On a d’abord vu un compte surgir sur Twitter, et nous interpeller. Plus tard, dans notre sondage sur les équipements sportifs manquants en Bourgogne, on a compris que les fondus d’athlétisme ne blaguaient pas. A plus de 70% (sur plus de 700 votes tout de même), le projet de construction d’une salle d’athlétisme a été plébiscité. Loin devant la patinoire, qui fait pourtant bien défaut aux Ducs et aux nombreux adeptes des sports de glace. On a compris aussi que la mobilisation était en marche, via une page Facebook dynamique (plus de 1600 soutiens en un peu plus d’un mois). Dans l’ombre de ce lobbying efficace, il y a Maxence Michelin, 26 ans. Coach athlé-santé au sein de la fédération d’athlétisme, et éducateur sportif à l’ASPTT Dijon, il encadre une centaine de pratiquants. Il était bien placé pour faire le constat sur le terrain, et se bat désormais pour qu’une structure sorte de terre dans les prochaines années. Interview d’un jeune homme passionné, lucide et déterminé.
Sports Bourgogne – Qu’est-ce qui vous a donné l’envie de soutenir le projet de construction d’une salle d’athlétisme à Dijon ?
Maxence Michelin – D’abord, j’ai commencé l’athlétisme par hasard, puis j’ai eu la chance d’intégrer le pôle espoirs et de m’entraîner dans des structures correctes. Mais j’ai rapidement fait le constat que ce n’était pas le cas de tout le monde, même en arrivant au plus haut niveau bourguignon. Quand je posais la question autour de moi, « que vous manque-t-il le plus ? », tous les athlètes me répondaient « un stade couvert ». J’ai donc voulu essayer de rassembler un maximum de personnes autour de ce projet, de manière indépendante au départ. Je voulais vraiment que ce projet parte des athlètes.
Votre démarche a rapidement mobilisé du monde, notamment via les réseaux sociaux. Pourquoi est-elle si soutenue selon vous ?
L’athlétisme est une des disciplines sportives qui se développent le plus vite, avec +40% de licenciés en 8 ans en Bourgogne. Nous avons un club comme le DUC, qui fait partie de l’élite française depuis 30 ans. Mais ce qui est est malheureux, c’est que nous constatons une fuite de nos meilleurs éléments, qui s’en vont en partie à cause du manque de structures. Moi qui m’occupe d’enfants, je peux vous dire que c’est difficile quand l’hiver arrive et que vous devez vous entraîner dehors. L’athlétisme est un sport d’efforts violents, s’il est pratiqué dans de mauvaises conditions, le risque de blessure est important. Tout le monde est conscient du manque, et en un mois et demi seulement, il y a plus de 1600 « likes » sur la page Facebook. Le projet est soutenu par des athlètes de Bourgogne et d’ailleurs, car Dijon a une situation centrale, accessible. Idéale pour accueillir des compétitions nationales !
Maxence Michelin (à droite), avec Kevin Young, recordman du monde du 400m haies.
Il y a bien la halle d’athlétisme du campus universitaire ?
Oui, mais c’est une salle qui ne peut accueillir que 200 personnes, bien insuffisante pour organiser des compétitions d’envergure. Et puis elle sert avant tout aux étudiants, et au DUC. Mais surtout, les distances ne sont pas réglementaires, et il n’y a pas d’anneau pour courir un 200 ou 400 mètres, c’est donc incomparable avec une salle spécifique. Du coup, les athlètes s’entraînent dehors toute l’année.
C’est la première fois que le projet de construction d’une salle d’athlétisme est évoqué à Dijon ?
Non, il en avait été question il y a 7 ou 8 ans. Mais juste après, la construction du stade de football a changé l’ordre des priorités : avant de nous battre pour une salle couverte, il nous fallait d’abord retrouver un stade extérieur, puisque la piste du stade Gaston-Gérard allait être supprimée. Du coup, le projet a été rangé dans les cartons, mais il existe, il suffit de le remettre à jour.
« Pour une salle correcte, il faut compter entre 8 et 10 millions d’euros. Ce n’est même pas le prix d’une seule tribune du stade de foot »
Avez-vous rencontré des décideurs politiques pour discuter de la faisabilité de ce projet ?
J’ai été contacté par Laurent Grandguillaume, député socialiste, qui a été alerté sur Twitter. Il a voulu me rencontrer pour en parler. Je suis donc allé à sa permanence, avec le CTS de la Ligue de Bourgogne Patrick Leger, et le président Alain Bulot. Nous avons échangé, et il s’est montré à notre écoute. Mais bien sûr, nous sommes en période électorale, et il faudra voir avec la future équipe municipale si ce projet peut être lancé. En tout cas, c’est un début. Nous devons créer un collectif autour des clubs et des instances fédérales, rassembler les dirigeants, les entraîneurs, les athlètes, pour ensuite rencontrer toutes les personnes.
Vous pensez que la construction d’une salle d’athlé à Dijon est un projet réaliste, à court terme ?
J’en suis persuadé, cela n’a rien d’utopique. Bernard Amsalem, le président de la fédération française d’athlétisme, a l’ambition de construire une salle couverte dans chaque région. Nantes, Metz, Lyon et bientôt Rennes, ont déjà réussi à concrétiser cette ambition. En moyenne, pour se doter d’un outil correct, il faut compter entre 8 et 10 millions d’euros. A titre de comparaison, ce n’est même pas le prix d’une seule tribune du stade de foot Gaston-Gérard. En gros, c’est l’investissement nécessaire à la construction d’un nouveau gymnase. Officiellement, Bernard Amsalem nous soutient déjà. Il devrait intervenir prochainement auprès des élus, après les élections. Si la volonté est là, compte tenu du coût, il est raisonnable d’envisager que la salle puisse sortir de terre dans les 4 années qui viennent.
La future salle couverte de Rennes, en cours de construction.
A Dijon, on parle beaucoup d’une nouvelle patinoire. Vous pensez que ce projet peut freiner le vôtre ?
Non, je comprends parfaitement le souhait des hockeyeurs et patineurs dijonnais, il est légitime. En terme de coût, je pense que les deux peuvent être menés de front. Mais c’est certain qu’une salle d’athlétisme est moins chère, les coûts de fonctionnement sont beaucoup plus faibles, incomparables avec une piscine ou une patinoire. Et dans le cas de l’athlétisme, la salle servirait aux sportifs, à toutes les écoles, et même à tous les clubs de haut niveau. L’athlétisme, c’est la base de tous les sports.
Revoir la page « Sports Bourgogne » tournée dans la salle du campus de Dijon en 2013 :