13 Jan

Comparutions immédiates au Tribunal Judiciaire de Marseille

©Photo JFGiorgetti

 

Il entre dans le box, menotté et encadré par des policiers. Les menottes retirées, il s’accoude sur le rebord. Silhouette frêle, cheveux mi- longs, blouson gris en coton zippé jusqu’au cou, il se prénomme Marvin, originaire de Montpellier il a eu 18 ans en novembre dernier et vit à Saint Laurent du Var dans les Alpes-Maritimes.

 

« Je suis allé acheter 30 €uros de shit pour moi et 100 €uros de cocaïne pour cette amie. « 

 

Le jeune homme a été interpellé par les policiers, au cours d’une opération anti-drogue, dans la cité des lauriers au cœur des quartiers nord de Marseille. Les fonctionnaires ont trouvé sur Marvin un peu plus de trois grammes de cocaïne, presque 6 grammes de cannabis, 140 €uros et un couteau de type Laguiole. Après avoir résumé les faits, la présidente demande : « qu’êtes-vous venu faire à Marseille ? Marvin répond clairement et sans hésitation «je suis venu voir une amie à Marseille, je suis allé acheter 30 €uros de shit pour moi et 100 €uros de cocaïne pour cette amie. »

 

Condamné deux fois à Nice

 

La juge souligne que Marvin a été condamné deux fois à Nice, en novembre et décembre 2021, par le juge des enfants, pour des faits de stupéfiants et lui demande quelle est son activité professionnelle et où il vit. Réponse : »je vis chez un ami à Saint Laurent du Var et j’ai trouvé un CAP pâtisserie au CFA de Carros, où je suis inscrit, la formation doit démarrer en mars. »

La Procureure de l’audience souligne que « ce jeune majeur, a été très récemment condamné, à Nice, deux fois pour des faits de stupéfiants. On le retrouve à nouveau dans une autre juridiction pour des faits similaires, ce garçon continue dans les stupéfiants en changeant de lieu, il se décale pour venir faire ce qu’il a à faire ici. Il n’a pas compris. Je requiers, un an de prison ferme aménageable. Il n’a rien à faire ici. »

 

« Ce n’est pas un charbonneur ! »

 

L’avocate de la défense, décrit un dossier d’évidence « il s’est rendu à Marseille pour s’adonner au trafic de stupéfiants. On ne le voit pas procéder à des transactions, on le voit uniquement dissimuler des produits stupéfiants dans ses chaussettes, la quantité trouvée sur lui, correspond plus à une personne venue acheter. Ce n’est pas un charbonneur ! »

La présidente, donne la parole en dernier à Marvin « je veux voir un psy pour arrêter de fumer du shit, je veux me ranger et aller à l’école ! »

 

« Vous avez compris ? « 

 

Le jeune majeur est condamné à un an de prison sous bracelet électronique, avec obligation de soins, de travail et interdiction de paraître à Marseille. La présidente précise : »si vous ne respectez pas ces mesures, la peine pourrait être mise à exécution. Vous avez compris ? »

Audience matinale à Juge Unique au Tribunal Judicaire de Marseille

©Photo JFGiorgetti

 

 

Quinze affaires sont prévues, pour la matinée en 11ème chambre à juge unique. En raison, notamment du covid, six dossiers sont renvoyés. Parmi les affaires retenues, une visio-conférence avec un détenu de 22 ans incarcéré à la prison de Luynes. La présidente Madame Samii, établi la liaison avec la maison d’arrêt.

 

« Il faut faire le maximum pour le faire venir dans un quart d’heure maxi…bon ben on va prendre un autre dossier en attendant « 

 

Dans un soupir, la présidente, dit « c’est un dossier qu’on peut prendre enfin ! ». Elle établit la liaison avec la maison d’arrêt. Sur les écrans de la salle d’audience, apparaît l’image, on voit une pièce blanche, une table blanche, trois chaises blanches. Madame Samii demande si le prévenu est là, un surveillant apparaît « il n’est pas encore arrivé, parce qu’il y a eu du retard dans les mouvements ». La Présidente : »il faut faire le maximum pour le faire venir dans un quart d’heure maxi…bon ben on va prendre un autre dossier en attendant ».

 

 

« J’étais perdu, j’ai rendu mon permis, je n’ai toujours pas fait le stage, parce que je ne sais pas où il faut le faire »

 

Loïc 26 ans, se présente à la barre, il a fait opposition à une décision de justice le condamnant à une amende de 300 euros, obligation de stage de sensibilisation et suspension de permis de conduire de six mois, pour conduite d’un véhicule en ayant fait l’usage de stupéfiants. Le jeune homme explique à la présidente qu’il a payé l’amende sans transmettre le justificatif au procureur « parce que j’étais perdu, j’ai rendu mon permis, je n’ai toujours pas fait le stage, parce que je ne sais pas où il faut le faire ! ». La présidente, indique au prévenu : « vous avez fait opposition à la décision de justice, c’est quand on souhaite être rejugé. Dans votre cas vous avez exécuté une partie du jugement en réglant l’amende et vous avez rendu votre permis de conduire. Il faut que vous fassiez le stage de sensibilisation ». La procureure de l’audience prend la parole et précise que le jeune homme ne peut pas être jugé « parce la décision a été exécutée en partie ».

Après un court moment de réflexion, la présidente rend sa décision : » après en avoir délibéré, le tribunal déclare irrecevable votre opposition, vous allez au Bureau de l’Exécution des Peines, ils vous donneront la marche à suivre et vous diront où faire le stage, surtout montrer bien votre titre de recette pour prouver que vous avez payé l’amende. Vous avez bien compris ? Au revoir Monsieur ». Conduit par l’huissière de l’audience, le jeune homme quitte la salle, pour se rendre au BEX.

 

» Il y a eu du souci en détention ! »

 

Retour à Luynes, question de la présidente « Il n’est toujours pas arrivé ? » Le surveillant reparait sur les écrans : » Il y a eu du souci en détention ! ». La présidente : « on vous rappelle dans 20 minutes. Bon on va prendre le dossier suivant ».

