27 Août

Léon Mortreux roule vers l’enfer de la Somme

LM-Gerbeviller

Ce 27 août 1916, Léon Mortreux envoie une carte postale à sa famille. Image de désolation.

Sur la carte on voit les décombres de la ville de Gerbéviller incendiée par les Allemands. Sur la photo, il est écrit en rouge :

« La Guerre en Lorraine en 1914-15-16
Gerbéviller, incendiée par les Allemands – Vue intérieure »

Au dos de la carte, juste quelques mots de Léon Mortreux :

Ce 27 matin

Viens de passer Gisors et le voyage continue Gournay-en Bray

Bons baisers du filleul de l’abbé Vallage

En fait, Léon Mortreux quitte la Lorraine pour la Picardie. Sur la carte postale adressée à la famille, Léon Mortreux ne donne pas d’informations précises. Censure militaire oblige.

C’est sur le journal de marche du régiment qu’on peut lire en détail l’itinéraire et la destination du régiment de Léon Mortreux : la Somme. 

La veille, le samedi 26 août 1916, Léon et le 3è Bis Zouaves sont partis de la gare de Bayon en Meurthe-et-Moselle. Léon Mortreux a quitté la Lorraine dévastée par la guerre pour rejoindre la Picardie.

Par le journal de marche, on apprend que le 3è Bis Zouaves a été embarqué dans 4 trains les 25 et 26 août 1916.

L’itinéraire est très précis : Bayon – Mirecourt – Neufchateau – Bar-sur-Aube – Troyes – Brie-Comte-Robert – Versailles – Pontoise – Gisors – Gournay-en-Bray – Grandvilliers.

Pas d’accrochage avec l’ennemi sur le parcours. Le 1er train arrive le 26 août en Picardie, les 3 autres dans la nuit du 26 au 27 août. Sur le journal de marche du 3è régiment, il est écrit :

Rien à signaler en cours de route pendant le voyage.

Le 3è Bis Zouaves rejoint le Front de la Somme.

Pourquoi les chefs militaires ont décidé de renforcer les armées dans la Somme ? Léon Mortreux sait que depuis le 1er juillet 1916 les Anglais et les Français sont lancés dans une grande offensive contre les Allemands.

Ce que Léon ne sait pas c’est que la Bataille de la Somme sera une des batailles les plus sanglantes et meurtrières de la Grande Guerre.

 

23 Août

Léon Mortreux fier d’être chef de pièce de canon de 37 du 3è Régiment de Zouaves

Ce 23 août 1916, le sergent Léon Mortreux écrit une longue lettre à son oncle Fernand Bar. Son régiment, le 3è Bis Zouaves, est sur le front Lorrain.

Aucun lieu, aucune ville citée dans la correspondance de Léon Mortreux. Selon le journal de marche du régiment, le 3è Bis Zouaves occupe les cantonnements de Tonnoy au sud de Nancy.

Dans sa correspondance de guerre, Léon se veut rassurant pour sa famille … « jusqu’à maintenant, je me plais au front ».

Son bataillon n’est pas encore en toute première ligne. La troupe multiplie les exercices, dispositif d’attaque, exercice de liaison, occupation d’une tranchée, dans le secteur d’Haussonville en Lorraine.

J’ai participé à des attaques simulées de tranchées par vagues successives avec tout le secours de la science , téléphone, signaux, etc … c’était très intéressant pour tous.

Si le moral paraît bon Léon montre encore son agacement dans sa lettre. Il est affecté par les remarques de quelques « camarades » sur ses 18 mois loin du front, après sa blessure en septembre 1914 à la Bataille de la Marne.

Pour rappeler à ses compagnons de troupe qu’il n’est pas « un débusqué de l’arrière », Léon explique avoir cousu sur sa manche le chevron d’un soldat rengagé.

J’ai cousu ma brisque de blessure. Je vais avoir au bras gauche l’insigne de chef de pièce de canon de 37

Agacé et fier. Le sergent Léon Mortreux, nommé chef de pièce de canon de 37, montre une certaine gloriole. Il écrit qu’il pourra « chiner Papa sur l’artillerie ». Léon précise en détails les manoeuvres réalisées avec les 6 servants de ce canon pouvant tirer jusqu’à 2 400 mètres.

Entre un Capitaine « originaire d’Asie et un marin Marseillais aux boniments rigouillards » l’ambiance est bonne dans la section. Léon Mortreux semble en confiance, « encaisse les coups ». Il ajoute que les obus ne l’empêchent pas de dormir. « Dans un frêle cagna, je dormais très bien, dans des bois « arrosés » près des lignes. »

En écrivant cette correspondance de guerre, Léon pense à ses frères Pierre et Jules dont les lettres étaient sombres et graves.

 La tristesse des lettres de notre cher Jules venait qu’il avait été dès son arrivée au front, jeté sur Vauquois. Vauquois avec ses pentes couvertes de cadavres, son horreur et puis c’était l’hiver.

Léon Mortreux

Léon Mortreux

Fernand Bar

Fernand Bar

Ce mercredi 23 août 1916, Léon Mortreux écrit à son oncle Fernand Bar qu’il ne croît pas à une fin prochaine des hostilités.

« Chacun reste trop fort ».

