éboulements rocheux potentiel de plusieurs compartiments, de 40.000m3 et 10.000m3 avec différents degrés d’instabilité ».

Les menaces

• Aucune menace ne pèse sur les habitations
• La piste forestière en aval est susceptible d’être impactée directement par des chutes de pierres.
• En cas de pluie importante, la RD285 pourrait être impactée par des coulées de pierres provenant de l’éboulement.

Les mesures

RTM (Restauration des Terrains de Montagne) va poursuivre son suivi du phénomène géologique, notamment avec la pose de nouveaux instruments et la poursuite des prises de vue en lien avec la base d’hélicoptère de la Sécurité civile.

En complément des arrêtés municipaux de Chapareillan et d’Entremont-le-Vieux, « des interdictions complémentaires vont être prises sur l’activité de spéléologie sur l’ensemble du Mont Granier, avec des contrôles de la gendarmerie nationale. Les manifestations sportives sont déconseillées sur la voirie et les chemins environnants ».

Eboulement du Granier: vos photos et vidéos

Le 7 mai dernier, plusieurs dizaines de milliers de m3 de roches se sont détachés de la face nord du Mont Granier aux confins de l’Isère et de la Savoie. L’événement, très impressionnant, a été filmé et photographié par de nombreux témoins.

© @coz_sudest

© @coz_sudest

L’équipe de télépilotes de drones d’Acl Process a filmé en direct l’éboulement du Granier à 8h34.
Cette prise de vue a été mise à la disposition des spécialistes en risques naturels.

 


Savoie/Isère: nouvel éboulement au Mont Granier, le « plus gros » depuis le début de l’épisode

Ce samedi 7 mai au matin, le Mont Granier est entré dans une nouvelle phase d’éboulement. Il s’agit du plus gros épisode depuis le 8 janvier, date de la précédente chute de roches. Aucun dégât n’est à signaler mais les habitants du secteur évoquent un panache de fumée « très impressionnant ».

© Pompiers de Savoie Les chutes de rochers ont commencé à partir de 8h 30 ce samedi 7 mai.

© Pompiers de Savoie Les chutes de rochers ont commencé à partir de 8h 30 ce samedi 7 mai.

Depuis 8h30, aux confins de l’Isère et de la Savoie, le Granier connaît de nouveaux éboulements. Il s’agit, selon les pompiers de Savoie et le CNRS, du plus gros épisode de chutes de rochers depuis la nuit du 8 au 9 janvier 2016, date à laquelle la montagne s’était déjà effondrée de façon impressionnante

Reportage de Françoise Guais, Joëlle Ceroni et Pierre Maillard 


Effondrement du Granier

En vidéo, l’effondrement filmé par Jean-Fabrice Quirin


L’effondrement filmé par Jean-Fabrice Quirin

Une nouvelle fois, c’est la face nord du Mont-Granier qui est concernée et plus spécifiquement le secteur du Ravin du Diable. Il se pourrait que l’écaille restée suspendue dans le vide à la suite de l’éboulement de janvier ait, cette fois, cédé. Cette chute a entraîné un éboulement de « plusieurs dizaines de milliers de mètres cubes », selon Fabien Hobléa, chercheur au CNRS de Chambéry. Un volume finalement chiffré à 100.000 mètres cubes en début d’après-midi par RTM, le service de restauration des terrains de montagne. 

L’événement, très impressionnant, était toutefois assez prévisible. Il a été précédé durant toute la semaine de plusieurs chutes de pierres moins importantes en volume. 

© Photo Josselin Blanc

© Photo Josselin Blanc

Ce nouvel éboulement a été observé par de nombreux témoins présents sur le site. Des pompiers de Savoie sont restés une bonne partie de la journée aux abords, tandis qu’un hélicoptère de la Sécurité Civile de l’Isère procédait à des reconnaissances aériennes pour mesurer l’étendue des chutes et les risques éventuels à venir.

Les témoins, comme les pompiers, décrivent pour l’heure un « panache de fumée extrêmement impressionnant ». Mais heureusement, aucun dégât n’est à déplorer. Les blocs de pierre sont en effet tombés assez loin du premier village.  

En vidéo, les explications de Françoise Guais


Les explications après l’effondrement du Granier

LA vidéo du Granier qui s’éboule

Le flanc Nord du Granier s’éboule un peu toute l’année. En ce moment, à cause du regel, puis du réchauffement, c’est plus intense. 4 mois après le pilier Ouest, côté Entremont le Vieux, c’est actuellement le pilier Est, côté Chapareillan, qui s’effrite. Un chercheur grenoblois a filmé l’événement. 

Depuis ce week-end, le pilier Est du flanc Nord du Granier s’effrite plus intensément que d’habitude. Hier, mardi 3 mai, David Amitrano, spécialiste en géomécanique, a filmé un éboulement très parlant. A 9H11, sur la route qui monte de Chapareillan au col du Granier, David Amitrano faisait justement des photos pour reconstruire dans son laboratoire le relief de toute la falaise du Granier. Objectif: calculer le volume des blocs de roche qui tombent de la montagne. 