 

« Quand elle dit que je l’insultais c’est quand j’exprimais mon désaccord »

 

Un homme, une femme s’avancent à la barre elle, menue cheveux bouclés bruns, vêtue d’une doudoune noire et sac à dos. Lui cheveux blancs, masque noir portant une parka sombre. Le mari et la femme sont convoqués pour violence et dégradation d’un bien appartenant à autrui. Ils sont à la fois prévenus et victimes. Les faits se sont produits les 17 et 18 novembre 2019. La présidente fait un rapide résumé des faits. « Vous avez vécu plus de dix ans ensemble, vous avez deux enfants. Ce jour-là, (le 18 novembre ndlr), suite à une dispute conjugale, vous avez déposé plainte, vous disiez, Madame, être lassée des insultes. Vous avez sauté au cou de votre époux. Monsieur a été blessé, entraînant un jour d’Incapacité Temporaire de Travail. Dans la lutte la tête de madame a cogné, trois jour d’ITT. »

Côte à côte face à la juge, les deux époux se confrontent Le mari : »je reconnais avoir cassé le téléphone. Quand elle dit que je l’insultais c’est quand j’exprimais mon désaccord avec elle dans la vie de notre couple ». La présidente précise : « Monsieur, on vous reproche des violences ! »

 

« Il m’a pris la tête avec toutes ses forces »

 

Amal prend la parole « il m’a pris la tête avec toutes ses forces, pour taper contre le mur !».

Hassan répond « elle est partie aux urgences pour m’accabler, sur les conseils de ses copines ». La présidente lit le certificat médical « les médecins ont relevé diverses lésions et constaté un retentissement psychologique important. » Hassan : « je n’ai jamais frappé ma femme en dix ans de vie commune, on a eu des disputes, mais je ne l’ai jamais frappée. J’ai cassé son téléphone, parce qu’elle avait cassé le mien. Quand elle se met en colère, elle casse. Elle l’a cassé plusieurs ordinateurs. » Amal : « je reconnais, que j’ai sauté au cou de Monsieur. La veille au soir, il y a eu les téléphones cassés, ce soir-là, j’ai vu qu’il avait bu. Le lendemain matin, il est venu me réveiller pour me dire tu vas me racheter mon téléphone. Il m’a insulté devant mes enfants, j’ai commencé à crier, je n’en pouvais plus du harcèlement, il m’a mis hors de moi ! ». La présidente évoque une médiation pénale qui a échoué, la procédure de divorce en cours et constate que le juge aux affaires familiales a rendu une ordonnance enjoignant Hassan à quitter le domicile familial qu’il occupe encore, alors qu’il appartient à son épouse. « Monsieur vous devez quitter l’appartement qui ne vous appartient pas, c’est pour l’intérêt des enfants et vous devez respecter cette décision qui date du mois d’août 2021 ». La magistrate interroge à nouveau Amal : »votre mari vous verse sa contribution ? (150 euros pour chaque enfant ndlr). Réponse : « il m’a versé le mois dernier 150 euros ce mois-ci, rien ; il m’a dit qu’il n’avait pas d’argent. Il n’y a pas trois semaines, en bas de l’immeuble, il m’a dit je vais te dégommer en arabe, et il m’a traitée de pute. Je souffre de cette problématique depuis 10 ans. ».

La présidente clos les débats en demandant aux deux époux s’ils souhaitaient se constituer partie civile « vous êtes tous les deux victimes et prévenus ». Lui : »non ! » Elle : » qu’est-ce que ça veut dire ? « Réponse de la présidente : »ça veut dire que vous demandez réparation ». Amal : »je demande la paix ! ».

 

« Madame a été brutalisée ! « 

 

Dans son réquisitoire, la procureure réclame contre Amal trois mois de prison avec sursis, « ça veut dire qu’il faut réfléchir avant tout passage à l’acte, il faut que les prévenus sachent que le sursis c’est une peine d’avertissement ». Contre Hassan six mois de prison avec sursis « Monsieur conteste les violences et reconnait les dégradations, mais il y a un certificat médical qui montre bien que Madame a été brutalisée ! »

La juge rend sa décision : trois mois de prison avec sursis contre Amal et six mois contre Hassan « vous ne devez pas commettre d’autres infractions pendant cinq ans. Vous avez cette épée de Damoclès sur la tête. Monsieur, je vous conseille vivement de quitter l’appartement de Madame, vous devez aller au Bureau de l’Exécution des Peines. Vous devez payer 127 €uros de droits si vous payez dans les 15 jours c’est 20 en moins.

 

« Il est là ? Il est là ! »

 

Retour à la visio-conférence. Cette fois, le jeune homme né en 1990 à Mayotte, est bien présent. La juge demande au prévenu son adresse, « je vis à la Maurelette (une cité des quartiers nord de Marseille ndlr) chez ma daronne ». La magistrate évoque les faits reprochés et s’aperçoit qu’il n’y a pas d’avocat au côté du jeune homme « Avez-vous un avocat ? «

Réponse : « je ne sais pas pourquoi, il n’est pas là, je ne comprends pas, je vais passer comme ça. »

 

« Vous avez bu quoi ? Une bouteille de vodka ? « 

 

Madame Samii, énumère les faits reprochés : « vers 6 heures du matin en septembre 2018, dans un supermarché avec un complice mineur, vous êtes entrés par la porte du personnel, votre collègue a tenté de voler une bouteille d’alcool, vous avez menacé un employé du magasin avec un couteau. »

Réponse : « j’ai trouvé un couteau par terre, j’ai voulu leur faire peur, je ne voulais pas déchirer le gars, je ne savais pas ce que je faisais, j’avais trop bu.

Question de la juge : »vous avez bu quoi ? Une bouteille de vodka ? »

Réponse « oui ! »

La Juge « vous reconnaissez les faits ? »

Réponse : »oui ! »

Avant le réquisitoire, la présidente, évoque les cinq condamnations qui figurent au casier judiciaire du jeune homme, elle lui demande pourquoi il est incarcéré aujourd’hui ? « C’est un mandat de dépôt. » « Pourquoi ? » demande la magistrate. Réponse c’est pour une tentative…une tentative de meurtre. La magistrate : « je vois que sur votre fiche pénale que vous êtes sous mandat de dépôt depuis octobre 2019, pour une affaire d’assassinat. »

La procureure requiert six mois de prison ferme et cinq ans d’interdiction de port d’arme« ce sont des faits graves, il y a un port d’arme et des menaces de mort. »

Après quelques instants de réflexion, la présidente rend sa décision «le tribunal, après en avoir délibéré, vous reconnaît coupable des faits reprochés et vous condamne à six mois de prison avec sursis  et trois ans d’interdiction de port d’arme. Vous avez compris ? » « Oui ! »

 

Baptême du feu

 

Cette matinée est un baptême du feu pour Madame Samii, qui vient d’être nommée à Marseille. Elle a présidé sa première audience correctionnelle à juge unique. Auparavant elle était en poste à Rodez.