 

Selon le journal de marche du 3è Régiment de Zouaves, ce jeudi est une « journée laissée libre à la disposition des unités en vue d’un départ imminent. »

Le régiment se prépare à quitter la Lorraine avant la fin de la semaine pour un nouveau front … et Léon ne pense pas avoir de permission avant Noël.

je me fais une raison, je sens que nous luttons pour des droits de valeur inestimable.

Correspondance de guerre, du 23 août 1916 … il y a cent ans.

23 août 1916

Cher Oncle,

Pendant que je suis en veine d’écrire, je laisse un peu courir ma plume.

Tout d’abord et jusqu’à aujourd’hui du moins, je me plais au front … qu’il vaut mieux qu’il en soit ainsi c’est évident mais enfin j’aurais pu encaisser la pilule moins allègrement comme certains « camarades » me voudraient le voir faire. Comme si une peine qui arriverait à un prétendu embusqué, que j’ai été, les soulagerait, eux …

Je n’ai pas besoin de te dire que facilement, je les déçois. D’ailleurs, si j’aurais pu jadis être plus malheureux certes, il n’en est pas moins vrai que j’ai appris ce qu’étaient la souffrance et les privations.

Comme les mulets, il y a longtemps que je me suis fais au bât. Je me nourris de peu pourvu que ce soit sain, nul n’est moins difficile que moi pour le coucher et … l’élégance.

Aussi au Dépôt n’étais-je pas un type d’embusqué car on ne me voyait guère dans les grands restaurants chics et portant sur une somptueuse tunique un col de 10 cm de haut.

Peu importe d’ailleurs que l’on croit que je suis un débusqué de l’arrière … la famille a largement payé son tribut et d’ailleurs tu sais que je n’ai jamais rien fait pour ajourner mon départ pour le front. J’ai la conscience tranquille à ce sujet.

Je comprends très bien ces mouvements d’humeur que peuvent avoir les vétérans du front devant un nouvel arrivé qui a beaucoup de Dépôt. Je sais que je serais moi-même sous cette impression d’acrimonie si on inversait les rôles.

Je me rappelle avoir éprouvé des sentiments peu charitables quand au Dépôt au sujet de l’arrivée de types relevés des états-majors ! Pourtant ils pouvaient avoir, eux-aussi, d’excellentes raisons d’y être restés longtemps.

Ne crois pas que nous discutions tous les jours. Les seules fois où la question « d’embuscade » revient sur le tapis, me sentant visé, cela m’a toujours agacé.

Une bonne attaque, côte à côte, avec les copains amènera la solidarité entière et fera disparaître toute arrière pensée, mieux que de gloutonnes libations pourraient le faire. Peut-être la date de cette attaque est-elle rapprochée … mais je ne le sais.

Je ne pense pas recevoir mon canon avant quelque temps. D’ailleurs je ne suis pas autrement pressé. J’ai beau être rempli de bonnes intentions, le bouclier de 30 kg est lourd à porter pour mes faibles bras. Il doit être traîné en rampant par le chef de pièce. Il est évident que lorsque la pièce est montée sur roues, le poids semble infime. Et puis, il y a le repérage pour l’artillerie ennemie …

Pour ma sécurité personnelle et l’entraînement par émulation j’aurais préféré, je crois l’avoir déjà dit, rester parmi les camarades mais … on ne m’a pas demandé mon avis, je n’ai qu’à obéir. C’est pour servir cette pièce, pour garder son contrôle, qu’il va falloir cette bravoure froide dont tu m’as parlé, cette bravoure utile, nous nous y essaierons.

J’ai cousu ma brisque de blessure. Je vais avoir au bras gauche l’insigne de chef de pièce de canon de 37 … je pourrais « chiner » Papa sur l’artillerie. Sur la puissance de celle-ci, j’ai eu maintes explications pour les amis revenant de Verdun qui est, je crois, l’apogée de ce que l’on peut être appelé à affronter.

Ici beaucoup plus d’exercices pratiques qu’au Dépôt. J’ai participé à des attaques simulées de tranchées par vagues successives avec tout le secours de la science , téléphone, signaux, etc … c’était très intéressant pour tous.

Pour en revenir à la question « artillerie » il paraît et je le conçois que la Marne n’était rien auprès de ce que l’on subit et donne aujourd’hui. Pourtant question émotion, je me suis trouvé plusieurs fois dérangé parmi les copains, à table par exemple, par des explosions alors très voisines. Je voyais l’effet sur leur visage, leur attitude et n’étais aucunement plus « frappé » qu’eux.

Personnellement, d’après mes remarques, je ne trouve pas qu’un long séjour au front permet à l’homme d’infanterie de bien reconnaître un son s’il s’agit d’un départ ou d’une explosion d’obus, ceci pour tirs à distance longue, bien entendu.

Dans un frêle cagna, je dormais très bien, dans des bois « arrosés » près des lignes. Tout est question d’habitude. J’ai un capitaine très gentil, très chic et calé. Il est originaire de une de nos colonies d’Asie. Un sergent Marseillais, ancien marin, est avec moi à la section … il a des boniments rigouillards et croit dur comme fer qu’il ne lui arrivera aucune blessure ni maladie. Il va bientôt partir en permission.  

