Images France 3 Provence Alpes Sylvie Garat
Alexandra Louis, députée La République en Marche de la troisième circonscription des Bouches du Rhône LREM a rédigé un rapport alarmant sur cet ensemble d’immeubles
du 13ème arrondissement de Marseille
Hassan Abdallah, l’un des résidents, salue la parlementaire et l’entraîne dans son appartement du bâtiment du bâtiment F. L’élue n’en croit pas ses yeux. A peine franchi la porte d’entrée de ce quatre pièces de 80 m², elle voit des murs, qui portent de profondes marques d’humidité. Dans la cuisine, un trou béant laisse apparaître une tuyauterie, à certains endroits il n’y a plus de plafond, on voit les parpaings du plancher de l’étage supérieur. Dans la salle de bain, il n’y a plus d’électricité, au-dessus de la baignoire c’est la même même chose que dans la cuisine.
«8 jours après notre arrivée, le plafond de la salle de bain s’est effondré en pleine nuit… »
Hassan Abdallah
Images France 3 Provence Alpes Sylvie Garat
Mr Abdallah vit avec son épouse et ses trois enfants, depuis un peu plus d’un an, dans cet appartement, et paie un loyer mensuel de 650 euros. Cet homme de 52 ans, explique avoir fait une demande de logement social, il a reçu plusieurs réponses. Pour constituer son dossier il doit produire des pièces provenant de l’agence immobilière en charge de la gestion de son habitation. Foncia, tarde à lui fournir les documents nécessaires et lui explique qu’il peut les récupérer sur internet. Il n’y parvient pas. Pour Mr Abdallah et sa famille, la situation est bloquée et la vie devient de plus en plus difficile au quotidien. Tous souffrent d’irritation de la peau.
« Quand il pleut, l’eau tombe chez nous. Tous les gens qui utilisent de l’eau, elle tombe chez nous… »
Hassan Abdallah
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En marge de ses démarches pour obtenir un autre logement, il a décidé de déposer plainte contre le propriétaire de son appartement. Une procédure pour logement insalubre est lancée.
Un sentiment d’abandon
Dans cette matinée de fin d’été, la députée continue sa déambulation dans le parc Corot, elle est souvent interpellée par les habitants. Tous se plaignent de l’état et de l’hygiène de la copropriété, les rats pullulent.
« Nous ce qui nous gêne le plus ce sont les rats. Bientôt on leur dira bonjour et bonsoir… »
Mohamed Guerina Co-propriétaire
Quelques copropriétaires venus à la rencontre de la parlementaire indiquent payer des charges, proposent de montrer les justificatifs et ne comprennent pas pourquoi rien n’est fait.
« Nous avons payé des charges pour changer la tuyauterie, rien n’a été fait. On en a marre ! Ça fait trois mois qu’on attend les nouvelles poubelles. Faites quelque chose !
Une copropriétaire qui souhaite garder l’anonymat
Images France 3 Provence Alpes Sylvie Garat
Certains, n’hésitent pas à prendre la pelle pour remplir les quelques containers qui ont échappé au feu. Ils se sentent abandonnés. Alexandra Louis leur explique qu’elle n’est pas décisionnaire, mais que son rôle et sa volonté est de sensibiliser et inciter l’Etat et les collectivités de trouver des solutions pour que la situation change rapidement.
« Face à cet abandon, la copropriété ne tient que grâce à l’action des associations qui accompagnent les habitants au quotidien. »
Alexandra Louis
Dans son rapport, de juillet 2018, l’élue LREM, pointe les conditions de vie déplorables des résidents, et constate que tout n’a pas été mis en œuvre pour améliorer la situation, elle pointe l’inaction de la mairie et de l’Etat. « Face à cet abandon, la copropriété ne tient que grâce à l’action des associations qui accompagnent les habitants au quotidien. »
Photo France 3 Provence Alpes JFGiorgetti
Des difficultés juridiques
Arlette Fructus Vice-présidente de la métropole Aix Marseille et adjointe au maire de Marseille, en charge notamment de la rénovation urbaine, nous reçoit en compagnie du directeur de Marseille Rénovation Urbaine.