 

 

 

03 Jan

Les dépôts sauvages de déchets devant le tribunal  

© Google view

 

Un camion benne immatriculé en Roumanie sillonnant les rues Marseille, fil rouge de cette enquête. Il s’arrête soit près d’un chantier, et charge des gravats ; soit devant un garage et remplit sa benne de pneus usagés, moyennant une poignée d’€uros en espèces remis de la main à la main. Vidéos surveillances et filatures permettront d’identifier le propriétaire du véhicule et ses clients donneurs d’ordre.

 

Des petites mains de nationalité roumaine

 

En décembre 2020 le parquet de Marseille demande aux services de police d’enquêter sur les dépôts des sauvages de déchets rue Cazemajou dans le 15ème arrondissement de Marseille (v photo). Après la mise en place de surveillances et l’utilisation de la vidéo protection, les enquêteurs constatent que plusieurs entrepreneurs utilisent des petites mains de nationalité roumaine et vivant dans le squat, au même endroit.

Entre avril et mai 2021, l’enquête va permettre d’identifier trois donneurs d’ordre : un entrepreneur du bâtiment, un propriétaire d’immeubles et un garagiste.

 

 

Deux ans de prison et 75 000 €uros d’amende encourus

 

À la barre de la 11ème chambre du tribunal correctionnel l’entrepreneur du bâtiment, le propriétaire d’immeubles, et le garagiste. Le propriétaire du camion roumain est absent mais représenté par son avocat. Ils comparaissent pour notamment gestion irrégulière de déchets et abandon ou dépôt illégal de déchets ; ils encourent au maximum deux ans de prison et 75 000 €uros d’amende

 

90 mètres cubes de gravats

 

L’entrepreneur, reconnait, en avril 2021, avoir contacté un homme pour utiliser les services du camion roumain moyennant le paiement de 300 €uros. Constantin Grigore précise qu’il ne pouvait pas évacuer d’un seul coup les gravats de son chantier situé rue Thubaneau dans le centre-ville de Marseille : « ma camionnette était pleine d’outils j’étais obligé de faire plusieurs voyages pour transporter les gravats à la déchetterie…je devais débarrasser le chantier rapidement, j’avais la pression…je n’ai jamais abandonné de gravats sur la route, je suis toujours allé à la déchetterie des Aygalades…pendant la crise sanitaire, j’ai stocké des gravats dans mon jardin, parce que les déchetteries étaient fermées…c’est la première et dernière fois que j’utilisais les services de cet homme ! »

Deux autres chantiers sont identifiés dont un dans le 3ème arrondissement de Marseille. Le 11 mai 2021, le camion va charger des matériaux dans une grande surface spécialisée, puis se rend au 20, rue Belle de Mai. La marchandise est déchargée puis la benne est remplie avec des gravats. Karim Boudifa reconnait avoir donné 350 €uros pour la prise en charge des gravats « je leur ai demandé s’ils allaient les décharger dans une déchetterie, je ne savais pas qu’ils allaient les déverser dans la rue…je pensais qu’ils allaient me donner une facture, je ne les ai plus jamais revus…avec mon oncle je retapais entièrement un appartement dans l’immeuble que je venais d’acheter avec ma mère.»

 

133 pneus

 

Le troisième homme, garagiste a été vu en train d’aider à charger 133 pneus dans la benne du camion roumain. Khaled Menzou, reconnait donner régulièrement des pneus aux roumains « je ne les contacte pas, ils viennent régulièrement au garage, je fais ça depuis un ou deux ans, ils m’ont dit qu’ils vendaient les pneus aux africains. ». La présidente relève que le garagiste est adhérent à un système de collecte de vieux pneus.

 

Ces personnes ont décidé que Marseille est une décharge à ciel ouvert

 

Dans son réquisitoire, la procureure « s’inquiète de voir à quel point on se débarrasse des déchets sans s’inquiéter sur le devenir de ces déchets…ces personnes ont décidé que Marseille est une décharge à ciel ouvert…ils ne contribuent qu’à polluer les rues de Marseille.

Contre Constantin Grigore elle requiert six mois de prison avec sursis et 1500 €uros d’amende, Karim Boudifa quatre mois de prison avec sursis et 1500 €uros d’amende, Menzou Khaled six mois de prison avec sursis et 15000 €uros d’amende, et Virgil Turcata, le propriétaire du camion : un an de prison avec sursis et confiscation du véhicule.

 

 

Prison avec sursis et amendes

 

Le tribunal a condamné les trois hommes à quatre mois de prison avec sursis et 2000 €uros d’amende, a relaxé Karim Boudifa et Khaled Menzou pour le travail dissimulé, et enfin Virgil Turcata a été relaxé de tous les faits reprochés.

 

La métropole Aix-Marseille avait déposé une plainte en août 2021

 

 

 

 

Des travaux illicites en plein cœur du Parc National des Calanques

Copyright Géoportail (photo du site du centre de tir)

 

Le Club de tir de la Ciotat et la société Eurovia jugés pour avoir fait des travaux 

en plein cœur du Parc National des Calanques Sans autorisation.

Les faits datent de novembre 2018.

Devant la 6ème chambre du tribunal correctionnel trois hommes. Le président de l’association Tir Club Ciotaden, pour avoir fait réaliser les travaux, le conducteur de travaux et membre du club de tir, qui a facilité les opérations et le Président d’Eurovia.

La présidente énumère sommairement les faits : une quinzaine de camions qui en l’espace de quelques semaines, a déversé 90 mètres cubes de gravats, du béton, du mobilier urbain, des câbles électriques ou du plastique, pour des travaux d’aménagement et de comblement sur le site du club de tir. Le 13 novembre 2018, un inspecteur environnemental du Parc National des Calanques voit un véhicule qui déverse des matériaux. Ce camion vient d’un chantier de rénovation urbaine qui se tient à La Ciotat.