Pour moi, je ne pense pas avoir mon nom sur la liste avant Noël. Je tâcherai de ne pas avoir les pieds gelés avant cette époque. J’ai le temps de les tanner. Tu vois que je ne crois pas à une fin prochaine des hostilités. Chacun reste trop fort. Mais je me fais une raison, je sens que nous luttons pour des droits de valeur inestimable.

Comme tu t’en rends compte, j’encaisse bien les coups. La tristesse des lettres de notre cher Jules venait qu’il avait été dès son arrivée au front, jeté sur Vauquois. Vauquois avec ses pentes couvertes de cadavres, son horreur et puis c’était l’hiver.

N’oublie pas malgré tout de m’envoyer de bonnes lettres affectueuses comme tu sais les créer et à te lire, reçois Cher Oncle toute ma reconnaissance et mes nombreux baisers.

Ton cher neveu, Léon

Ici pas d’ennuis de rats … mais toujours abondance de puces.

Villages en + comme tous ceux de la région, maisons basses, tuiles rouges, façades cimentées blanc uni … eaux suffisantes saines … gens courageux intéressés à cette époque de la guerre je leur pardonne leur amour du billon. Champs entretenus méticuleusement, beaucoup de bestiaux et volailles à plumes et à poils.

 

02 Août

Léon Mortreux porté par la progression des Alliés est impatient de retrouver le Front

Après 21 jours de formation, le sergent Léon Mortreux annonce à son oncle Fernand Bar qu’il quitte son secteur. Quelle destination ? Il l’ignore encore.

Ce mercredi 2 août 1916, Léon rappelle qu’il y a tout juste 2 ans, les Allemands ont déclaré la guerre. Et aujourd’hui, 2 ans après – dit-il – … c’est la débacle !

Un peu présompteux, Léon a hâte d’en découdre avec l’ennemi, « transporté par l’attitude combative des alliés et la progression des anglais » sur le front de la Somme, dans le Nord et dans le secteur de Verdun.

Correspondance de guerre, du 2 août 1916 … il y a cent ans.

2 août 1916

Cher Oncle,

Je viens de recevoir ta lettre de dimanche et te remercie.

Ici, je continue mes études intéressantes. Nous manquons de certains appareils d’optique pour qu’elles puissent être poussées à souhaits.

D’ailleurs, 21 jours de stage, c’est bien peu.

Beau temps, trop de chaleur même ! Et vous ?

Vendredi nous quitterons le pays, ne m’y écris donc plus.

Que fera-t-on de nous … remonterons-nous aux tranchées en attendant que des pièces neuves arrivent ! Je te fixerai sur cela dès que possible.

Je n’ai pas eu de nouvelles de la Division pendant mon absence et ne sais si’il y a quelque chose de très intéressant qui la concerne.

J’aimais beaucoup les camarades de ma section de la 2è Compagnie et verrai sans déplaisir le canon qui nous sera dévolu arriver aussi tard que possible …

J’expliquerai cela en détails quand j’irai en permission en … novembre ou décembre prochain.

Mais dès maintenant, combien je suis transporté de voir comment combative est actuellement l’attitude des alliés. Puisse-t-il en être aussi jusqu’à la fin des hostilités … vraiment les Anglais marchent bien.

Aujourd’hui, 2è anniversaire de la Déclaration de la guerre et où en sont les Allemands ? … à la veille de la débâcle ! Cela a coûté cher, nous le savons que trop. Et c’est ce que sert de frein à mon impatience.

Dans mon truc d’artillerie, c’est la sécurité parfaite ou la mort, rarement la blessure. Car à une courte distance, telle que notre portée, tu penses qu’une fois encadrés de 88 ou de mines, personne n’échappe guère vivant et un canon c’est aussi de nombreux projectiles de destruction.

A nous d’avoir fait le plus de tort possible aux B… avant de disparaître. A nous de nous défiler le mieux possible pour garder notre pièce le plus de temps que nous le pourrons.

De Paris, bonnes nouvelles ! Je remarque toutefois que toute la correspondance ne m’arrive pas. Une lettre à laquelle Berthe fait allusion n’a pas été reçue par moi ( celle relative aux militaires ayant eu 2 frères tués )

Quoi de neuf à Béthune ? As-tu toujours énormément à faire pour l’intendance.

Pour l’instant, je n’ai besoin de rien. Je t’écrirai à ce sujet en rentrant au Corps. Merci toutefois pour ton offre généreuse.

Ici, grondement de canon dans le lointain. Notre petit obus d’exercice est plus modeste, ne gronde pas mais pète sec. Il fait un trou d’environ 50 cm de diamètre et profondeur. La pièce est très démontable mais on en a sa charge.

Je t’espère bien portant. Ici toujours moral et santé excellentes.

Je t’embrasse de tout coeur.

Ton neveu reconnaissant.
Léon

Merci pour les Daily Mail
Souvenir à Marie et à Jeanne

As-tu reçu ma carte postale contenue dans l’enveloppe Marie Delelis ?

09 Juin

Léon Mortreux rejoint le 3è Régiment Mixte de Zouaves et Tirailleurs en Lorraine

Carte1Leon

Ce 9 juin 1916, Léon Mortreux fait route vers l’Est de la France pour rejoindre son nouveau régiment.

