Dans cette lettre du 13 février 1915, Jules Mortreux écrit à son frère Léon, qu’il est fatigué, que les troupes sont éreintées. Jules affronte les allemands dans l’Argonne où les combats sont très violents.
La 7è Compagnie du 76è Régiment d’Infanterie multiplie les attaques pour reprendre la butte de Vauquois à l’armée allemande. Depuis le début de la guerre, ce village de l’Argonne passe d’un camp à l’autre. Enlevé par les allemands le 3 septembre 1914, il est repris le 15 septembre par les français. Fin septembre, l’armée allemande chasse l’armée française et occupe à nouveau les hauteurs de Vauquois.
Le secteur est stratégique. L’armée qui tient la butte de Vauquois surplombe la vallée du haut de ses 300 mètres, et la voie ferrée qui relie Paris à la place forte de Verdun.
Jules annonce qu’il part demain pour la 1ère ligne et que « cela va barder cinq minutes » … la bataille de Vauquois va durer des années.
Lettre de Jules Mortreux à Léon Mortreux, envoyée le 13 février 1915
« espérons en une bonne étoile, et à bientôt j’espère le plaisir de te raconter quelque chose de sensationnel. » Ce 13 février 1915, Jules ne sait pas encore que son jeune frère Pierre a été tué. Léon a appris la terrible nouvelle il y a deux jours.
nous allons de suite débuter par un mouvement offensif sur Vauquois et Montfaucon, ces essais ont déjà failli 2 fois, espérons que la 3ème aura succès
Correspondance de guerre, il y a cent ans …
76è R.I. – 7è Compagnie – secteur 10
Mon cher Léon,
J’ai reçu tes deux lettres, par Rodez et une troisième ici (Ville-sur-Cousances). Tu m’excuseras de ne pas t’avoir répondu avec quelques détails, mais nous avons tellement eu à faire, et nous étions si éreintés ces jours-ci que je t’assure nous sommes excusables.
Bien qu’étant toujours en seconde ligne, nous avons bardé ferme mais … nous partons demain pour la 1ère ligne et je crois que ça va barder cinq minutes.
D’après ce que je puis conclure de quelques bons tuyaux, et des choses, nous allons de suite débuter par un mouvement offensif sur Vauquois et Montfaucon, ces essais ont déjà failli 2 fois, espérons que la 3ème aura succès, mais surement en coûtera cher, gare à la casse !
Après une température rigoureuse au début voici maintenant le dégel, la pluie, la boue, ce qui ne vaut pas mieux.
Peut-être maintenant n’auras-tu pas de mes nouvelles directes vu les circonstances, je ne mettrai plus qu’un mot à Paris, si possible.
Allons, au revoir mon cher Léon, espérons en une bonne étoile, et à bientôt j’espère le plaisir de te raconter quelque chose de sensationnel.
De tout cœur et bien fraternellement.
Jules