A la barre Pierre Badesa, explique, que suite aux intempéries de 2018, le site a été dégradé par les ruissellements, que Jean-Marc Pascal, conducteur des travaux chez Eurovia et membre du club de tir, s’est proposé d’apporter des matériaux inertes pour la remise en état du parking et des buttes. Le président du club de tir, précise que le bail signé avec la mairie de La Ciotat, l’oblige à maintenir les lieux en l’état et d’assurer la sécurité du terrain. Les travaux de remise en état ont été votés en assemblée générale.

 

« Je ne savais pas que le site était dans le parc… »

 

La présidente : » pourquoi ne pas avoir demandé l’autorisation pour ces travaux ? »

 

Pierre Badesa : »je ne savais pas que le site était dans le parc…je n’ai jamais reçu de courrier disant que le site était au cœur du Parc National des Calanques…je n’ai pas modifié le terrain, j’ai juste réparé les dégâts. »

La Présidente  précise que le décret de création du Parc National des Calanques a été publié au Journal Officiel, « il prend donc effet pour la population, vous ne pouvez pas ignorer que vous êtes dans le parc. »

Jean-Marc Pascal lui succède à la barre, le conducteur de travaux, adhérent au club de tir, explique qu’il avait proposé d’apporter des matériaux inertes sur le site pour la remise en état. « J’ai obtenu l’accord de mon directeur d’agence…je ne savais pas que c’était un site naturel protégé…après le contrôle de l’agent du Parc National des Calanques nous avons remis le site en état et les matériaux ont été apportés à la carrière de Cassis pour y être recyclés. »

La représentante du Parc National des Calanques, a confirmé que le club de tir se trouve en site classé, dans le cœur du Parc et que « le déversement de matériaux inerte apporte des espèces invasives pouvant modifier le milieu naturel…il est insupportable de déverser des déchets, du béton ou du pvc dans le Parc…il faut arrêter ces pratiques totalement nocives. « 

 

« Ce ne sont pas des délinquants des déchets… »

 

Dans son réquisitoire, le procureur, souligne que « ce ne sont pas des délinquants des déchets, là, tel n’est pas le cas, parce que tout a été remis en état…Mais si ce sont des déchets inertes, ils ne sont pas inoffensifs, surtout s’il s’agit de béton ou de plastiques…Nous sommes sur de vieilles pratiques on est entre copains et on se rend service…Ce n’était pas une démarche économique c’était une démarche d’entraide à côté des clous, particulièrement malheureuse.»

Contre la société Eurovia il a réclamé 20000 Euros d’amende avec sursis « pour le symbole ».

Le club de tir 5000 euros d’amende avec sursis et 2000 euros d’amende avec sursis contre le Président du club de tir et la même somme avec sursis à l’encontre du conducteur de travaux.

Les avocats ont plaidé la relaxe parce que leurs clients n’avait pas d’intention de vouloir réaliser un dépôt sauvage, ni de vouloir détériorer les Parc Naturel des Calanques.

Le délibéré sera rendu le 17 janvier

16 Sep

Les puissantes polonaises des rues marseillaises

 

Vendredi 10 septembre, la Sûreté Départementale des Bouches du Rhône a placé en fourrière, huit voitures immatriculées en Pologne. Elles circulaient sans assurance.

La volonté de la police est de sortir des rues de Marseille ces véhicules de grosse cylindrée, dont le prix d’achat dépasse largement 50 000 €uros.

A l’origine de cette affaire, un individu circulant à bord d’une voiture immatriculée en Pologne est interpellé pour détention de stupéfiants. « En détricotant la pelote, les enquêteurs, sont tombés sur un loueur organisé qui avait une dizaine de voitures dans sa flotte » explique le commissaire divisionnaire Brugère patron de la SD13.

ZS Location

Une société située à Marseille, installée à Aix en Provence et basée à Vitrolles

 

Nous nous sommes intéressés au phénomène de ces sociétés qui louent des voitures puissantes immatriculées en Pologne.

Sur Facebook, nous avons trouvé la page de ZS Location, située à Marseille au vieux port.

Pour joindre la société, pas de numéro de téléphone, une adresse mail, des comptes sur Snapchat ou sur Instagram.

Un détail, lorsque vous cliquez sur la carte qui figure sur la page Facebook des adresses fantaisistes apparaissent un peu partout à Marseille ou en France.

Cette entreprise, fondée en août 2020 et a été enregistrée au tribunal de commerce d’Aix en Provence début septembre 2020. Elle a deux actionnaires. Le majoritaire est un jeune homme de 23 ans domicilié à Bourg Saint Maurice en Savoie, le minoritaire âgé de 21 ans vit à Vitrolles.

Les 200 €uros de capital de cette Société par Actions Simplifiées ont été versés chez un notaire établi à Pont-Audemer en Normandie.

Le siège social de la SAS ZS Location est fixé dans la zone industrielle des Milles à Aix en Provence.

Dans l’immeuble de bureaux où est installé le siège social, personne n’a entendu parler ni ne connaît ZS Location. Le gestionnaire des bureaux dit n’avoir jamais loué de locaux à cette entreprise.

Et pas de grosses cylindrées immatriculées en Pologne à l’horizon.

Sur le compte Instagram une VW T Roc version sport est proposée à la location pour 250 €uros la journée ou 800 €uros le week-end. Sur le même compte il est indiqué que ZS est basée à Vitrolles et de préciser que si « vous n’êtes pas chez vous, vous n’avez aucun moyen de venir récupérer votre voiture ? Pas de soucis, on s’occupe de vous la livrer à l’endroit de votre choix… N’hésitez pas à nous contacter, notre commercial, se fera une joie de vous répondre dans les plus brefs délais. »

Mise en pause de la société

Nous avons contacté la société par courriel, le dirigeant a répondu plus de 24 heures après. Celui-ci indique avoir mis en « pause » ZS Location, et tout comme son associé vitrollais. Aujourd’hui, ils sont étudiants et partagent. Dixit: « seulement les voitures d’amis à nous sur les réseaux sociaux pour maintenir une présence pour nos abonnés ».

 

Sur le compte Instagram et la page Facebook une CLA 35 AMG est proposée à la location « pour profiter des dernières balades au soleil… »

Des voitures d’amis…

Dernier détail, le logo de ZS location ressemble beaucoup à celui du complexe sportif de Zinedine Zidane Z5 installé à quelques centaines de mètres du siège social de la société de location de voitures polonaises.

D’après des sources policières certaines entreprises de ce type pourraient servir à blanchir de l’argent provenant du trafic de stupéfiant.