Léon donne des nouvelles à son oncle Fernand Bar à Béthune. Il écrit quelques mots sur une carte « Correspondance des Armées de la République », une carte en franchise militaire.

Aucune indication de lieu, aucun renseignement sur les opérations militaires. Cette correspondance de guerre remise au vaguemestre passe entre les mains de la censure de l’armée avant d’être envoyée à son destinataire.

Dans son courrier de juin 1916, Léon Mortreux ne donne pas d’indications précises sur sa route …  mais entre les lignes, nous pouvons retracer son parcours.

Parti le 8 juin 1916 du Dépôt du 1er Régiment de Zouaves basé à Saint-Denis, près de Paris, Léon Mortreux fait route vers l’Est de la France. Dans cette correspondance, le Béthunois précise que le détachement militaire fait une halte, le 9 juin « dans la ville qui porte le nom du Ministre anglais des affaires étrangères »... à une lettre près

Pas d’indication de lieu, c’est interdit par la censure militaire, mais un jeu de devinettes très pratiqué par les poilus pour communiquer avec leurs proches. Léon, l’anglophile, sait que son oncle connait Edward Grey Foreign Minister of England. Après lecture de la correspondance, Fernand Bar a ajouté dans la marge de la carte le nom de la ville-étape : Gray entre Dijon et Besançon.

Léon Mortreux rejoint le 3è Mixte des Zouaves en Lorraine

Temps maussade, bonne ambiance. Léon parle du climat … de la météo et du moral de la troupe. Après cette halte à Gray, Léon écrit que le détachement reprend la route avec « bon entrain » pour intégrer le nouveau régiment, le 3è Régiment Mixte des Zouaves et Tirailleurs … une destination qui n’a pourtant rien de « joyeuse » pour les « joyeux » zouaves.

Le nouveau régiment de Léon Mortreux est en Meurthe-et-Moselle autour de Baccarat. En ce mois de juin 1916, c’est l’heure de la relève pour le 3è Bis Zouaves après de durs combats dans le secteur de Verdun.

Le 10 juin 1916, Léon Mortreux aura rejoint son nouveau régiment dirigé par un nouveau chef. Le Lieutenant-Colonel Trapet vient de prendre le Commandement du 3è Bis Zouaves.

Correspondance de guerre, il y a cent ans …

9 juin 1916

Cher Oncle,

J’espère que ces lignes te trouveront bien portant. 

Nous nous sommes mis en route hier, embarquement dans la ville où habite Jeanne Bar … tu vois la direction.

Pour l’instant reposons quelques heures dans la ville qui porte le nom du Foreign Minister of England, naturellement l’orthographe est différente.

Bon entrain dans le détachement, quoique que le temps ne soit pas de la partie.

Je trouve mon sac lourd. J’ai pris trop d’affaires.

Mon régiment s’appelle le 3è Mixte. Je t’indiquerai au plus tôt mon secteur.

Bons baisers
Léon

08 Juin

« Je ne veux pas partir avant de te dire merci » Léon Mortreux retourne sur le front

Leon-Mortreux-juin-1916

Ce 8 juin 1916, Léon Mortreux écrit une lettre à son oncle Fernand Bar à Béthune … comme s’il s’agissait de la dernière.

Je ne veux pas partir avant de te dire à nouveau que je te remercie de toute mon âme

Sur la lettre, on peut lire une annotation de Fernand Bar : Léon, jour de son départ pour le front. Recommandations.

Ce jeudi 8 juin 1916, le sergent Mortreux, 1er Régiment de Zouaves, quitte Saint-Denis. Presque un soulagement pour Léon qui attendait ce moment depuis trois mois.

Depuis qu’il a rejoint, fin mars 1916, le 1er Régiment de Marche des Zouaves basé à Saint-Denis, près de Paris, Léon sait qu’il retournera sur le front.

Dans sa lettre, le Béthunois ne dit pas pour quelle destination. Verdun ? La Somme ? … ce sera la Lorraine pour rejoindre un nouveau régiment le 3è régiment de Zouaves !

En ce mois de juin 1916, après plusieurs semaines de terribles combats autour de Verdun, les unités du régiment 3è Régiment de Zouaves sont en cantonnement dans le secteur de Baccarat en Meurthe-et-Moselle à une vingtaine de kilomètres des canons allemands. Le sergent Mortreux et sa compagnie doivent rejoindre le régiment. La relève arrive.

Le désir exprimé par Léon … et ses frères

Dans la correspondance de guerre de ce jeudi 8 juin 1916, Léon Mortreux semble ne pas se faire d’illusion sur son sort. « Je ne te parle plus de testament, tu connais mes intentions … »

Léon a déjà combattu les Allemands au début la guerre en 1914. Il a connu le feu et l’horreur de la guerre. Léon Mortreux a été blessé lors de la Bataille de la Marne le 6 septembre 1914.   Il a échappé une première fois à la mort. Alors, retourner sur le front presque 2 ans après … Léon craint fortement que le destin ne lui donne pas une seconde chance.

Lui qui se considère comme « un contemplatif incohérent dans ses actes jusqu’avant la guerre », voit ici l’occasion de donner du sens à sa vie, jusqu’à envisager le pire. « Si je disparais vois-y la plus belle fin qui pouvait se produire pour ton neveu ».

