@maydeuO lamentablemente james falleció poco después de ser admitido pic.twitter.com/37f3CkEY5L
— Daniel Berehulak (@berehulak) 14 Septembre 2014
L’image a été prise aux portes de l’hôpital de Morovia, au Libéria, à l’aube de l’automne 2014. Deux hommes en combinaisons jaunes tiennent à bout de bras James, un garçon de 8 ans atteint du virus Ebola. L’un d’entre eux asperge l’enfant de désinfectant tout en le gardant à distance. Sa combinaison ne protège pas l’intégralité de son corps. En arrière plan, la tôle bleue dit toute la précarité des lieux. James survivra deux heures. La photo permettra à son auteur, Daniel Berehulak, de remporter un prix Pulitzer.
Au total, l’Australien est resté 100 jours en Afrique de l’ouest pour couvrir l’épidémie. Lundi, au festival Visa pour l’image de Perpignan, il est revenu sur une expérience « éprouvante » face à un « ennemi invisible ». En acceptant de partir pour le New York Times, Daniel Berehulak ne savait pas à quoi s’attendre. Il imaginait l’épidémie Ebola sur la fin. En réalité, elle était sur le point de devenir la plus importante jamais connue en Afrique de l’ouest. Le bilan : plus de 10 000 morts.
« J’ai accepté la mission et je me suis inquiété après », se souvient-il. « C’était la première fois que je couvrais un tel événement. On savait alors peu de choses sur le virus. A Monrovia, beaucoup de médecins sont morts avant que l’on sache vraiment ce qu’il se passait. Avant de partir, j’ai du demander conseil à d’autres journalistes au sujet de l’équipement nécessaire et sur les dispositions à prendre. J’ai commandé un masque de protection, une combinaison et trois paires de gants sur Internet. »
Gérer la distance
Sur place, il apprend à gérer la distance avec la maladie hyper-contagieuse. « C’est très difficile de communiquer avec les gens lorsque l’on est à distance et dans une tenue spatiale », confie-t-il. La plupart du temps, il porte simplement un masque sur la bouche. Parfois, il évolue à découvert, l’utilisation de combinaisons pouvant créer des tensions dans certains quartiers où les habitants refusaient de croire en l’existence de la maladie. Elles pouvaient aussi susciter la crainte. « Il faut alors se protéger autrement. On fait attention aux contacts et à la salive quand on parle aux gens. On apprend aussi à prendre en compte la direction du vent », détaille Daniel Berehulak. Mais la pire menace était « les semelles des bottes. On s’aspergeait les uns les autres d’eau chlorée. »
Le photographe est quotidiennement en contact avec le New York Times. Mais « il n’y avait pas de plan à proprement parler au cas où je contractais Ebola, admet-il. Il y avait seulement la possibilité d’avoir une évacuation médicale, le cas échéant. »
Illustrer la maladie revient à en photographier « les conséquences », analyse-t-il. Des corps couchés à l’arrière d’ambulances de fortune ou à même les trottoirs. La détresse des proches qui ne peuvent enterrer les victimes selon les rites funéraires traditionnels. Les silhouettes envahissantes des soigneurs en combinaison. Des scaphandres qui se ressemblent tous, sans forme, ni visage. Les couleurs, accentuées, dramatisent les situations. L’ambiance est lunaire et inquiétante. On devine un pays coupé du monde.
TITUS HOLLIDAY et CAMILLE HISPARD