 

 

29 Avr

Enquête sous la glace du Palais de la Glisse

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

Soupçons de détournements de fonds publics, de trafic d’influence et de favoritisme, sous la glace du palais de la glisse de Marseille. Les faits datent de 2004 dans un contexte « politico-amical »

L’enquête judiciaire a été ouverte fin janvier 2014.

A l’origine, un rapport de la Chambre Régionale des Comptes PACA, sorti au cœur de l’été 2013. Ce document passe au crible les relations entre la mairie de Marseille et Marseille Aménagement devenue la Soleam. Cette Société d’Economie Mixte a pour principaux actionnaires la mairie de Marseille, la Métropole, la caisse des dépôts et la caisse d’épargne. Le document, met notamment en lumière la gestion par cette SEM de la construction du Palais Omnisport de Marseille du Grand Est, le POMGE pour les initiés. A Marseille, tout le monde dit : le palais de la glisse de la Capelette. Dans ce rapport, la CRC Paca, pointe que Marseille Aménagement a versé une indemnité 13 fois supérieure à laquelle avait droit l’entreprise, Laser Propreté, qui louait ce terrain, soit 2 millions d’€uros ; « ce montant a été arrêté sur la base du rapport d’un expert qui a conclu de manière expéditive, à l’existence d’un bail commercial, que les parties ont ensuite conclu à titre rétroactif » »la décision de le construire a été prise sans réflexion suffisante sur sa fréquentation potentielle…et sans que la question de sa desserte ne soit résolue. » Disent les magistrats de la Chambre Régionale des Comptes.

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

« Un expert dont la mission n’était pas clairement définie et qui n’était pas indépendant »

Le 20 décembre 2013, le procureur financier de la CRC PACA adresse un document de 13 pages au procureur de la république de Marseille. Dans cette lettre le magistrat financier détaille le contexte et les conditions du versement des 2 millions d’€uros d’argent public à la société Laser Propreté dirigée Philippe Lasery. Le paiement de cette somme, explique la CRC, est basé sur « le rapport d’un expert dont la mission n’était pas clairement définie et qui n’était pas indépendant » Tout en précisant que cette transaction « n’a pas été approuvée par la Ville de Marseille… ». Autre élément, c’est la cession d’une partie du terrain, destiné à la construction du centre commercial « Bleu Capelette » à une société liée à Laser (Sifer, dirigée par Eric Lasery, frère de Philippe et actionnaire de Laser Propreté) « crée à son profit un avantage supplémentaire » précise le procureur financier de la CRC.

Le cabinet du maire de Marseille avait « une préoccupation prioritaire »

Le 30 janvier 2014, le parquet de Marseille ouvre une enquête préliminaire. Les policiers de la division économique et financière de la PJ de Marseille, procèdent aux vérifications et aux auditions des différents protagonistes de cette affaire, dont les frères Lasery, Charles Boumendil, le directeur général de Marseille Aménagement, Roland Blum adjoint au maire de Marseille et Vice-Président délégué à MA, ou encore Claude Valette adjoint à l’urbanisme.

Il ressort des éléments de l’enquête que le cabinet du maire de Marseille avait « une préoccupation prioritaire » et «une volonté souveraine » de faire construire le Palais de la Glisse avant les élections municipales de 2008. En clair, les 2 millions d’€uros versés à la société Laser pour qu’elle quitte le terrain, au plus vite et à l’amiable « sans attendre le terme de la convention, ni une décision judiciaire définitive, et sans lancer de procédure d’expropriation. » relèvent les enquêteurs. Les domaines avaient estimé que l’indemnité d’éviction, ne devait pas dépasser 153 200 €uros. Les policiers pointent un rapport d’expertise, qualifié de « complaisant », rendu par Claude Roussel expert immobilier, qui entretenait des relations amicales avec Charles Boumendil. Ce même expert a préconisé une indemnisation d’éviction à hauteur de 2 millions d’€uros. Au lendemain de la remise du document, les deux parties, signaient un protocole d’accord et la somme est versée dans les mois qui suivent.

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

Détournement de fonds publics

Dans les conclusions de l’enquête, rédigées en mars 2015, les policiers considèrent qu’il n’y a pas lieu à poursuivre, les frères Lasery pour la vente du terrain sur lequel devait être construit le centre commercial « Bleu Capelette ».

Juin 2015, un juge d’instruction est désigné, pour mener l’enquête, qui semble stagner. Septembre 2018 un autre magistrat instructeur est désigné. En 2020, plusieurs protagonistes de cette affaire sont mis en examen dont Charles Boumendil pour notamment détournement de fonds publics. Il encourt, au maximum, 10 ans de prison et 1 million d’€uros d’amende. Et Philippe Lasery pour recel de détournement de fonds publics. Il encourt au maximum 5 ans de prison et 375 000 €uros d’amende.

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

Autoroute et déchetterie

Pour le moment, le palais de la glisse borde l’autoroute qui relie Marseille à Aubagne, d’un côté il est bordé par un terrain vague, sur lequel devait être construit le centre commercial Bleu Capelette ; le projet a été abandonné.

Un nouveau quartier devrait voir le jour mêlant des immeubles d’habitation, cinéma hôtel et commerces

En face de l’entrée du POMGE se trouve une déchetterie et un centre de transfert de déchets. Voilà pour le décor.

Champions de France

Sous la glace de la patinoire des soupçons de détournement de fonds publics. Sur la glace, les hockeyeurs du Spartiates Marseille. Le week-end dernier, ils sont devenus champions de France de D1. C’est le premier trophée de l’histoire du club créé en 2012.

 

 

26 Avr

Comparutions immédiates du lundi

« J’ai connu une personne de Paris qui m’a dit qu’à Toulon on pouvait vendre et que ça paie mieux qu’à Paris. »

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

120 €uros, 80 grammes de résine de cannabis et 2 grammes d’herbe.

Dans le box, Oumar 21 ans, filiforme, un maillot du PSG sur les épaules, écoute attentivement la présidente Karine Molco qui résume les faits reprochés. Le 23 avril Cité Picon dans le 14ème arrondissement de Marseille, des policiers surveillent un plan stup (un point de vente) ils voient un jeune homme, qui, à deux reprises, fait une transaction, pochon en plastique contre billets de banque. Les fonctionnaires passent à l’action et l’interpellent le jeune homme. En sa possession 120 €uros, 80 grammes de résine de cannabis et 2 grammes d’herbe.