Dans sa lettre, Léon rappelle à son oncle une dernière volonté partagée avec ses frères décédés depuis plus d’un an.

le désir exprimé par Jules, Pierre et moi quant à un épitaphe qui nous rapprocherait par la pensée

Léon envoie une lettre plutôt sombre. Et pourtant, ce 8 juin 1916, Léon Mortreux dit qu’il n’a rien « d’un bonhomme morose ». Avec ses compagnons du régiment de Zouaves, « de joyeux drilles », Léon salue « brillamment » le départ pour le front.

Léon Mortreux

Léon Mortreux

Fernand Bar

Fernand Bar

Lettre de Léon Mortreux à Fernand Bar, envoyée le 8 juin 1916

Au moment de rejoindre le front, Léon Mortreux témoigne sa profonde affection pour son oncle. Tu as inlassablement et généreusement remplacé auprès de moi ta chère soeur, ma pieuse mère. C’est pour cela par dessus tout que je t’aime tant.

Léon a perdu sa mère décédée en 1901 à Béthune, alors qu’il avait 16 ans.

Correspondance de guerre, il y a cent ans …

Saint-Denis
8 juin 1916

62ème Compagnie
1er Zouaves

Cher Oncle,

Je ne veux pas partir avant de te dire à nouveau que je te remercie de toute mon âme pour la tendresse que tu m’as toujours témoignée.

Tu as inlassablement et généreusement remplacé auprès de moi ta chère soeur, ma pieuse mère. C’est pour cela par dessus tout que je t’aime tant.

Beaucamps, le régiment, Londres me rappellent comme principales tes bontés dont de ta part j’ai été l’objet.

Tu fus mon maître dans la vie et je souffrirais beaucoup si un jour je devais faire quelque chose qui te déplaise.

En arrivant au front, je vais signaler mon cas au chef de corps et te dirai le plus vite possible la posture qu’il aura prise à mon égard.

Je ne te parle plus testament, tu connais mes intentions …

J’avais versé trente francs par versement mensuel de 5 francs à la S…?. Tu pourras, s’il y a lieu, faire résilier. Berthe à mes papiers qui concernent cette société.

Tu pourras faire pour elle, le changement de possession du titre à son profit si elle désire continuer ces versements.

Jules avait laissé à la maison nombre de croquis et dessins commerciaux. Il avait manifesté l’intention qu’on les soumette et donne s’il les désirait à son ami dessinateur Henri Liévaud mobilisé.

Cela sera à examiner après la guerre.

Pierre a laissé son vélo qui doit se rouiller dans le réduit. Voudrais-tu t’occuper d’examiner ce qu’il y a lieu de faire.

Si je disparais vois-y la plus belle fin qui pouvait se produire pour ton neveu, l’incohérent dans ses actes et qui jusqu’avant la guerre a été plutôt un contemplatif qu’un actif ce qu’il regrette amèrement parfois.

Tu te rappelles aussi, je t’en ai causé à Fontrannes, et t’en ai entretenu par écrit, le désir exprimé par Jules, Pierre et moi quant à un épitaphe qui nous rapprocherait par la pensée, le souvenir; des êtres chers reposant à Béthune.

Passons ces tristes lignes, mais en un tel jour, il faut penser à tout …

D’ailleurs, je ne suis pas superstitieux et je n’ai rien du bonhomme morose. Je connais ici de joyeux drilles et nous saluons brillamment le départ.

Hier je suis allé à la maison. Berthe va mieux, c’est heureux.

Pris possession du « fafiot » avec le sourire. C’est pour te faire plaisir comme dit l’autre. Je te sais gré du cadeau et aussi de la diligence que tu as mis à l’envoi, ce qui me permet de partir lesté.

Je t’ai écris il y a quelques jours de Tousson.

A bientôt l’indication de mon secteur et reçois mes plus affectueux baisers.

Ton neveu reconnaissant
Léon

Souvenir à Marie et à Jeanne

J’oubliais de parler de ta santé ! Je l’espère très bonne. J’ai vu dans ta lettre à la maison que c’est calme à Béthune.

 

25 Mai

« Mon cas spécial d’appartenir à une famille éprouvée ne me protège pas … s’il faut y retourner, on ira » Léon Mortreux

Il n’y a plus d’espoir pour Léon Mortreux d’éviter le front. Dans sa lettre du 25 mai 1916, le sergent Mortreux ne se fait plus d’illusion.

Enfin, s’il faut retourner, on ira.

Cela faisait plusieurs mois que la famille Mortreux demandait aux ministères et à l’armée de ne pas renvoyer Léon sur le front. Déjà éprouvée par la mort de 2 fils Pierre Mortreux et Jules Mortreux, la famille espérait protéger le 3è fils et éviter de nouvelles angoisses.

En vain. Léon n’est pas un cas unique. En 1916, de très nombreuses familles pleurent la mort de plusieurs enfants. Dans sa lettre, Léon précise  « Il y a sans doute eu trop de réclamants ! »

Déjà blessé une première fois en septembre 1914 à la Bataille de la Marne, Léon Mortreux espérait encore … plus maintenant. 

on cause toujours de départs imminents

Dans l’attente de ce départ imminent, Léon et le 1er Régiment de Zouaves 1ère Compagnie, multiplient les exercices à Tousson au sud de Paris.