« Au départ, j’entends beaucoup de bruit, mais je ne vois pas grand chose… »

« Au départ, j’entends beaucoup de bruit, mais je ne vois pas grand chose… » explique David Amitrano. « J’ai commencé à filmer en bas, le cône d’éboulis, et c’est là que j’ai entendu un bruit beaucoup plus important qui provenait du sommet de la falaise. Et j’ai vu le bloc dévaler le ravin du Diable, rebondir sur les parois…  » C’est justement l’objet d’étude du chercheur, qui cherche à comprendre quelles sont les causes de « rupture des roches » au Saint-Eynard, ou au Chambon, par exemple. Son travail: constituer une sorte de catalogue de ces événements. Il est enseignant-chercheur au laboratoire grenoblois ISTErre de l’Université Grenoble-Alpes. 

David estime la chute de roches d’hier matin à quelques milliers de mètres cube. C’est à dire 100 fois moins que l’éboulement de janvier survenu côté Entremont, estimé lui à 120 000 mètres cube au total, sur la base de l’écho sismique causé par l’impact des roches au sol, et enregistré par le réseau Sismalp. Selon le chercheur, les plus gros blocs filmés dans sa vidéo atteindraient entre 10 ou 20 mètres cube, soit à peu près le volume d’une petite piscine hors sol. Pour entre 25 et 50 tonnes de roche !

« Toutes les falaises autour de nous s’érodent… »

David Amitrano rappelle que pratiquement toutes les falaises autour de Grenoble s’érodent. Le Saint-Eynard « lâche » 10 mètres cube au moins tous les 3 jours. Il s’agit d’un processus géologique normal. Plus ou moins vite, plus ou moins intensément, en fonction de la météo mais pas seulement. Le Granier et la Dent de Crolles sont constitués tous deux de calcaire urgonien, vieux d’environ 100 millions d’années. Mais c’est le Granier qui s’effrite, parce qu’il a été beaucoup plus fracturé au cours de son histoire géologique. 

© David Amitrano ISTerre Université Grenoble-Alpes

© David Amitrano ISTerre Université Grenoble-Alpes

Comme disent les anciens, « Bien chaud, bien froid, sous la falaise ne te promène pas! » Fabien Hobléa, enseignant-chercheur au labo Edytem de l’Université Savoie-Mont-Blanc, nous rappelle en effet que la période d’intense activité d’écroulement correspond à une météo bien particulière. Actuellement comme en janvier. L’eau qui s’infiltre dans les plis de la roche érodée friable gèle la nuit. En prenant du volume, elle décolle encore un peu plus les roches fragilisées. Et quand, dans la journée, le soleil vient chauffer la falaise, la glace fond. Elle ne retient plus les roches qui se détachent et tombent de la montagne.

C’est en tout cas le scénario le plus plausible en l’état actuel de nos connaissances. La montagne garde jalousement ses secrets. 

Le Mont Granier se comporte « comme un volcan »

Après la façade Ouest en janvier, de nouveaux éboulements se sont produits côté Est fin avril 2016. Le Mont Granier, aux confins de l’Isère et de la Savoie, est en constant mouvement. Comme un volcan, après une phase de sommeil, il entre en activité.

© Jean-Christophe Pain / France 3 Alpes

Il y a 4 mois, 120.000 m3 de roche se détachaient du Mont Granier dans un fracas épouvantable. Un éboulement qui laissait des traces : une immense saignée de 20 mètres de large sur 200 mètres de haut bien visible depuis la petite commune d’Entremont-le-Vieux.

Ces derniers jours, trois nouveaux éboulements importants se sont produits. Cette fois, c’est la façade Est qui a été impactée. Dans la nuit du jeudi 28 au vendredi 29 avril, dans la soirée de vendredi et de nouveau samedi matin. A chaque fois, environ 10.000 m3 de roches se sont détachés de la montagne, selon les premières estimations effectuées d’après les relevés du réseau Sismalp, et les travaux du labo Isterre Grenoble.

« On est dans une période d’instabilité massive »

Fabien Hobléa enseignant-chercheur au CNRS à l’Université de Savoie compare le Mont Granier à un volcan :  » La face nord du Granier est tout le temps active. Il n’y a pas un jour sans qu’un bloc se détache. C’est comme un volcan en activité qui émet toujours des fumerolles. Ca n’empêche pas les gens de visiter de temps en temps. Et il y a des périodes d’éruption. Et là, on est dans une période d’instabilité massive liée aux conditions climatiques essentiellement. »

Les mêmes causes produisent les mêmes effets

A chaque fois, ce sont les aléas climatiques qui fragilisent la montagne. La pluie s’infiltre dans les fissures, quand il fait froid l’eau gèle et fait pression sur la paroi, et au moment du dégel, la roche s’effrite.

Cette activité n’est pas une nouveauté. Le Mont Granier est en mouvement constant et donc très surveillé. Mais si, depuis 20 ans, cette activité restait très limitée (quelques éboulis, de faible ampleur, le plus souvent stoppés par la forêt ou les reliefs naturels), ces derniers mois, la montagne semble bouger davantage.

Les scientifiques vont donc étudier de près ces mouvements grâce notamment à des « fissuromètres », installés à l’intérieur de la montagne qui permetteront de savoir si les mouvements externes trahissent des mouvements internes. Quand le temps le permettra, des géologues experts du RTM (Restauration des Terrains de Montagne) survoleront également la zone.

Reportage de Jean-Christophe Pain, Dominique Bourget et Jean-Jacques Picca

Après les éboulements du Mont Granier