« je suis de Paris, je suis venu vendre à Toulon et à Marseille… »

« J’étais vraiment là pour vendre, c’était moi le vendeur » Oumar reconnaît sans détour les faits reprochés et rajoute : « je suis de Paris, je suis venu vendre à Toulon et à Marseille… »

La présidente : »pourquoi ? »

Oumar : « je ne sais pas, comme ça…j’ai connu une personne à Paris, qui m’a dit qu’à Toulon, on pouvait vendre et que c’était mieux payé qu’à Paris. »

De 12h à 22 heures, payé 100 €uros la journée.

La président reprend la parole et précise qu’Oumar a été interpellé à Toulon, pour les mêmes raisons le 5 avril dernier et qu’il est sous contrôle judiciaire avant d’être jugé prochainement. Le jeune homme précise que c’est son premier jour de vente, à Picon, et qu’il avait besoin d’argent pour s’acheter un billet de train et retourner à Paris. Il précise qu’il vend de 12h à 22 heures, payé 100 €uros la journée.

« Ben moi, c’est 100 €uros par jour. Je me suis fait arnaquer ! »

Une des deux assesseurs lui demande s’il a été recruté par le biais des réseaux sociaux en indiquant que la semaine dernière : » vos collègues disaient qu’ils étaient payés 250 €uros par jour et qu’on leur prenait une chambre d’hôtel. »

« Ben moi, c’est 100 €uros par jour. Je me suis fait arnaquer ! » Répond Oumar qui rajoute ne pas être lui-même consommateur de cannabis.

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

Sur les éléments de personnalité la présidente demande s’il a travaillé ou s’il suit une formation. Oumar a travaillé, jusqu’en janvier au service civique des espaces verts des Mureaux en région parisienne et qu’il veut s’engager dans l’armée. La magistrate réagit : « si vous avez un casier stups, ça va être compliqué ! »

« Ici on a des gens qui acceptent de jouer les petites mains au bas des immeubles, il y en a de moins en moins dans cette ville. »

Le vice procureur, Florent Boitard, prend la parole : « cette drogue qui n’est pas bonne pour monsieur, elle circule de mains en mains pour finir dans les cerveaux. …Ici on a des gens qui acceptent de jouer les petites mains au bas des immeubles, il y en a de moins en moins dans cette ville. Les organisateurs recrutent loin… La question, c’est la peine. 10 ans encourus… Le cannabis, il s’agit d’une drogue, avec des effets toxiques, les médecins le disent. Je demande 3 mois de prison avec maintien en détention.

» Je comprends ce qu’a dit le procureur. La drogue, moi aussi, j’en ai fait les frais. »

Maître Thomas Hugues plaide pour Oumar il précise au tribunal que la prison ferme n’est pas la solution. Selon lui, la pédagogie serait plus efficace vu le profil de son client en rajoutant : «la situation d’Oumar est très triste. Faire venir de loin, des petits jeunes à qui on fait miroiter des gains… »

En conclusion Oumar rajoute : » Je comprends ce qu’a dit le procureur. La drogue, moi aussi, j’en ai fait les frais. »

Finalement le tribunal reconnaît, Oumar, coupable des faits de vente et de transport de stupéfiant et le condamne à six mois de prison avec sursis probatoire de deux ans, interdiction de paraître à Marseille et obligation de travailler ou de se former. Ce soir, Oumar, qui n’a pas voulu que sa mère soit informée de sa garde à vue, et de sa comparution, est libre.

21 Avr

BAC Nord Dernier jour du procès.

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

«Cette affaire a détruit ma vie, professionnellement et psychologiquement… »

(Régis Dutto)

Dernières plaidoiries de la défense

« Un dossier singulier du début à la fin !»

La plupart des conseils a tenu à démontrer au tribunal que leurs clients sont de « bons flics, d’excellents éléments…des hommes intègres et appréciés par leur hiérarchie et qui font du bon travail » Les faits de détention et de transport de stupéfiants reprochés sont en réalité liés à la rémunération des indicateurs de police « sans qui les belles affaires, n’existeraient pas. » Ils ont tous dénoncé les neuf années de délai entre l’ouverture de l’enquête et le procès. D’après Maître Laurent Bartolomei, qui défend Rodolphe Salvat « c’est un procès singulier, par la longueur de l’enquête, le nombre de prévenus (18 ndlr) et leur personnalité. Un dossier singulier du début à la fin !». Selon Maître Dominique Allegrini qui représente Régis Dutto, il contextualise : »ce dossier est l’illustration de l’asphyxie des quartiers nord…les quartiers nord c’est 270 000 habitants et 70 fonctionnaires de la BAC… » Avant de tirer à boulets rouges sur l’enquête menée par la police des polices (l’IGPN ndlr) : »une information ouverte par un procureur (Jacques Dallest) amoureux de la communication ; une enquête menée par un préfet (Alain Gardère) amoureux de lui-même et un patron de l’IGPN (Didier Cristini) amoureux de la mort… »

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

Les avocats ont admis que leurs clients ont commis des fautes administratives qui ont été sanctionnées par des commissions de discipline « mais en aucun cas ce sont d’infractions pénales ». Tous ont demandé la relaxe pour leurs clients et si le tribunal venait à les condamner, la non-inscription au B2 du casier judiciaire.

« Ils seraient prêts à se sacrifier pour me défendre, même si j’ai requis contre eux. »

André Ribes le procureur adjoint, reprend la parole, et ne s’est pas opposé en indiquant : »…ces personnes ont repris la confiance… s’ils devaient assurer ma sécurité personnelle, je n’ai aucun doute qu’ils exerceraient leur mission et seraient prêts à se sacrifier pour me défendre, même si j’ai requis contre eux. »

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

Derniers mots des prévenus

« On n’a jamais été des ripoux, on a été traînés dans la boue. « 

Avant la clôture du procès, les prévenus, à qui la justice reproche d’avoir notamment commis des vols aggravés et des infractions à la législation sur les stupéfiants, ont eu la parole en dernier.