Dans sa lettre, Léon écrit que les troupes du Dépôt de l’arrière s’entraînent avec masques et lunettes dans une salle à l’atmosphère saturée de gaz délétères.

Il sait maintenant qu’il va repartir sur le front. Où ? Verdun ?

En attendant, je ne sais pas si notre Régiment a été éprouvé dans ces attaques réitérées sur Verdun.

Léon Mortreux

Léon Mortreux

Fernand Bar

Fernand Bar

Lettre de Léon Mortreux à Fernand Bar, envoyée le 25 mai 1916

En ce ce mois mai 1916 dans le Pas-de-Calais, les gaz asphyxiants allemands touchent les habitants proches de la ligne de front.

Des masques sont distribués aux Béthunois.

Léon ne semble pas inquiet pour sa famille. Dans sa lettre il répond à son Oncle Fernand Bar à Béthune : « la tentative allemande de suffocation par gaz délétères vous a peu impressionnés. »

Correspondance de guerre, il y a cent ans …

Tousson par Gironville (Seine-et-Oise)
1er Zouaves 1ère Compagnie

25 mai 1916

Cher Oncle,

Je ne me souviens plus si je t’ai avisé de la réception de ta bonne lettre du 8 mai me disant entre autres choses que la tentative allemande de suffocation par gaz délétères vous avait peu impressionnés.

Lundi, on nous a fait une conférence sur cette camelote qu’affectionnent les Boches.

Pas 1 jour, nous passons munis de masques et de lunettes dans une salle d’atmosphère fortement saturée de ces cochonneries, le séjour de quelques minutes que nous y fûmes n’indisposa personne.

J’espère néanmoins que tu n’auras plus à m’apprendre de nouvelles tentatives meurtrières de l’ennemi soit par obus soit par gaz.

Vu mon oncle Paul, la première fois depuis la guerre à L’Hay ce dernier dimanche chez les petites. Papa et Berthe étaient venus me rejoindre. Nous avons beaucoup parlé ou plutôt « mon Père » a beaucoup causé principalement sur les Zouaves.

Nous avons vu tout l’établissement Sainte-Geneviève en détails, c’est très, bien aéré et l’austérité des couvents.

Nous avons quitté mon Parrain devant la riche demeure de ton ami Mr Letouzey de Bourg la Reine.

La séparation fut courte, pressés que nous étions tous deux, moi pour l’heure de retour. Nous ici sachions que souhaiter si ce n’est … que la guerre finisse au plus vite.

Sur le chemin du retour Papa maugréait se morfondant de n’avoir pu traiter de plusieurs points avec son cousin. Mais il a du le revoir depuis et se dédommager en multiples explications.

Je suis un peu à sec, pécuniairement s’entend car ici il pleut beaucoup et profitant de l’aimable invite que souvent tu me rappelles, je demande à ta générosité de m’adresser un billet à Paris chez nous.

De cette façon, si je viens à partir, je passerai à la maison avant de prendre le train je pourrai me lester.

On cause toujours de ces départs imminents, cette semaine, le 4ème Zouave a envoyé je ne sais où ni à quel régiment de Zouaves en renfort assez rondelet et de plus comme peut-être Papa te l’a écrit récemment mon cas spécial d’appartenir à une famille très éprouvée ne me protège pas efficacement. Il y a sans doute eu trop de réclamants !

Enfin, s’il faut retourner, on ira.

En attendant, je ne sais pas si notre Régiment a été éprouvé dans ces attaques réitérées sur Verdun.

J’oublie de te parler de ta santé. Comment vas-tu ?

J’ai trouvé Berthe un peu mieux. Papa, mon oncle Paul, Augustine, Marie bien portants, principalement mon Oncle Paul.

Il m’a appris que mon Oncle Auguste avait été très enrhumé. Je vais demander des nouvelles directement.

Mon Oncle Paul ne paraissait nullement impressionné par les Zouaves, il riait en racontant leurs visites, mais était moins exubérant en parlant des gaz.

En effet Mr Pennequin de Beuvry lui a écrit qu’à Beuvry-Festubert, l’herbe était décolorée.

J’espère que ta confiance dans nos amis anglais ne diminue pas et dans l’attente de te lire je te renouvelle mes vifs remerciements et t’embrasse affectueusement.

Ton neveu qui t’aime bien
Léon

Souvenirs à Marie et à Jeanne

 

 

09 Mai

« Avec 2 frères tués à l’ennemi, le commandant ne pourrait que surseoir à mon envoi sur le front » Léon Mortreux

Léon

Changement de ton pour Léon Mortreux. Plus l’heure du départ approche, plus l’appréhension apparaît dans les lettres de Léon.

Dans son courrier militaire du 9 mai 1916 envoyé à son oncle Fernand Bar, Léon Mortreux semble moins impatient d’affronter les allemands.

si j’étais envoyé à St-Denis, je signalerais au Commandant que j’ai eu 2 frères tués à l’ennemi et il ne pourrait faire autrement que surseoir à mon envoi au front.

De lettres en cartes postales, Léon exprime de plus en plus son souhait d’éviter le feu allemand en 1ère ligne.