« Ce sont des propriétaires, ils sont protégés par le principe de la protection de la propriété privée »
Arlette Fructus
Ils expliquent que la puissance publique rencontre beaucoup de difficultés dans son action, notamment en raison du statut juridique de la copropriété. « Ce sont des propriétaires, ils sont protégés par le principe de la protection de la propriété privée ». Ou bien lorsque des actions décidées sont retardées par des rapports d’expertises qui tardent à être rendus. Madame Fructus indique qu’un plan de sauvegarde, pour le parc Corot, a été mis en place en 2016, mais retardé par des procédures et qu’un accord de partenariat, entre l’état et les collectivités, a été signé en décembre 2017. Pour terminer l’élue signale que « deux experts ont été mandatés pour diagnostiquer les bâtiments A et C. Ils ont trois mois pour rendre leur rapport ». D’après elle : « la bonne solution serait de détruire ces deux immeubles »
Photo France 3 Provence Alpes JFGiorgetti
Divers Trafics
En plus des immondices qui jonchent la cité et des rats qui pullulent, les résidents se plaignent des réseaux de vente de drogue, installés dans la cité. Le 15 juin 2016 un homme de 23 ans a été tué par une rafale de kalachnikov. Les habitants se plaignent aussi du trafic de migrants, logés dans des appartements inoccupés. Certains occupants craignent de quitter leur domicile de peur de trouver des gens installés chez eux. Cette délinquance protéiforme qui s’est développée ces dernières années rend difficile les actions des travailleurs sociaux et des collectivités publiques. Lors de certaines opérations organisées par la mairie, la police accompagne les techniciens.
Photo France 3 Provence Alpes JFGiorgetti
L’histoire
Destinée principalement aux rapatriés d’Afrique du Nord, le parc Corot est une copropriété, née sous une mauvaise étoile.
Entre 1959 et 1963, la construction rencontre des difficultés d’abord techniques, liées à la nature du terrain, puis financières par la faillite de deux promoteurs.
Au départ, le Parc Corot c’est huit immeubles de tailles différentes, et 484 logements.
Entre 1963 et 1980 la copropriété se dégrade progressivement, notamment en raison de la gestion défaillante d’un syndic. Les charges ne sont pas recouvrées auprès des copropriétaires qui ne paient pas.
Le bâtiment B est « irrémédiablement compromis tant sur le plan de la salubrité que de la sécurité »
En 1980 le bâtiment B est déclaré insalubre, la mairie de Marseille réalise les réparations au titre de sa compétence dans le domaine de la salubrité. En parallèle de l’intervention de la collectivité, un diagnostic est réalisé qui conclue que l’immeuble est « irrémédiablement compromis tant sur le plan de la salubrité que de la sécurité ». Le bâtiment B sera détruit en 1991, soit 11 ans après le premier arrêté d’insalubrité.
Depuis 1988, le Parc Corot a fait l’objet de trois diagnostics, qui confirment, la grande précarité de certaines familles, la dégradation importante du site et l’aggravation de la situation. Des mesures sont préconisées comme notamment, des préemptions, des expropriations, des rénovations de bâtiment ou la mise sous administration de la copropriété. Cette dernière sera la seule à être mise à exécution.
En 2008 une action sociale collective est financée par le Conseil Général, une opération pilotée par Marseille rénovation Urbaine. Finalement le Parc Corot est évincé du plan.
Aujourd’hui, le Parc Corot c’est sept bâtiments, 376 appartements. 1000 personnes survivent dans cette cité.
Une thèse sur « l’action publique locale sur les copropriétés dégradées » a été soutenue en mai 2017à l’université de Grenoble par Eva Simon. Deux chapitres sont consacrés à deux cités marseillaises dont le parc Corot
La vidéo du reportage de JFGiorgetti, S Garat, E Guez, I Catinaud
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Page Facebook des copropriétaires du parc Corot