Régis Dutto révoqué de la police est devenu infirmier à la prison des Baumettes, il est le premier à s’exprimer à la barre : »cette affaire a détruit ma vie, professionnellement et psychologiquement. Quand j’étais en prison, j’ai entendu le ministre dire qu’on avait sali l’uniforme. On a risqué notre vie tous les jours. On n’a jamais sali l’uniforme et pas sali l’institution.» Second à prendre la parole, Stéphane Joly, exclu deux ans dont un avec sursis, est devenu permanent du syndicat Alliance police : « cette affaire m’a bousculé dans mes fondements. Ces 15 jours, ça a été une grosse épreuve. On craignait et on attendait ce procès, malgré tout. Vous nous avez écoutés et on espère avoir été entendusYann Cabrol, exclu deux semaines dont une avec sursis : « aujourd’hui, je suis retourné à la BAC Nord, malgré ce qu’on a dit sur mon intégrité. Je voulais montrer, qu’on a pu se tromper sur nous ». Jean Fiorenti, exclu 24 mois dont 15 avec sursis, est chef de brigade à Avignon : « cette affaire de la BAC Nord, ça a été beaucoup de souffrances, c’est encore beaucoup de souffrances. On est marqués à vie par cette affaire. On essaie de se reconstruire tant bien que mal. Pendant ces neuf ans on a réussi à sortir la tête de l’eau, j’espère qu’on ne va pas nous la remettre. » Dernier à prendre la parole, Mohamed Chenine, exclu six mois dont quatre avec sursis, l’ancien chef du groupe B : « je vous confirme qu’on n’a jamais été des ripoux. On a été traînés dans la boue. Mon honneur a été sali. »

Le jugement sera rendu jeudi dans l’après-midi

Procès BAC Nord Plaidoiries de la défense et cluster

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

Au septième jour du procès des anciens policiers de la BAC Nord de Marseille les plaidoiries de la défense battent leur plein.

Ces plaidoiries se tiennent l’absence de cinq prévenus. Depuis lundi 19, jour de la reprise du procès, trois prévenus ne se sont pas présentés en raison d’un test positif à la Covid-19, réalisé durant le week-end ; en fin de matinée un quatrième puis un cinquième ce mardi matin.

Nous avons contacté l’Agence Régionale de Santé, qui, indique que des investigations sont en cours, et n’a pas identifié de foyer de contamination, tout en précisant qu’un cluster c’est à partir de trois cas.

Maître Alain Lhote

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

« On a jeté à la décharge publique l’honneur de Carrasco »

Le premier à prendre la parole en début d’après-midi de ce mardi, Maître Alain Lhote. Il défend Bruno Carrasco, l’un des trois policiers révoqués. Le procureur a requis contre son client, 3 ans de prison dont 6 mois ferme. Selon l’avocat ce réquisitoire à deux voix de plus de quatre heures a été « un accouchement au forcepsqui jette un voile pudique sur des pratiques bien connues de tous, et surtout de la hiérarchie : c’est la rémunération des indicateurs de police, ne pas en parler, cela ne me parait pas très honnête ». Le conseil de l’ancien policier a précisé que si le tribunal condamne son client, « ce sera la double peine,  après une sanction extrême, avec la révocation. » L’avocat marseillais dénonce un dossier mal ficelé « pour combler le manque de moyens », des prévenus « abandonnés par une hiérarchie carriériste, qui joue les vierges effarouchées, et ne pas savoir comment les tontons sont rémunérés. ». Maître Lhote accuse une affaire «  qui est le fruit d’un mariage incestueux entre les médias qui ont été manipulés qui ont allumé un bûcher, un préfet ambitieux et un procureur ultra-communiquant…». Pour le conseil, les 18 policiers sont des victimes : «On a jeté à la décharge publique l’honneur de Carrasco et de ses collègues au mépris de la présomption d’innocence…Carrasco a déjà tout perdu. Cette seule chose qui lui reste, c’est son honneur. Il a le sentiment d’avoir été brisé par sa hiérarchie. Il reste un homme. Je demande la relaxe. »

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

« Une relaxe. Exclusivement une relaxe ! « 

Dans l’après-midi, d’autres avocats ont plaidé pour leur client dont Maître Pascal Roubaud pour Guillaume Laborde-Ta « mon client n’a que des témoignages de satisfaction de ses supérieurs. Cet homme est un honneur pour la police….pour lui ce doit être une relaxe. Exclusivement une relaxe ! »Et Sandrine Pauzano pour Mathieu Ponchant : «  mon client, c’est le moins bacqueux de tous les bacqueux, il est victime d’un dossier à charge…il mérite la relaxe. Il a besoin d’être réhabilité dans son honneur de policier. »

Les plaidoiries de la défense se poursuivent encore mercredi.

Le jugement devrait être rendu jeudi 22 avril.

 

 

16 Avr

Voyage au cœur de la BAC Nord

Fin de la première semaine du procès des 18 ex policiers de la BAC Nord

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

Ces quatre jours de procès ont permis de s’immerger au cœur du fonctionnement de la BAC Nord de Marseille, de décortiquer des pratiques quotidiennes et des contraintes que rencontrent les policiers dans l’exercice de leur activité.

Sur le banc des prévenus 15 sont encore en exercice dans divers services de police de la région et d’ailleurs; certains officient dans des BAC hors Marseille et un a réintégré la BAC Nord. Trois ont été radiés. Ils sont âgés de 37 à 60 ans.

« On a été salis et traités de voyous. »

Tous ont parlé de l’enquête qui les a visés, de la garde à vue traumatisante en mettant en cause l’attitude des enquêteurs de l’IGPN. L’un d’eux dira : « on m’a empêché de me brosser les dents et de changer d’habits… ». Parmi les sept qui ont été incarcérés pendant deux mois et demi, Sébastien Soulé, va lâcher après avoir réprimé un sanglot, que la détention : « la prison, ça vous change un homme… ». Depuis, il est devenu permanent du syndicat Alliance.

Ils sont venus à ce procès pour laver leur honneur et retirer l’étiquette « ripoux » qui leur a été collée sur eux. « On a été salis et traités de voyous. »

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

»vous aviez connaissance que vos agissements étaient illégaux ? »

Ces quatre jours d’audience, ont mis au jour un fonctionnement particulier, « il n’y aucune procédure, aucune transparence sur le fait qu’un fonctionnaire saisit du cannabis, hors de tout cadre légal.» s’écrie Cécile Pendariès, la présidente du tribunal correctionnel, en rajoutant : »vous aviez connaissance que vos agissements étaient illégaux ? »

Au cours de ces longues journées, la présidente a entendu un à un les 18 protagonistes de cette affaire de vols aggravés et de trafics de drogue. Pour ces faits, qui datent de 2012, ils encourent au maximum 10 ans de prison.