Dans son précédent courrier, Léon Mortreux écrivait déjà que le ministre a écouté d’une oreille favorable une proposition : que tout militaire ayant eu 2 frères tués à l’ennemi ne soit plus exposé en 1ère ligne.

L’angoisse d’un départ imminent ?

Depuis un mois Léon Mortreux s’attend à partir de Tousson (Seine-et-Marne) pour affronter l’ennemi allemand en 1ère ligne sur le front. Le sergent-instructeur a rejoint le 1er Régiment des Zouaves fin mars. Sa compagnie est consignée dans l’attente de l’ordre de départ.

Léon Mortreux connait déjà l’épreuve du feu. En septembre 1914, il a été blessé une première fois par un shrapnel dans la bataille de la Marne.

Dans ses précédents courriers Léon semblait impatient de repartir en 1ère ligne pour venger la perte de ses 2 frères et que « notre nom soit bientôt délivré de la souillure allemande »

Plusieurs mois se sont écoulés. Au Léon « va-t-en-guerre » a succédé le Léon moins impulsif, plus « raisonné ». Aujourd’hui, rester en vie est plus important que de laver l’honneur de la famille pour éviter un nouveau deuil familial.

Georges Mortreux, le père de Pierre Mortreux tué au combat le 4 janvier 1915 à Steinbach en Alsace

En 1916, Georges Mortreux, le père de Léon vit à Paris.

Dans cette correspondance, Léon raconte que son père a écrit au ministre « au sujet d’un triste privilège que nous sommes en droit d’invoquer ».

A Paris, Georges Mortreux multiplie les interventions et courriers aux ministres et généraux pour leur demander de ne pas envoyer Léon Mortreux en 1ère ligne… des demandes qui restent sans réponse.

Georges Mortreux a peur de perdre encore un fils après la disparition de 2 fils en 1915.

Jules Mortreux mort à 32 ans dans l’attaque de Vauquois en Lorraine en mars 1915 et Pierre Mortreux mortellement blessé au combat à Steinbach en Alsace en janvier 1915. Il avait 25 ans.

 

Correspondance de guerre, il y a cent ans …
Lettre

Tousson
9 mai 1916
par Gironville

Cher Oncle,

Je pense que ces lignes te trouveront bien portant.

Je sais que j’ai de la chance d’être aux Zouaves puisque mes camarades du 46è sont depuis longtemps aux tranchées. J’en ai souvent des nouvelles directes.

Papa a écrit au ministre ainsi que je te l’ai déjà écrit au sujet du triste privilège que nous sommes en droit d’invoquer. Il n’a encore eu aucune réponse.

En tout cas, si j’étais envoyé à St-Denis, je signalerais au Commandant que j’ai eu 2 frères tués à l’ennemi et il ne pourrait faire autrement que surseoir à mon envoi au front.

Rien de neuf ici. Dans mes moments de loisirs je lis l’Oeuvre de Gustave Tery pour me distraire.

Flore est venue à Paris dimanche mais je ne l’ai pas vue, n’étant pas permissionnaire. J’espère apprendre que Berthe va mieux. Elle avait vraiment mauvaise mine ces derniers temps !

Quoi de neuf là bas ? J’espère que vous n’êtes plus bombardés. Avez-vous plus d’anglais encore … pour la victoire. On dit qu’à Paris, il y a beaucoup de Russes et d’Italiens, des Belges aussi …

Temps chaud ici, morne village, quoique environs très beaux. Instruction moins variée qu’au début.

Eu l’inspection du Général Dubail il y a 3 semaines environ.
Je serais très heureux de te lire. Souvenir à Marie et à Jeanne.
J’espère que les parents vont bien et t’embrasse de tout coeur

Léon

02 Mai

Il faut sauver le soldat … ayant eu 2 frères tués à l’ennemi ? Et Léon Mortreux ?

Début mai 1916, Léon Mortreux s’attend à partir sur le front à tout moment. Léon et ses compagnons du 1er Régiment des Zouaves sont consignés à Tousson en Seine-et-Marne depuis un mois à 200 kilomètres des allemands et de la ligne de front.

Dans sa carte postale rédigée le 2 mai 1916, Léon Mortreux parle des visites de généraux, comme pour souligner l’attention des grands chefs apportée au régiment. Dans un précédent courrier il écrivait que la Compagnie multiplie les exercices intensifs d’attaques et de défenses de tranchées. 

Mais dans sa correspondance de guerre, le Sergent Mortreux retient surtout ce qu’il a lu dans les journaux ces derniers jours. Il souligne les propos entendus par le ministre de la guerre.

Mr Daussette aurait proposé au ministre qui écouta d’une oreille favorable que tout militaire ayant eu 2 frères tués à l’ennemi ne soit plus exposé en 1ère ligne 

Pour Léon Mortreux, cette petite phrase lue dans les journaux résonne terriblement. Cela fait plus d’un an que Léon a perdu ses 2 frères tués à l’ennemi. Pierre en janvier 1915 à Steinbach en Alsace et Jules en mars 1915 dans l’attaque de Vauquois en Lorraine.

Alors, pourquoi partir demain sur le front affronter le feu de l’ennemi ? Même si Léon ne l’écrit pas, à la lecture de sa carte postale, on peut lire entre les lignes que Léon s’interroge.