Ces auditions ont montré que la présidente Cécile Pendariès, s’est trouvé confrontée à des hommes qui ont maintenu des déclarations faites au cours de l’enquête. La magistrate a essayé de faire comprendre aux fonctionnaires que les agissements dont ils sont accusés, sont des dérives. A part quelques-uns qui ont reconnu des dérapages, comme Mathieu Ponchant qui a évoqué « une certaine légèreté procédurale »un autre dira : »on a perdu totalement la réalité des choses…. » La grande majorité est restée campée sur ses déclarations initiales, faites en garde à vue et une bonne parie a nié les faits reprochés.

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

« gros délires », « conversations fantasmatiques » ou « d’humour mal interprété «.

A l’aide de petites enceintes posées devant elle, la présidente a diffusé plusieurs sonorisations réalisées à bord des voitures de patrouille. Pour les confronter aux propos tenus dans les habitacles, elle a d’abord interrogé un à un, les fonctionnaires. Ensuite, la juge a reconstitué les équipages et leur a demandé quel était le sens de ces conversations. En réponse les prévenus ont parlé de « gros délires », « de conversations fantasmatiques » ou « d’humour mal interprété «.

Extrait d’un enregistrement réalisé dans la voiture de patrouille, le 10 août 2012.

« Qui a des clopes ?

-Un autre : vous voulez récupérer des clopes ?

-Si tu veux

-J’ai gardé … les « mal » light pour ma copine si ça ne vous dérange pas

-Non ! Non ! Non ! Mais les light

-Joli !

-Bizarrement ils sont partis

-C’est dommage

-Y’a pas le négro qu’est parti en courant ?

-Ouais il est parti.

-J’adorais, c’était de venir à pied là, putain, quand j’étais à l’UTEQ on leur raflait des cartons entiers ! «

A la barre Matthieu Ponchant affecté à la BAC Nord depuis juillet 2011 : « Si on avait pris le vendeur, on l’aurait interpellé et on avait les cigarettes, comme ça on faisait l’affaire…  C’est un choix, une liberté. J’aurai dû faire une main courante.»

-Le Procureur : « votre attitude n’est pas très professionnelle. Ce ne sont pas des paroles adaptées

-Le Policier « on avait une certaine légèreté procédurale. »

Autre sonorisation diffusée par la présidente :

C’était le 9 septembre 2012 : L’équipage composé de quatre hommes dont notamment David Gabens et Sébastien Laplagne. Ils contrôlent un voleur présumé qui détient des chaînes en or :

« Eh viens voir. C’est de l’or ? La chaîne, c’est de l’or ou pas ?

-L’individu : chai pas

-Tu les as arrachées et tu sais pas?  

-L’individu : non, je les aie pas arrachées 

-Bon allez file nous deux barrettes et on te laisse tranquille, …on repasse dans une heure

-L’individu: j’ai rien moi

-C’est quoi ton nom toi, …tu habites où?… Salengro. Ca va, à plus tard »

 A la barre, Sébastien Laplagne, surnommé « Bob », 9 ans de BAC Nord derrière lui. A la tête du groupe C, précise qu’il s’agit d’une conversation isolée.

La présidente : « vous êtes le chef du groupe. Qu’est-ce que cela vous inspire ? »

Sébastien Laplagne : « je ne peux pas avoir la maîtrise de la parole de tous. »

La présidente : »Ce n’est pas normal qu’on s’interroge quand on entend un policier dire à un jeune donne nous deux barrettes de cannabis ? »

Sébastien Laplagne : « ça reste une discussion avec de l’humour. »

Ces traits d’humour ne sont pas du goût du procureur adjoint, André Ribes, qui tonne : » soit on ne s’arrête pas pour lui dire, c’est de l’or, soit on le contrôle. Si on me fait ça à 16 ans, et qu’on m’a dit que la police n’est pas avec moi, je comprends pourquoi. Ce n’est pas étonnant, après qu’il y a des soupçons. Si on ne fait pas ça, il n’y a pas de rumeur… »

Autre sonorisation diffusée par Madame Pendariès. Les policiers ont amené un homme dans leur voiture et s’aperçoivent qu’il a dissimulé 250 €uros dans ses chaussettes. Les faits se sont déroulés le 3 août 2012, dans l’après-midi. Extrait :

Un policier « c’est quoi ton nom ?

L’homme : Daniel*

Un policier : hein ?

L’homme : Daniel

Un policier : Comment tu m’as dit ?

L’homme: Daniel

Un policier: hein ?

L’homme : Daniel

Un policier: tu habites ou ?

Daniel: Bougainville

Un policier : où ?…

La discussion s’envenime entre Daniel et les policiers, qui viennent de découvrir l’argent caché dans les chaussettes.

Un policier : au lieu de dire chef j’ai 250 euros, j’ai 200 euros hein!

Daniel: vous allez me les prendre non ? Vous allez me les prendre ?

Un policier : Je m’en bats les couilles d’où ça vient hein !

Daniel: vous allez me le prendre ? Si vous allez me le prendre !

Un policier: et que tu me caches 200 euros … pourquoi tu me caches 200 euros ? Écoute-moi, ils viennent d’où les sous ? D’où ils viennent les sous ?

Daniel: depuis chez moi, rends les moi alors!

Un policier : attends ! Attends Arnaud !… (inaudible) nan tu vas voir ! On va l’amener à la carrière ! …

Daniel : je suis sûr que vous allez me prendre mes sous ! Je suis accroché mes sous … parce qu’après on me les prend mes sous!

Un policier : (autoritaire et sûr de Daniel) : moi je te les prends, tu vas voir si je te les prends !

Au fur et à mesure que l’audience avance, le procureur adjoint s’agace, hausse le ton et s’étonne des libertés prises avec les procédures par les hommes de la BAC Nord.

© JFGiorgetti France 3 Provence Alpes Côte d’Azur

Un discours offensif, voire défiant

La plupart des fonctionnaires mis en cause ont tenu un discours offensif face à leurs juges, voire défiant. Tous ont dénoncé les pressions de leur hiérarchie pour faire du chiffre, et disent avoir agi au mieux. Stéphane Joly ira jusqu’à dire que la BAC Nord c’était : » le porte-avions de la police de MARSEILLE, et il fallait charbonner pour que les supérieurs montent hiérarchiquement, les chiffres font avancer leur promotion. « 

Continuer la lecture