Léon Mortreux

Léon Mortreux

Fernand Bar

Fernand Bar

Carte postale de Léon Mortreux à Fernand Bar, envoyée le 2 mai 1916.

Et Béthune ? Dans son courrier., Léon Mortreux paraît rassuré pour sa famille béthunoise. Confiant, il  questionne son oncle : Béthune se tranquillise-t-il ? Moins d’obus ?

Léon sait que sa ville est bien gardée avec la présence de troupes anglaises. L’armée britannique a fait de Béthune une de ses bases dans le Nord de la France.

Mais Béthune n’est qu’à une dizaine de kilomètres du front. Et Léon Mortreux ignore qu’un nouveau danger menace la population. Les habitants de Béthune craignent une arme déployée par l’ennemi, les gaz asphyxiants. Depuis avril 1916, les avions allemands survolent Béthune et jettent des bombes de gaz sur la ligne de front.

Correspondance de guerre, il y a cent ans ...Mai-2

1er Zouaves
Tousson (Seine-et-Marne)

2 mai 1916

Cher Oncle,

Rien de nouveau ici ? Comment vas-tu et Béthune se tranquillise t-il ?
Je veux dire y voyez-vous moins d’obus ennemis et plus de soldats anglais

As-tu vu dans les journaux que Mr Dansette avait proposé au ministre qui écouta d’une oreille favorable que tout militaire ayant eu 2 frères tués à l’ennemi ne soit plus exposé en 1ère ligne !

Beau temps ici, visites de généraux, etc …

Bons baisers de ton neveu attentionné
Léon

Souvenir à Marie et Jeanne

15 Avr

« Nous constituons la 1ère Compagnie à partir » Léon Mortreux

Nouvelle caserne pour Léon Mortreux. Dans cette carte postale du 15 avril 1916 illustrée par une vue de la petite ville de Tousson, le Sergent Léon Mortreux transmet sa nouvelle adresse : 1er Zouaves détachement de Tousson en Seine et Marne.

Dans son courrier précédent, Léon annonçait un départ imminent pour le front. Deux semaines après, c’est encore l’attente.

A Tousson, l’entrainement est intensif, dit-il.

il va sans dire que nous constituons la 1ère Compagnie à partir.

Depuis un mois Léon Mortreux a rejoint le 1er Régiment de Marche des Zouaves avec une certaine fierté. Aujourd’hui, Léon et les Zouaves sont consignés et attendent avec une impatience perceptible l’ordre de partir sur le front.

Léon Mortreux

Léon Mortreux

Fernand Bar

Fernand Bar

Carte postale de Léon Mortreux à Fernand Bar, envoyée le 15 avril 1916

Pas d’angoisse. Dans son courrier, Léon Mortreux ne laisse paraître aucune inquiétude. Juste le regret de ne pas pouvoir rencontrer sa famille à Paris avant le départ.

 

Correspondance de guerre, il y a cent ans …Tousson

15 avril 1916

Cher Oncle,

Voilà ma nouvelle adresse : Sergent Léon Mortreux 1er Zouaves détachement Tousson (Seine-et-Marne).

J’ai bien regretté de n’avoir pu me trouver au déjeuner chez Marie où je t’aurais vu en même temps. J’espère que tu es en bonne santé et que tu auras eu un excellent voyage de retour.

Nous ne sommes pas mal ici. Entraînement intensif, il va sans dire que nous constituons la 1ère Compagnie à partir.

Te renouvelant l’expression de ma profonde gratitude, je t’embrasse de tout coeur.
Ton neveu affectueux
Léon 

04 Avr

Léon Mortreux sur le départ pour le front ?

C’est le moment du départ pour le front. Dans cette carte postale du 4 avril 1916, Léon Mortreux annonce que la 62è Compagnie du 1er Zouaves est consignée au Dépôt pour un renfort.

Dans ses mots, Léon apparaît presque soulagé de partir enfin, après tant d’attente.

Voilà tant de jours que je devais m’embarquer pour le front

Pour où ? Pas un mot. Léon Mortreux ne dit rien sur la destination. Sans doute l’ignore-t-il lui-même.

Léon Mortreux

Léon Mortreux

Carte postale de Léon Mortreux à Fernand Bar, envoyée le 4 avril 1916

Au dos de sa carte postale de Milly, Léon Mortreux écrit qu’il « quitte sans regret le Dépôt l’arrière » pour rejoindre le front.

Correspondance de guerre, il y a cent ans …

Mily-2

Caserne 1er Zouaves
St-Denis

4 avril 1916

Cher Oncle,

Bien au régiment. On m’a appris ainsi qu’à un copain de la Compagnie que nous partons à St-Denis pour un renfort.

Aujourd’hui à 4h bien qu’habillés, nous ignorons encore si le départ se fera aujourd’hui ! J’avais pu aller à Paris dimanche et aviser Papa qu’il était fort probable que je partirais cette semaine. Il n’a pas eu l’air d’être trop surpris quand j’ai été le voir hier soir.

Je quitterai sans regret le Dépôt de l’arrière où j’ai été cependant heureux, mais enfin me voilà fixé. Voilà tant de jours que je devais m’embarquer pour le front.

Je t’écrirai bientôt dans la semaine et te renouvelle l’expression de ma reconnaissance et de mon affection.
Je t’embrasse.
Léon